Vent d’impatience dans le monde francophone de l’éducation

D’entrée de jeu dans sa déclaration, le trio sollicite «une intervention immédiate du gouvernement provincial dans le dossier de la pénurie de personnel enseignant qualifié afin de maintenir un système d’éducation en langue française de haute qualité.»

Deux ans et demi après la remise du rapport du Groupe de travail au ministre de l’Éducation, Stephen Lecce, sur la pénurie des enseignantes et enseignants dans le système d’éducation en langue française en Ontario — dont faisaient partie l’AEFO, l’ACEPO et l’AFOCSC, mais également deux représentants du ministère de l’Éducation de l’Ontario — rien n’a bougé ou presque en ce qui concerne les 37 recommandations contenues dans le rapport. 

C’est du moins l’avis du directeur général de l’AFOCSC, Yves Lévesque, et de la présidente de l’AEFO, Anne Vinet-Roy.

Pour le DG de l’AFOCSC, la situation qui perdure fait en sorte «qu’on commence à être un peu excédé» pour garder un ton posé tient-il à préciser. Pour lui, la pénurie d’enseignants est encore plus criante dans le Nord de l’Ontario, compte tenu de la distribution de la population. 

Quant à Mme Vinet-Roy, elle est d’avis que l’inaction «n’est pas surprenante de ce gouvernement-là». Lorsque joints au téléphone et par Zoom, les deux responsables s’entendent pour dire qu’il faudrait ajouter 500 enseignants et enseignantes supplémentaires par année, et ce, pour les cinq années à venir afin de trouver un certain équilibre. Les données sont alarmantes. C’était vrai en 2021, c’est encore vrai en 2023.

S’il faut en croire les chiffres mentionnés dans le communiqué, en 2022, seulement 33 étudiants et étudiantes ont obtenu un baccalauréat en éducation leur permettant d’enseigner aux élèves des cycles intermédiaire et supérieur des écoles de langue française — soit de la 7e à la 12e année.

De plus, selon l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario, 30 % des diplômées et des diplômés des programmes de formation en langue française ne renouvèlent pas leur certificat de qualification après 5 ans.

Difficulté en région éloignée

Le directeur de l’éducation du Conseil scolaire du Grand Nord, Sébastien Fontaine, confirme que le recrutement est difficile. Pour certaines régions plus que d’autres.

Dans le Grand Sudbury, l’arrivée d’un plus grand nombre d’immigrants francophones et la présence de l’École des sciences de l’éducation de l’Université Laurentienne assurent qu’il y a des candidats pour les postes affichés. «Ça demeure tout de même un défi et un travail constant», dit-il.

Les postes dans les écoles des régions éloignées sont plus difficiles à remplir. «Comme on a des écoles plus petites, quand il manque un enseignant ça a un grand impact», note M. Fontaine.

Le Conseil travaille avec plusieurs partenaires pour y arriver, il voit entre autres le Conseil comme un partenaire de Communauté francophone accueillante pour attirer et accueillir des nouveaux arrivants.

Des solutions simples

Les solutions passent assurément par la formation. «Il faut financer de nouvelles places.» Yves Lévesque en est convaincu. Il est toutefois conscient que la situation à La Laurentienne n’est pas encore réglée, qu’il n’y a que 40 étudiants en éducation dans la nouvelle Université de l’Ontario français et que l’Université d’Ottawa a fait le plein d’étudiants en éducation. D’où l’urgence pour le gouvernement de financer de nouvelles places. «Il a l’argent», assure Mme Vinet-Roy.

Quant à l’immigration, sans fermer la porte aux enseignants venus d’ailleurs, bien au contraire, Mme Vinet-Roy et M. Lévesque considèrent que c’est un processus lent. «C’est long et pénible avant d’avoir la certification de l’Ordre des enseignantes et enseignants de l’Ontario», ajoute la présidente de l’AEFO. L’Ordre oblige d’ailleurs ses membres à obtenir quatre sessions de cours de formation à l’enseignement, ce qui ralentit l’arrivée sur le marché du travail des nouveaux enseignants.

Un petit tour en cour?

Si la présidente du syndicat francophone considère que le ton de la lettre envoyée récemment au ministre de l’Éducation et dont fait mention le communiqué est somme toute «gentille», elle ajoute du même souffle que «le gouvernement a la responsabilité d’être équitable à l’égard des francophones.» 

De son côté, M. Lévesque considère qu’il y a urgence de trouver une solution. Devant l’inertie gouvernementale, «on va être obligé de trouver d’autres moyens pour faire réagir le gouvernement.»

Sa collègue avance même que les tribunaux pourraient être un recours envisageable. «Ce n’est pas dans le plan pour le moment, mais ce n’est pas impossible», conclut-elle.

-30-

Yves Lévesque - Profes_Crop (2).jpg

Selon Yves Lévesque, le fait que les différentes facultés ontariennes en éducation affichent complet concernant l’enseignement en français démontre l’intérêt pour les étudiants d’aller enseigner en français. — Photo : Courtoisie AFOCSC

Anne Roy-Vinet.jpg

La présidente de l’AEFO, Anne Vinet-Roy, n’exclut pas le recours aux tribunaux si le gouvernement ontarien ne fait rien pour contrer la pénurie d’enseignants francophones dans les écoles françaises en Ontario. — Photo : Courtoisie AEFO.

  • Nombre de fichiers 6
  • Date de création 7 juin, 2023
  • Dernière mise à jour 7 juin, 2023
error: Contenu protégé, veuillez télécharger l\'article