Violence sexuelle : l’Université Sainte-Anne est accusée d'inaction

Un regroupement d’étudiants et danciens étudiants de lUniversité Sainte-Anne a lancé une campagne de sensibilisation ainsi quune pétition virtuelle dans le but de dénoncer la culture du viol sur le campus principal de luniversité, à Pointe-de-l’Église. 

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Jean-Philippe Giroux

IJL – Réseau.Presse – Le Courrier de la Nouvelle-Écosse

Cette pétition a été appuyée par plus de 500 signataires depuis la création du site Web.

La campagne Faut que SA change maintenant a été lancée au début du mois de septembre. Les auteurs, qui disent avoir été victimes d'agressions sexuelles ou ont observé une culture du viol à luniversité, allèguent quau moins 53 agressions sexuelles ont eu lieu sur le campus, de 2015 à 2019, et quun seul élève a violé au moins 17 étudiantes.

Selon le groupe, lUniversité Sainte-Anne (USA) aurait fait preuve dinertie. Les personnes derrière la campagne déplorent que l’établissement scolaire nait pas pris au sérieux les plaintes déposées par les victimes dans le passé.

Le 11 septembre, Faut que SA change maintenant, a publié un message demandant au recteur de lUSA de reconnaitre publiquement la présence de la culture du viol sur son campus, de présenter des excuses aux victimes et de prendre en compte les recommandations  énumérées sur leur site, et ce, dici la fin de lannée courante.

Le Courrier na pas pu confirmer le nombre dagressions sexuelles citées dans la pétition.

Lors dune entrevue avec Le Courrier, luniversité a affirmé être au courant et avoir réagi relativement à quatre allégations qui ont été signalées officiellement depuis 2015.

De son côté, la GRC de Meteghan soutient que l'information citée dans la pétition ne leur a pas été signalée : « Nous pouvons confirmer que nous n'avons pas d'enquête concernant une série d'agressions sexuelles historiques à l'Université Sainte-Anne. »

Lagent dinformation provinciale de la GRC, Chris Marshall, précise par courriel quelle a reçu quatre rapports d'agressions sexuelles provenant de l'Université depuis 2015, soit un cas en 2016, un autre en 2021 et les deux autres cette année. « Aucun de ces cas nimpliquait une série d'agressions sexuelles, et ils impliquaient tous des personnes différentes, renchérit-il. Pour être clair, ces incidents n'impliquent pas qu'une seule personne ait commis les quatre agressions sexuelles, et les victimes étaient différentes dans chaque cas. »

Expérience sur le campus

Riley* a vécu une agression sexuelle au début de son premier semestre au campus de Pointe-de-l’Église, un incident qui a été rapporté à luniversité lors de cette période.

*La rédaction a décidé de protéger la source pour des raisons de sécurité et de préjudices sérieux.

Riley a porté plainte à la GRC de Meteghan le semestre suivant, en février. Daprès cette personne, luniversité prenait beaucoup trop de temps et il n'y avait « aucune empathie » face à sa situation.

Cependant, à sa déception, le processus était aussi long lorsque Riley sest tourné vers la GRC.

Puisque Riley avait consommé de lalcool avant lincident, luniversité lui aurait dit quil serait difficile de se fier à ses propos. « Mais dans [la politique de luniversité], ça dit que, quand tu bois, cest automatiquement un non. Pis moi, dans mon cas, [l'auteur de l'incident] avait admis dans le premier 15 minutes quil navait pas demandé du consentement verbalement, pis ils ont quand même voté plus sur son côté. »

La politique sur la violence sexuelle de lUSA indique que « Sans oui, c'est non ! » et précise une liste de circonstances dans lesquelles il est impossible d'accorder son consentement, notamment lorsqu'une personne est intoxiquée ou encore endormie.

Riley raconte que lincident a eu lieu en octobre et que son cas n’était pas encore réglé à la fin de lannée scolaire.

Depuis, Riley a changé duniversité, ne se sentant plus à laise de poursuivre ses études sur le même campus que la personne qui la agressé. « Les problèmes mentaux qui viennent avec ça, en même temps que tu essaies d’étudier à luniversité pis que tu vois cette personne 24/7 » est lune des grandes raisons qui ont justifié son départ.

