Vieillir dans son village: «Embrun de mes amours»

Quand elle nous parle de son village d’Embrun, Lise Grégoire Brisson donne un câlin à l’air ambiant. «Embrun de mes amours», lance-t-elle. L’octogénaire chaleureuse et extravertie tient à terminer sa vie dans son village et en français.

______________________

Charles Fontaine

IJL – Réseau.Presse –Le Droit

Née à Cornwall, Lise Grégoire vit à Embrun depuis l’âge de deux ans. Celle pour qui la communication en français est très importante vit la dernière phase de son voyage à la résidence Le Pavillon. Ici, quasiment tous les résidents parlent le français, à l’exception du personnel majoritairement anglophone, ce qui fait grincer des dents Mme Grégoire.

Lorsqu’on rencontre la dame de 80 ans, elle est assise à l’extérieur, dans une berceuse, à l’ombre, parce qu’elle n’apprécie pas la chaleur. On rentre alors à l’air climatisé où la conversation est ponctuée de «mon p’tit gars».

Ses sept frères et sœurs vivent tous à Embrun. Et la famille, c’est important pour Lise Grégoire. Dans sa chambre, il y a son mari Armand et son fils Normand, et elle présente fièrement tous les membres de sa famille dans un cadre bien en vue. En commençant par le chien Jack. Elle et Armand Brisson ont d’ailleurs célébré leur 60e anniversaire de mariage le 30 juin dernier.

Le village est ancré dans le sang des Grégoire. La religion également. La messe du dimanche est un incontournable. Mme Grégoire tient d’ailleurs à me montrer la petite salle de la résidence réservée à la religion. Leur «excellent curé», Michel Pomminville, tient une messe deux fois par mois. Mais c’est Lise Grégoire qui s’occupe de préparer la messe, de laver les objets religieux et elle s’avance même au chant de temps à autre.

Gloire d’être francophone

Née dans une famille canadienne-française, la souriante dame est fière d’être francophone. Lorsqu’elle allait visiter la famille de sa mère à Saint-Jérôme, ses cousines étaient étonnées qu’elle parle français. «Mais moi je me faisais une gloire d’être francophone et de venir de l’Ontario. C’était quelque chose de spécial pour nous. Mais elles ne comprenaient pas qu’on pouvait avoir un village canadien-français en Ontario.»

Par contre, la fière Franco-ontarienne a dû suivre tout son secondaire entièrement en anglais, «même le latin!» Chose qu’elle n’a pas bien aimée, en plus que tous les élèves étaient francophones. «On te massacrait ça l’anglais nous autres!» L’École secondaire catholique Embrun est maintenant un centre d’enseignement francophone, de même que la communauté.

«C’est francophone à Embrun, maintenant ce ne l’est plus autant, mais du temps de mes parents, c’était très francophone. Je n’ai rien contre les Anglais! Mais on rencontrait du monde et ça parlait toute notre langue maternelle. C’était du monde jovial et chaleureux», raconte la dame au chandail fleuri.

Travailler en anglais

L’ancienne camelot du journal Le Droit a œuvré pendant 12 ans à la Banque Scotia au centre-ville d’Ottawa. «C’était très anglophone, mais quand un client francophone arrivait, bien on venait me chercher et mon patron était tout heureux d’avoir une Canadienne française dans son équipe.»

La conversation en français lui manquait, mais elle tient à souligner qu’elle a beaucoup appris des anglophones.

Rester dans son village

La dame active qui conduit encore n’a jamais pensé quitter son village et s’installer dans une grande ville pour terminer sa vie. Elle en connaît par contre qui ont déménagé à Ottawa pour se rapprocher de leurs enfants. «Ça ne m’est jamais passé par la tête, mais j’aurais bien de la misère. Je tiens trop à mon village, je suis une malade de village et mes enfants aussi sont comme ça.»

Elle vante les bons services, les écoles, les infrastructures sportives et l’ambiance chaleureuse d’Embrun. Avec les sports de ses trois enfants, elle courait partout, mais avait l’occasion de rentrer tout le monde. «Les samedis, mon p’tit gras, dans notre temps, c’était occupé.»

Camelote, préposée à la banque, mère de famille, gardienne d’enfants, traiteur, préposée dans une papeterie, sans compter les heures où elle a dû prendre soin de son fils et de son mari malade, Lise Grégoire soutient qu’elle a été occupée toute sa vie.

Garder la salle communautaire

Le conseil municipal d’Embrun prévoit installer une nouvelle bibliothèque dans la salle communautaire Camille-Piché. La nouvelle salle communautaire sera alors érigée dans le futur complexe récréatif qui sera situé près du dôme sportif. La décision de transformer la salle communautaire historique en bibliothèque ne fait pas l’unanimité chez les résidents, surtout les personnes âgées qui rappellent que cette salle a été fondée et financée par la communauté.

«Pourquoi font-ils ça?», se demande Mme Grégoire. Elle trouve que la nouvelle salle sera trop éloignée du village.

En attendant, Lise Grégoire continue de jouer aux quilles, voisines de la salle communautaire. Une autre occasion pour elle de socialiser avec sa communauté chérie.

-30-

Photos

Quand elle nous parle de son village d’Embrun, Lise Grégoire Brisson donne un câlin à l’air ambiant. «Embrun de mes amours», lance-t-elle. L’octogénaire chaleureuse et extravertie tient à terminer sa vie dans son village et en français. (Étienne Ranger, Le Droit)

  • Nombre de fichiers 2
  • Date de création 15 août, 2022
  • Dernière mise à jour 15 août, 2022
error: Contenu protégé, veuillez télécharger l\'article