Un député d’Ottawa dans l’embarras pour des propos jugés «antisémites»

ÉMILIE GOUGEON-PELLETIER

Initiative de journalisme local — Le Droit

Le député néo-démocrate Joel Harden s’est excusé pour des propos concernant le conflit israélo-palestinien qu’il a tenus à l’été 2021.

Joel Harden s’est excusé «sans réserve à la communauté juive pour les commentaires qu’[il a] faits lors d’une entrevue avec le Forum d’Ottawa sur Israël Palestine». 

Le conflit au Moyen-Orient entre Israël et la Palestine qui dure depuis le milieu du 20e siècle entremêle de fortes tensions géopolitiques et des affrontements violents, notamment dans la bande de Gaza, à Jérusalem. 

Lors de la discussion tenue en août 2021, le député d’Ottawa-Centre a dit qu’il avait «posé de nombreuses questions à des voisins juifs pour savoir combien de temps nous allons devoir supporter cela».

«Si je devais nommer [...] la plus grande menace, la plus grande origine de violence au Moyen-Orient, c’est sans aucun doute l’État d’Israël et la façon dont ils n’éprouvent aucune honte à défier le droit international et à faire ce qu’ils veulent.»

«J'ai parlé d'une manière qui perpétuait un stéréotype antisémite envers mes voisins juifs», a écrit Joel Harden dans une déclaration envoyée dimanche, où il dit regretter son choix de mots.

Le député a promis que cela ne se reproduirait plus et qu’il s’engage à «travailler avec des leaders juifs qui peuvent [l]'aider à comprendre l'antisémitisme».

Possibles sanctions?

Mais des groupes juifs estiment que Joel Harden ne devrait pas siéger à l’Assemblée législative de l’Ontario.

Les commentaires du député Harden ne sont autre que «de l’antisémitisme et de la désinformation sur Israël», ont accusé la Fédération juive d’Ottawa et le Centre des affaires israéliennes et juives (CIJA), dans une déclaration conjointe. 

«À une époque où la haine anti-juive est en hausse, il est profondément décevant et blessant qu'un élu partage une telle rhétorique avec tant de désinvolture», ont soutenu les organismes. 

La PDG de la Fédération juive d’Ottawa Andrea Freedman et le vice-président des relations gouvernementales du CIJA jugent que le NPD ontarien devrait sanctionner Joel Harden.

«Tout élu, à quelque niveau que ce soit, qui s'est livré à des comportements antagonistes répétés envers la communauté juive doit être dûment sanctionné. Les actions ont des conséquences. Ils ne devraient certainement pas être autorisés à rester dans le caucus d'un parti représenté dans une législature. À tout le moins, ils doivent être dépouillés de leurs responsabilités législatives.»

Le chef intérimaire du NPD ontarien Peter Tabuns a dit lundi qu’il était «très fâché» lorsqu’il a pris connaissance des commentaires de Joel Harden. 

Peter Tabuns réitère que les propos du député d’Ottawa-Centre étaient «blessants» et qu’il l’a prévenu qu’il s’assurera que Joel Harden donne suite à son engagement de s’informer à propos de l’antisémitisme. 

De l’antisémitisme, vraiment?

Le groupe Voix juives indépendantes Canada (VJI), qui se décrit comme un organisme qui représente les juifs canadiens engagés envers la justice sociale et les droits humains, n’est pas aussi tranchant dans ses critiques à l’endroit de Joel Harden.

«Je pense que ça vaut la peine d’écouter l’entrevue au complet et d’être conscient du contexte avant de critiquer», avance le responsable des relations médiatiques de l’organisme, Aaron Lakoff.

Certes, le député aurait pu mieux choisir ses mots, souligne M. Lakoff, mais «il est évident, lorsqu’on l’écoute, que M. Harden n’est pas un antisémite, et je pense que cela se reflète dans son parcours politique.»

VJI est d’avis qu’il faut poser un regard plus nuancé lorsqu’il est question des critiques à l’endroit de l’État d’Israël. 

En juin 2022, une commission d’enquête mandatée par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a conclu que l’occupation de territoires palestiniens par Israël et la discrimination envers la population palestinienne sont «les causes principales» des tensions et de l’instabilité. 

«Ça constitue un réel problème lorsque l’on accuse d’antisémitisme les gens qui dénoncent les abus aux droits humains et les situations d’apartheid, comme c’est le cas. Ça implique de réduire au silence les Palestiniens et leurs alliés.»

L’organisme s’inquiète de voir que de plus en plus de politiciens, d’intellectuels et quiconque ayant une plateforme publique et qui «critiquent l’apartheid» deviennent la cible de «campagnes de diffamation par le lobby pro-Israël».

«Oui, l’antisémitisme existe, et en tant que Juifs, c’est quelque chose que nous voyons et que nous devons affronter chaque jour. Mais il faut savoir faire la différence», conclut Aaron Lakoff.

Questionné à savoir si toute critique à propos de l’État d’Israël est antisémite, Peter Tabuns a répondu que «la critique d’une nation n’est pas en soi antisémite, mais les déclarations antisémites, les stéréotypes antisémites, ce n’est pas acceptable». 

À LIRE AUSSI: Un rapport de l’ONU accuse Israël d’être la cause principale du conflit avec les palestiniens

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  • Date de création 22 novembre, 2022
  • Dernière mise à jour 22 novembre, 2022
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