Un cercle d’échange pour évaluer la condition de la femme

Dans le cadre de sa mission de favoriser les rencontres et les échanges entre différentes communautés de Sudbury, le Contact interculturel francophone de Sudbury (CIFS) a organisé vendredi une table ronde intitulée «Entre-elles : explorer les rôles et les perspectives des femmes». Les participant.e.s à la rencontre se sont réjouis du pas franchi dans l’amélioration des conditions de vie de la femme. Ils ont toutefois souligné que le chemin est encore long.

 

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Venant Nshimyumurwa

IJL – Réseau.Presse – Le Voyageur

Dans le passé, le CIFS facilitait des «espaces positifs et au pluriel» et des rencontres réunissaient des gens pour évoquer le plus souvent la diversité culturelle et raciale dans la région de Sudbury.

«On remarquait de moins en moins le pluriel avec “elles”. C’est à cela que nous avons pensé en réunissant des gens pour parler des femmes», indique Gouled Hassan du Contact interculturel francophone de Sudbury. Il explique que l'idée est de donner la parole aux femmes.

«Nous voulons entendre leurs perspectives sur des sujets qui nous touchent tous, parce que les sujets qui touchent la femme concernent toute la communauté. Et nous devons tous être responsables», dit-il. 

Gouled Hassan fait remarquer que chaque minorité ou groupe marginalisé a des défis. «C’est important que les femmes nous proposent des solutions aux problèmes qui les accablent, précise-t-il.

Il ajoute : «c’est à nous les hommes aussi de comprendre leur perspective et voir comment nous pouvons les appuyer et devenir leurs alliés».

Des avancées sont à noter

Suzanne Roy, l’une des panélistes du jour et membre du conseil d’administration du CIFS a montré qu’il y a eu une grande évolution depuis les années 1960 en ce qui est notamment de la perception de l’éducation de la femme. 

«C’était officiellement admis que les filles aillent à l'université, mais les perceptions familiales étaient tout autres», a-t-elle fait remarquer. 

«Je me rappelle, à la fin de mon cycle secondaire, mon père m'a dit : tu n'as pas besoin d'aller à l'université pour avoir des enfants, les élever et changer des couches», s’est-elle confiée au Voyageur. Elle n’a poursuivi  ses études supérieures que plus tard après son mariage.

Mme Roy n’a pas manqué de mentionner d’autres points positifs dont il faut être fier. 

«La femme a de plus en plus la place dans les affaires de la société, au niveau politique et culturel. Elle a aussi accès à l’emploi», selon elle.

La directrice générale du Centre Victoria pour femmes, Mireille Charlebois, se félicite aussi que certains sujets, autrefois tabous, sont abordés actuellement, et la femme y participe.

«Il aurait, par exemple, été difficile de parler du mouvement “Me Too” il y a vingt ou trente ans. Mais ça prend du temps, ça prend des générations. Le fait de répéter ces messages-là, ça a un impact, à long terme. Il faut y croire, il faut continuer d'avoir ce genre de discussions», indique Mme Charlebois. 

Il reste beaucoup à faire

Quelques réalisations sont à louer, mais le chemin est encore long pour le bienêtre global de la femme, affirme Myriam Bals, professeure agrégée à l’École de service social de l’Université Laurentienne.

«Je lisais hier le dernier rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (l'OCDE), qui montre que le Canada est toujours très loin derrière la France par rapport à l'écart de salaire entre homme et femme, mais aussi par rapport au niveau d'instruction pour les études supérieures», explique-t-elle.

La Dre Bals s’accorde avec les autres pour dire que par rapport aux années 1970, «où il y avait encore une certaine théocratie», note-t-elle, les Canadiens ont fait un grand pas, mais il ne faut pas s'asseoir et se dire : ça y est, on a ça, on ne fait pas d'effort. 

Pour la professeure, il y a aussi des mentalités à changer et qu’il faut se battre pour ses droits.

«Il faudrait toute une éducation à faire et que les gens soient beaucoup plus politisés par rapport à la notion de droits humains. On a la Charte canadienne qui garantit que les gens sont égaux. La charte est là, mais elle n’est pas appliquée. Puis les gens ne la revendiquent pas », déplore-t-elle.

Un autre problème auquel font face les femmes, c’est le manque de logements abordables. La question a été soulevée par la directrice générale du Centre Victoria pour femme.

«C'est un enjeu pour plusieurs femmes qui se voient obligées de quitter leurs partenaires quand ça ne va pas bien à la maison. Les listes d'attente pour un logement sont très longues ici à Sudbury», déclare Mireille Charlebois. 

«Des femmes attendent plusieurs années sans accéder à un logement abordable. Ce qui veut dire qu’elles sont soit logées de façon précaire, soit restent avec quelqu'un qui les maltraite, qui les abuse», dit-elle. 

Particulièrement, les femmes autochtones sans statut vivent une autre triste réalité.

«La communauté autochtone sans statut est effacée de façon administrative, on doit se glisser soit dans la communauté anglophone, soit dans la communauté francophone, se désole Sonia B. Inkster, pédagogue et femme autochtone sans statut.

Elle salue toutefois que des discussions pareilles soient amorcées. «C'est du nouveau et c'est beau», ajoute-t-elle. 

«Quand on se dit ça individuellement, on peut réseauter, développer une communauté de femmes pour et par les femmes», croit Mme Inkster.

 Des discussions très riches ont eu lieu, mais une question se pose : qu’est ce qui va suivre ? «La finalité, ce n'est pas d'avoir un rapport à la fin des discussions ni d'essayer d'avoir quelque chose de formel. Ce qu’on vise c'est la sensibilisation. C'est comment est-ce qu'on fait pour comprendre les réalités de l'autre», répond Gouled Hassan. 

«Quand on comprend les réalités de l'autre, on est capable de créer une communauté plus solidaire», conclut-il. 

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Photos

 

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BV : Les participant.e.s à la rencontre ont échangé avec franchise et sans tabous - Photo : Mehdi Mehenni 

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BV : Tout le monde s’accorde à dire qu’il reste beaucoup à faire - Photo : Mehdi Mehenni

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  • Date de création 15 avril, 2024
  • Dernière mise à jour 15 avril, 2024
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