Voyage, cousinage et jumelage : la belle quinzaine d'Acadiens en Normandie et au Poitou

La France a l’Acadie au cœur ! Originaires du Sud-Est et de Kent, plusieurs personnes y ont passé une partie du mois d’août. Ce pèlerinage au pays de leurs ancêtres fut l’occasion de renouer avec leurs racines, mais aussi de se rapprocher de leurs cousins éloignés.

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Damien Dauphin

IJL – Réseau.Presse – Le Moniteur Acadien

Nous l’évoquions dans notre édition du 9 août. Emmenés par André-Carl Vachon, une vingtaine de passionnés d’histoire et de généalogie ont effectué un circuit touristique en France. Après une première étape parisienne, ils ont mis le cap sur la Normandie. Francine Babineau, une résidente de Saint-Louis-de-Kent (Beaurivage), était du voyage.

« J’ai été dépassée par l’accueil et la gratitude que les Normands réservent aux Acadiens en reconnaissance de leur contribution à leur libération », confie-t-elle au Moniteur Acadien.

Dans la localité de Courseulles-sur-mer, les estivants ont croisé Anne Godin, invitée de la Semaine acadienne. L’ancienne journaliste devenue conteuse y séjournait pour la deuxième fois. À un public venu en grand nombre, elle a raconté l’histoire de la cuisine acadienne, à l’origine très française, mais que les aléas de la Déportation ont simplifiée.

« Notre fricot vient du Poitou, mentionne l’autrice du livre de recettes Saveurs d’Acadie qu’elle a présenté lors de la Semaine acadienne en 2019. Nous y avons ajouté les patates. La râpure, elle, est devenue le symbole de notre survivance. »

En donnant des cours de cuisine acadienne à son public français, elle lui a fait redécouvrir la sarriette, une herbe aromatique délaissée par la cuisine moderne sur le continent.

« Les gens n’en revenaient pas. Ils m’ont dit que c’était délicieux et réconfortant, et m’ont demandé comment quelque chose d’aussi simple pouvait être aussi bon », indique-t-elle en entrevue téléphonique.

« J’entends parler ma grand-mère »

Anne Godin, qui incarne le personnage de la Conteuse Bleue, a poursuivi son propre périple dans la région poitevine pour y présenter ses contes et légendes d’Acadie. Elle était accompagnée par une violoneuse qui jouait des pièces de Denise Daigle, de Bouctouche.

« Au Poitou, on sent l’Acadie partout, témoigne-t-elle. J’ai rencontré des descendants de la douzaine de familles qui sont restées à la fin du dix-huitième siècle. Ils se sentent très Acadiens. Ils parlent encore avec nos mots. Une dame m’a dit qu’en m’écoutant, elle avait l’impression d’entendre sa grand-mère lui parler. »

Mme Godin y a croisé le groupe d’André-Carl Vachon. « Partout où nous sommes allés, nous avons été accueillis à bras ouverts. Chaque endroit visité, où nos ancêtres ont vécu, nous sentions cette chaleur humaine d’un retour au bercail », assure l’historien.

Ce dernier, qui a présenté deux conférences sur l’histoire de l’Acadie, la première le 10 août à Courseulles-sur-Mer et la deuxième le 13 août à La Chaussée, affirme que les Français étaient très réceptifs. « Je dirais même qu’ils étaient assoiffés et très curieux d’en apprendre plus sur notre histoire », relate-t-il.

La proximité des Acadiens avec ses alliés historiques, les peuples autochtones, a été révélée au public français. L’aîné Brian Francis, artiste-peintre, écrivain et cinéaste mi’kmaq, a peint pour l’occasion un tableau intitulé « Le voyage ». L’œuvre évoque la traversée de l’Atlantique par les Poitevins qui, au 17e siècle, ont quitté la région du Loudunais pour s’établir au Nouveau-Monde. Il en a fait cadeau à la Maison de l’Acadie à La Chaussée.

