Une méthode simplifiée du programme «1000 livres avant la maternelle»

Pour ne pas décourager parents et enfants à franchir la barre des 1000 livres avant la maternelle, la bibliothèque de Timmins et le Programme On y va ont ajusté leur approche. La journée de l’alphabétisation familiale, tenue le samedi 27 janvier, a été l’occasion de présenter le nouveau programme. Il séduit déjà.

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Mehdi Mehenni

IJL – Réseau.Presse – Le Voyageur

 

La bibliothécaire aux services pour enfants et adolescents de la Bibliothèque publique de Timmins, Francine Denis, explique que le programme est «une initiative de littératie précoce qui favorise l’amour de la lecture et améliore les compétences linguistiques, le vocabulaire et les capacités cognitives des jeunes enfants».

Il renforce également «le lien parent-enfant grâce à des expériences de lecture partagées et favorise la compétence préalable à la lecture qui prépare les enfants à l’école».

Initialement, «1000 livres avant la maternelle» avait été lancé en 2020 à Timmins. Mais la pandémie de covid-19 a freiné son élan. Ce n’était pas la seule raison. La gestionnaire du Programme On y va, Andrea Lauzon, explique que «la tâche était ardue» pour les parents, comme ils devaient documenter chaque livre lu.

Pendant les quatre dernières années, le programme a reçu 607 jeunes inscrits dans sa version en anglais et 248 enfants inscrits dans sa version en français.

Manon Chabot avait inscrit sa fille Mélodie, âgée de 2 ans, dans le programme, avant d’abandonner. «C’était trop de gestion d’écrire le titre de chaque livre. La version francophone du programme n’est pas numérisée, contrairement à la version anglophone. À la maison, nous lisons souvent en français et rarement en anglais. Après une centaine de livres, j’étais tannée», témoigne-t-elle.

«Il faut qu’il y ait du plaisir»

La professeure titulaire à l’Université TÉLUQ et professeure associée à l’Université de Sudbury et l’Université Laurentienne, Isabelle Carignan, ne recommande pas les méthodes compliquées et rigides. «Pour qu’un projet de littératie familiale fonctionne, il faut qu’il y ait du plaisir et que ce soit flexible. Il faut veiller également à ce que les parents ne sentent pas incompétents»*.

Pour faire plus simple, Andrea Lauzon a fait en sorte que les enfants puissent participer activement au suivi de leurs progrès en utilisant des autocollants, notamment sur des cartes d’histoires.

«Chaque famille qui s’inscrit au programme recevra des cartes d’histoires, des autocollants, des tampons et des timbres pour suivre ses progrès en lecture. Nous avons également trois étapes à franchir pour nos jeunes lecteurs : 300 livres lus, 600 livres lus et 1000 livres lus. À chaque étape, les familles sont encouragées à se rendre à la Bibliothèque publique de Timmins ou dans un centre On y va local pour recevoir un petit prix», fait-elle savoir.

La démarche semble déjà séduire, puisque Manon Chabot s’est rendue à la bibliothèque le 27 janvier pour réinscrire sa fille Mélodie au programme.

«Il va y avoir des récompenses et des petits cadeaux pour la petite, donc je vais me forcer un peu plus», dit-elle.

Francine Denis affirme que la Bibliothèque municipale de Timmins compte 125 464 livres, dont 44 604 pour enfants, soit 35,5 % de la collection totale. Dans la catégorie enfants, la bibliothèque compte 12 150 livres illustrés, pour l’âge du programme avant la maternelle.

Si l’enfant et le parent vont lire un livre par jour, ce qui fait 365 livres par an, ils vont dépasser les 1000 livres, au bout de trois ans. «Cela peut commencer dès la naissance, parce qu’on peut avoir des livres jeux, des livres pour le bain, comme il y a des livres en plastique ou en caoutchouc. Moi même je faisais la lecture dans le bain avec mes enfants», raconte Isabelle Carignan.

Au-delà des chiffres

Autre nouveauté dans le programme : la relecture d’un livre est comptabilisée à chaque fois.

«Avant la maternelle, l’enfant va aimer lire et relire le même livre, parce qu’il va se sentir compétent. À force, l’enfant anticipe et souvent il va commencer à rigoler avant même que l’image qu’il trouve drôle n’arrive», explique Mme Carignan.

Pour que l’activité ne soit pas stressante, l’universitaire recommande de ne pas forcer l’enfant à achever un livre dont il n’apprécie pas la lecture.

Andrea Lauzon assure que les livres non achevés sont comptabilisés dans le nouveau programme. «C’est reconnaitre la valeur de l’expérience de la lecture et encourager une relation positive avec les livres dès le plus jeune âge», indique-t-elle.

Isabelle Carignan note aussi l’importance de diversifier les genres littéraires, entre le documentaire, la bande dessinée, l’album photos… «Il y a, par exemple, des livres qui comportent comme des petites bêtes à toucher. L’enfant peut donc lire, toucher, voir les couleurs, lire également les images… parce qu’un enfant est capable de lire les images et il va souvent remarquer des choses que les adultes ne vont pas forcément remarquer. Cela développe son imagination», ajoute-t-elle (voir vidéos d’exemples de livres et de méthodes de lecture sur http://lavoixdunord.ca).

Isabelle Carignan insiste sur le fait que l’enfant doit s’amuser. Andrea Lauzon n’en pense pas moins.

«Pour moi, l’objectif principal du programme n’est pas d’atteindre la barre des 1000 livres. Il s’agit d’inculquer aux enfants l’amour de la lecture tout au long de leur vie, en posant des bases solides pour l’alphabétisation précoce», souligne la gestionnaire du programme.

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* En concertation avec Annie-Roy Charland, professeure titulaire, département de psychologie, Université de Moncton.

====[Encadré ]====

Les 10 droits du lecteur de Pennac :

– Le droit de ne pas lire
– Le droit de sauter des pages
– Le droit de ne pas finir un livre
– Le droit de le relire
– Le droit de lire n’importe quoi
– Le droit au Bovarysme
– Le droit de lire n’importe où
– Le droit de grappiller
– Le droit de lire à haute voix
– Le droit de se taire

Recommandés par Isabelle Carignan

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Francine Denis, bibliothécaire aux services pour enfants et adolescents de la Bibliothèque publique de Timmins — Photo : Courtoisie

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Manon Chabot et sa fille Mélodie — Photo : Courtoisie.

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Isabelle Carignan, professeure titulaire à l’Université TéLUQ, et professeure associée à l’Université de Sudbury et l’Université Laurentienne — Photo : Mehdi Mehenni

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Andrea Lauzon, gestionnaire du programme On y va dans le district de Cochrane — Photo : Courtoisie

 

  • Nombre de fichiers 5
  • Date de création 2 février, 2024
  • Dernière mise à jour 2 février, 2024
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