La victime a décidé de contribuer à la campagne pour sassurer que « dautres filles ou dautres personnes passent pas à travers du même processus que nous autres ».

Faut que SA change maintenant a conçu un site Internet qui inclut la pétition, mais aussi une section nommée « Racontez votre histoire », où les personnes peuvent librement partager leur expérience de violence sexuelle à lUSA sous le couvert de lanonymat.

On y trouve 15 témoignages, en date du 13 septembre.

Aller vers la GRC

Questionné sur le nombre de cas dagressions sexuelles rapporté à la GRC de Meteghan, Riley dit ne pas être étonné de voir que peu de victimes ont porté plainte. « Cest souvent que ça finit par [ne pas] être en faveur de la victime, pis cest juste retraumatiant pour la personne, pis cest un grand processus. »

Riley mentionne navoir reçu un retour de la GRC qu’à la fin juillet, cinq mois après avoir porté plainte. On la informé que la personne accusée a déjà passé son test de polygraphe et qu'aucun chef d'accusation n'a été porté contre elle. « Ils mont jamais contacté pour minformer que, lui, il allait passer son polygraphe pis que, moi, j’étais supposé de le faire aussi », affirme Riley.

Il sagit dun processus intimidant qui est rarement en faveur de la victime, selon Riley.

La GRC de Meteghan a lancé un appel le 7 septembre afin dobtenir de l'information sur les agressions sexuelles à lUSA qui ont été citées dans la pétition.

Le détachement encourage les survivants à communiquer avec eux. « La GRC de Meteghan tient à ce que les survivants sachent qu'ils peuvent communiquer avec la police et discuter de l'incident avant de décider de participer à l'enquête et au processus judiciaire. Des services d'aide aux victimes sont disponibles et les survivants seront soutenus », déclare la GRC par voie de communiqué.

Des ressources de soutien pour les victimes de violence sexuelle : 

Briser le Silence NÉ

Allo J’écoute (pour les élèves du postsecondaire)

Centre daide aux victimes dagression sexuelle 

Les étapes à suivre

Notons que la politique de luniversité sur la violence sexuelle comprend des consignes en matière de rapport d'incidents, dont une procédure relative à la coopération avec le service de police local lorsque des poursuites criminelles ou civiles sont entamées.

On y trouve également des directives pour porter plainte à la GRC ainsi que les coordonnées du Programme dinfirmière examinatrice préposée aux survivants dagression sexuelle de Santé Nouvelle-Écosse. Ce dernier offre des services 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 par téléphone, avec des centres de soins physiques à Digby et Yarmouth.

La campagne étudiante a devancé lannonce des travaux de lUSA en ce qui concerne le dossier de la prévention de la violence sexuelle. « Cest quelque chose quon a pris très au sérieux parce que la prévention de la violence sexuelle, cest une priorité pour lUniversité Sainte-Anne », annonce Rachelle LeBlanc, directrice des communications et du recrutement.

Dans un communiqué publié le 5 septembre, luniversité mentionne la refonte de sa politique sur la violence sexuelle, qui a été entamée avant la campagne. Adoptée par le conseil des gouverneurs le 13 février 2021, cette politique a été créée afin de détailler la procédure à suivre pour les victimes, précise Mme LeBlanc.

LUSA travaille aussi sur un plan de réaménagement de l’éclairage extérieur sur le campus et prévoit offrir des services de conseils au bien-être.

Une éducatrice en prévention de violence sexuelle, Cailey Wood, a été embauchée dernièrement. Elle offrira une formation au début de lannée scolaire pour sensibiliser, entre autres, les facilitateurs et animateurs ainsi que les membres des équipes sportives.

La directrice des communications ajoute que dautres personnes sont disponibles sur le campus pour appuyer les victimes, dont le directeur de la vie étudiante et une conseillère.

  • Nombre de fichiers 5
  • Date de création 13 septembre, 2023
  • Dernière mise à jour 13 septembre, 2023
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