Série « À la rencontre de nos Franco-Nunavois » : François Ouellette

François Ouellette a élu domicile le Nunavut il y a douze ans. L’homme originaire d’Edmundston, au Nouveau-Brunswick, est arrivé à Iqaluit en juillet 2008. Son plus marquant souvenir a été sa première visite au parc territorial Sylvia Grinnell. Face à la vallée riveraine, il s’est dit : « Voilà de quoi me remplir le cœur! »
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Maxime Beaudoin
Initiative de journalisme local – APF – Territoires

Pourquoi avoir choisi le Nunavut? M. Ouellette y répond rapidement : pour l’amour, l’aventure et l’argent, dans cet ordre de priorités décroissantes. « J’avais le goût de revivre une aventure comme lorsque je suis parti enseigner deux fois en Corée du Sud et surtout, découvrir cette partie exotique du Canada ; je voulais aussi payer mes prêts étudiants le plus rapidement possible », ajoute-t-il.

Le Néo-Brunswickois d’origine n’a pas hésité à s’impliquer auprès de la collectivité francophone depuis son arrivée dans l’Arctique. En effet, il a donné de son temps au sein des conseils d’administration de l’Association des francophones du Nunavut, du Centre de la petite-enfance Les Petits Nanooks, du théâtre Uiviit, du comité radio de CFRT et de la Iqaluit Humane Society.

Par ailleurs, il peut se vanter d’avoir eu deux expositions au musée Nunatta Sunakkutaangit : « Certains titres de mes dessins étaient consciemment choisis en français, et j’ai demandé spécifiquement que la description de l’exposition soit dans les trois langues, parce que je voulais vraiment qu’on voit cela comme une contribution franco-nunavutoise », explique-t-il.

L’artiste s’ennuie plus de sa famille, surtout pour son fils, que du sud comme tel. Il lui manque bien sûr les musées, les spectacles et les restaurants. Il avoue s’ennuyer davantage de la plage, de voyager entre les collectivités, de la forêt et surtout, de l’automne. M. Ouellette est lucide quant à son attachement à la capitale du Nunavut : « Je sais que si j’étais dans le Sud, je m’ennuierais de la petitesse d’Iqaluit, de son rythme calme, de mes amitiés, de la neige endurcie de l’hiver, des aurores boréales, et surtout, de la toundra. »

Quelles sont les caractéristiques d'un Franco-Nunavois selon lui? « Je pense que, vu que nous sommes en terre inuite, nous devrions utiliser le terme nunavummiuq et des nunavummiut, donc des franco-nunavummiut. » Un Franco-Nunavois, superficiellement, ça ne veut dire qu’un Nunavummiuq qui est de souche francophone, selon M. Ouellette. Dans l’esprit du terme, c’est quelqu’un qui n’est pas frileux, qui a les deux pieds sur terre, qui sait garder son calme, qui parle au moins l’inuktitut de base, qui a un lien rapproché avec la communauté inuite, s’il ne l’est pas lui-même, qui mange des mets inuits, qui contribue aux institutions de sa collectivité et qui y reste.

Fait à noter, on cuisine francophone dans la cuisine des Ouellette! Il cuisine le fameux fricot, un ragoût de poulet acadien, le ragoût de boulettes et la soupe aux pois font aussi le bonheur de leurs invités. M. Ouellette adore également la cuisine coréenne, faisant même son propre kimchi. Il essaie idéalement de métisser ses recettes en intégrant des aliments de la toundra et de la mer, surtout l’omble chevalier, le morse en plus du phoque. Un Stroganoff au phoque, c’est mamaqtuq [délicieux] !

Que dirait-il à un francophone pensant venir s'établir au Nunavut, mais qui hésite? Sa réponse est claire, nette et précise : « Ne viens pas! Je n’aime pas l’hésitation, quoique je la respecte. Dans toute aventure, il faut avancer avec les deux pieds et son cœur. Et je ne pense pas qu’on a besoin d’une petite séduction pour y arriver. La toundra et les collectivités inuites sont là pour celui ou celle qui veut les découvrir. En passant, Iqaluit et le Nunavut sont vastement différents, comme Montréal et un fond de rang gaspésien. » Quant à la francophonie au Nunavut, sa plus heureuse réflexion des dernières années a été de voir l'implication de la communauté africaine canadienne.

Pense-t-il passer le reste de sa vie au Nunavut? Il ne pense pas si loin quant à son avenir, mais il est indécis. Pour l’instant, oui. Ses liens à la toundra sont trop forts. Pour terminer, François Ouellette a une expression acadienne, sa patrie adoptive, plutôt drôle et tranchante à nous faire découvrir : « j’aime ta skirt, juste pas la way qu’a hang! » Cette expression signifie : « tu es peut-être bien habillé, mais elle ne te va pas bien ». De plus, il partage un adage de son père : « un coucher de soleil, c’est la preuve que la vie sera toujours belle ».

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Photos 1 et 2
Crédit : François Ouellette
Légende : François Ouellette habite à Iqaluit depuis plus de douze ans.

Photo 3
Crédit : François Ouellette
Légende : François Ouellette et son fils, Thorin, devant la pierre de leurs ancêtres.

  • Nombre de fichiers 4
  • Date de création 29 juin, 2020
  • Dernière mise à jour 29 juin, 2020
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