Le Poitou est Acadien

Le 14 août, à Châtellerault, le ministre néo-brunswickois de la Francophonie, Glen Savoie, et le maire de Champdoré, Jean-Pierre Richard, ont dévoilé une plaque commémorant l’arrivée des déportés acadiens dans la région. Le village de Saint-Antoine, dans la nouvelle municipalité de Champdoré, est jumelé avec la ville de Châtellerault.

Le point d’orgue de ce voyage fut la célébration de la fête de l’Acadie à Archigny. Deux à trois mille personnes y ont participé, selon Anne Godin. Notons que la commune d’Archigny est jumelée avec Saint-Louis-de-Kent. Francine Babineau y a vécu des moments qu’elle qualifie de très forts.

« Le 15 août, à Archigny, je me sentais prise de maintes émotions en rencontrant des gens de partout qui vibraient à cette fierté acadienne. Lorsque nous entonnions ‘Viens voir l’Acadie’, ‘Y’a une étoile pour nous’ ou l’Ave Maris Stella, la foule s’y mêlait », frisonne encore la résidente de Beaurivage.

Ce pèlerinage généalogique en France a transcendé les simples séjours touristiques. Il a été une quête d’identité, une occasion de connecter avec les ancêtres et de tisser des liens avec des parents éloignés qui partagent un héritage culturel. Il a rappelé à tous les participants, qu’ils aient de nos jours la citoyenneté canadienne ou la nationalité française, la valeur profonde de leur héritage acadien et leur place dans la grande toile de l’histoire humaine.

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Photos

Titre : Touristes (photo pour la une)

Légende : Le groupe de touristes emmenés par l’historien André-Carl Vachon à l’aéroport, sur le point de rentrer en Acadie.

Crédit : Gracieuseté

Titre : Anne cuisine

Légende : À Courseulles-sur-mer, Anne Godin a fait découvrir la cuisine acadienne aux habitants de cette ville côtière du Calvados (Normandie).

Crédit : Gracieuseté

Titre : Fresque acadienne

Légende : Notre groupe de voyageurs devant une gigantesque fresque acadienne à Nantes (Loire-Atlantique).

Crédit : Gracieuseté

Titre : Banderole Acadie Poitou

Légende : Les Acadiens du Poitou ont réservé un accueil chaleureux aux Acadiens du Nouveau-Brunswick.

Crédit : Gracieuseté

Titre : Tintamarre poitevin

Légende : À Archigny, le point d’orgue du voyage fut sans conteste la célébration de la Fête de l’Acadie avec un grand tintamarre qui a réuni environ 3000 personnes.

Crédit : Gracieuseté

La généalogie, une quête irrationnelle (D.D.)

Artiste originaire de Cocagne, Isabelle Cyr est l’héroïne du film de Phil Comeau Racines, Diaspora & Guerre, qui a été présenté dans le cadre de la Semaine acadienne à Courseulles-sur-mer. En entrevue téléphonique, elle a confié avoir vécu un moment magique et très émouvant tout en offrant un mini-concert. Une séance de questions-réponses avec le public a suivi la projection.

« Le film émeut beaucoup par son humanité. Il suscite chez les gens un intérêt personnel. Tout le monde se plonge dans sa généalogie. C'est une quête viscérale et pas du tout rationnelle. »

Isabelle Cyr estime que l’œuvre résonne très fort dans un monde où il y a énormément de peuples en mouvance. Des descendants de familles séparées lors de la Déportation ont retrouvé leurs lointains cousins et ont fait des découvertes étonnantes.

« L’ADN est très fort, il y a beaucoup de ressemblance au niveau du physique et de la personnalité », témoigne Isabelle Cyr.

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Photo : Isabelle Cyr
Légende : Isabelle Cyr sur scène à Courseulles-sur-mer.
Crédit : Gracieuseté

  • Nombre de fichiers 7
  • Date de création 30 août, 2023
  • Dernière mise à jour 30 août, 2023
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