Sept immigrants francophones parlent de leur nouvelle vie

Ils viennent de France, de Belgique, de la Côte d’Ivoire, du Cameroun, de l’Algérie, du Maroc et de l’Île Maurice et ils vivent à l’Île-du-Prince-Édouard depuis 10 ans pour certains, et quelques mois pour d’autres.  Tous différents, leurs témoignages se recoupent pourtant en de nombreux points. 

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Jacinthe Laforest

IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne

 

 

 

La Coopérative d’intégration francophone a tenu le 7 octobre le tout premier forum «Opportunités ÎPÉ», à l’intention des nouveaux arrivants, des employeurs et de divers fournisseurs de service.

Une bonne partie de l’événement de quatre heures était consacrée au réseautage.  L’autre partie a consisté en un panel de sept invités, deux préenregistrés et cinq en présentiel, chacun racontant des bribes de son parcours en sol prince-édouardien.

Hiver, nourriture, logement et transport

«Je suis arrivée en 2013.  On était en octobre et il faisait déjà très froid», dit Marie-Paule Elomo, qui arrivait de la République dominicaine, pour étudier au Collège de l’Île (Collège de l’Acadie à l’époque).  Presque 10 ans plus tard, c’était au tour d’Oviado Albert Tchakounte Tchaptchet, du Cameroun, de venir étudier au Collège de l’Île.  «Pour être honnête, j’ai choisi ce collège à cause des frais de scolarité, qui étaient parmi les plus bas», dit le jeune homme.

Arriver dans un pays étranger avec un projet d’études ou un contrat de travail permet à l’immigrant de rester concentré sur son projet et de ne pas abandonner.  «Oui, j’ai eu envie de repartir, dit Alexia Riche, mais j’avais mes études, qui étaient la raison de ma présence ici.  J’étais seule, je ne connaissais personne.  J’ai trouvé cela tellement dur et finalement, j’ai commencé à m’impliquer.  J’ai fait beaucoup de bénévolat.  Grâce à cela, je connais un grand nombre de personnes dans la salle ce soir», dit la jeune femme, qui est aujourd’hui, directrice générale du « Community Sector Council ».

Ne pas abandonner

Ne pas abandonner est justement le conseil que Solange Aké donne aux nouveaux arrivants.  «Il faut rester concentré sur son rêve, sur le grand but qu’on s’est fixé en prenant cette décision de quitter notre pays.  Dès mon arrivée, j’ai voulu trouver des personnes qui avaient un parcours semblable au mien, c’est-à-dire des personnes qui avaient perdu leurs repères et qui s’en créaient de nouveaux.  Ça m’a beaucoup aidée», dit la jeune femme, maintenant cheffe d’une entreprise imaginée en pleine pandémie, appelée «Distinct Magic Évents».

La langue, un atout et une barrière

Chafia Bentchakal est arrivée d’Algérie il y a moins d’un an pour un emploi à la Commission scolaire de langue française.  «Moi, j’ai mon projet dans lequel je m’épanouis, mais mon mari lui, a voulu repartir.  Il ne trouvait pas d’emploi. Il était découragé.  Maintenant, ça va mieux», dit Chafia Bentchakal.

Elle témoigne qu’en plus du logement, du transport et tous les autres défis, la langue est déterminante.  «Moi, je travaille en français toute la journée.  Mon mari, pour se trouver un emploi, avait besoin de l’anglais.  Il craignait de ne pas y arriver.  Les deux aînés se sont bien intégrés, mais le plus jeune, que j’ai dû mettre dans une garderie anglophone, ne voulait pas y aller», raconte la jeune professionnelle.

Naoual Chadli, du Maroc, a elle aussi rencontré des défis pour elle et sa famille.  «On est arrivés trois jours avant Fiona l’an dernier.  Alors, ça a été brusque.»  Oui, dit-elle, sa famille a rencontré des défis, mais les bénéfices sont supérieurs aux défis à bien des égards.  «Aujourd’hui, je peux dire que la région Évangéline, c’est chez moi», dit l’étudiante en service à la personne au Collège de l’Île.

La langue a aussi été un défi pour Solange Aké, qui avait le souci de bien présenter ses idées et de bien comprendre la vision des clients.

Logement et transport, à nouveau

Marie André, de Belgique, habite à l’Île depuis 2020.  Elle travaille au CPE Les petits rayons de soleil à Rustico.  «Pour le logement, c’est difficile.  Ça fait trois ans que je suis là et j’ai déménagé trois fois.  L’autre choc pour moi a été la nourriture.  En Belgique, c’est plutôt santé et ici, c’est très transformé.  Mais sinon, cette aventure pour moi, c’est une occasion de grandir, de se dépasser», a-t-elle dit dans son message préenregistré.

Le logement a été une grande préoccupation pour Oviado Albert.  «Je faisais mes recherches d’un logement depuis le Cameroun.  Ça a été très long avant que je trouve une chambre sur Stratford.  J’ai envoyé un dépôt de 500 $ même en sachant que ça pouvait être une arnaque.  Par chance, ce n’était pas une arnaque.  Mais j’étais loin du campus.  J’ai beaucoup marché au cours des premiers mois, puis j’ai finalement compris le système d’autobus», dit le jeune homme, qui accorde également une grande importance au réseautage.  «Rencontrer des gens, être gentil avec tout le monde, faire du bénévolat, c’est comme ça qu’on finit par se faire un réseau».

Tous les membres du panel ont profité d’une manière ou d’une autre, et à différents moments, des programmes de la CIF, de la plus ancienne du panel, Marie-Paule Elomo, à la plus récente,  Chafia Bentchakal.

En dix ans, le portrait démographique de l’Île a beaucoup changé.  En 2013, Marie-Paule Élomo était parmi les premières étudiantes internationales au Collège de l’Île, au campus de Wellington, qui plus est.  «Je pensais que les gens me dévisageaient parce que j’étais Noire, je me sentais étrangère, j’ai eu envie de quitter et, finalement, j’ai fini par comprendre que mes perceptions me trompaient.  Je vis encore à Wellington et je m’y sens chez moi.»

 

 

 

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Photos

 

L’animatrice du panel, Julie Gagnon, avec les participants : Oviado Albert Tchakounte Tchaptchet, Chafia Bentchakal, Naoual Chadli, Alexia Riche et Marie Paule Élomo.  (Photo : J.L.)

 

Native du Cameroun, Marie Paule Élomo est arrivée à l’Î.-P.-É. en 2013, via la République dominicaine, pour suivre des cours au Collège de l’Île, alors appelé Collège de l’Acadie. (Photo : J.L.)

 

Oviado Albert Tchakounte Tchaptchet est arrivé du Cameroun il y a un peu plus d’un an, pour étudier au Collège de l’Île.  Chafia Bentchakal, d’Algérie, enseigne à l’École François-Buote depuis février 2023. (Photo : J.L.)

 

Naoual Chadli, du Maroc, vit dans la région Évangéline avec sa famille.  Elle poursuit ses études au Collège de l’Île.  Alexia Riche, native de l’Île Maurice, est venue à l’Île pour son projet d’études et est maintenant directrice générale du «Community Sector Network of PEI».  (Photo : J.L.)

 

 

 

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  • Date de création 17 octobre, 2023
  • Dernière mise à jour 17 octobre, 2023
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