Réduire les vibrations tout en faisant des vagues

Après avoir passé 10 ans sur le vieux Rocher, Javad Abedini sait à quel point le vent et les vagues terre-neuviens peuvent être puissants. Face à la crise climatique, le candidat au doctorat en génie mécanique à l'Université Memorial (MUNL) développe des technologies plus efficaces pour mieux exploiter leurs énergies.
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Cody Broderick
IJL - Réseau.Presse - Le Gaboteur

«La crise énergétique mondiale a accéléré l’installation d’énergies renouvelables. Avec cette accélération, dans les dix prochaines années, notre utilisation de ces énergies renouvelables sera du double de ce qu’elle est aujourd’hui,» évalue Javad Abedini, chercheur et professeur en génie mécanique, et coach en technologie au sein de l’université.

L'industrie des énergies renouvelables étant en plein essor à Terre-Neuve-et-Labrador, le chercheur développe de meilleures technologies pour que les machines nécessaires puissent mieux fonctionner.

Tête de toute une équipe, l’ingénieur travaille plus précisément sur les vibrations des trains épicycloïdaux - dispositifs de transmission mécanique avec des engrenages qui se trouvent dans ces turbines. «Dans la définition technique, une vibration est un mouvement cyclique continu d’une structure ou d’une composante autour de son état d’équilibre,» explique-t-il.

Ces mêmes technologies se trouvent dans les automobiles et hélicoptères par exemple, mais c’est l'énergie verte qui l'intéresse le plus. «C’est notre futur et le plus rapidement nous investirons dans l’énergie propre, plus heureuse sera la prochaine génération,» le chercheur, originaire de Téhéran, ville capitale de l’Iran.

S'il espère contribuer à l'exploitation de toute sorte d’énergie renouvelable avec son projet, l'ingénieur se concentre actuellement sur les turbines marémotrices. «L’énergie marémotrice est propre, renouvelable, durable, mais encore plus importante, c’est une ressource prédictible qui est sous-utilisée et qui est une belle occasion pour combler les besoins énergétiques grandissant maintenant et dans le futur.»

Participant au programme Lab2Market à l'Université de Dalhousie, lui et son équipe se préparent à commercialiser leur idée.

Du laboratoire…

Turbines marémotrices, éoliennes, les automobiles et les hélicoptères… tous les mécanismes qui se trouvent dans ces machines provoquent des vibrations dans le système. «Presque tout vibre et il est très important pour un ingénieur en mécanique d'apprendre à analyser les vibrations,» nous affirme le chercheur.

Ces vibrations sont liées à la rigidité dans l'interaction entre les dents des engrenages. «Parfois, ça peut détruire un appareil, comme les boîtes de vitesses des éoliennes, qui sont une partie critique du système,» explique-t-il. «J’analyse ce phénomène pour prédire et éviter les ratés.»

Exposées à l'imprévisible Dame Nature, les forces du vent et des marées peuvent avoir un impact sur ces machines et leurs vibrations. À Terre-Neuve-et-Labrador, le temps peut être surtout difficile à prévoir. Ces éléments peuvent interférer avec les systèmes et, aussi imprévisibles que puissent être les vents et les vagues, ces interférences peuvent se produire de manière totalement aléatoire.

Javad Abedini prend tout en considération. «Dans mon cas, j'ai travaillé sur des questions très difficiles où les choses ne sont pas linéaires,» précise-t-il.

«En ingénierie, quelqu'un peut supposer que la vitesse du vent est constante et résoudre une question très difficile en se basant sur cette hypothèse. C'est tout à fait autorisé. Cependant, un autre ingénieur peut vouloir obtenir une réponse encore plus précise en ne considérant pas la vitesse du vent comme constante et en tenant compte du fait que la vitesse du vent peut fluctuer.»

«Dans mes études, explique-t-il, je n'ai pas considéré une rigidité constante pour l'interaction entre les dents de l'engrenage et j'ai utilisé un modèle plus réaliste où la rigidité peut changer,» affirme-t-il.

Malgré les défis, tels que «les équations mathématiques compliquées» et les «solution[s] approximative[s]» présentées par ses programmes informatiques, le chercheur poursuit ses objectifs entre mer et marais.

…au marché

Chercheurs qui deviennent entrepreneurs, Javad Abedini et son équipe participent actuellement dans le programme Lab2Market, une initiative nationale lancée par l'Université Dalhousie il y a trois ans qui aide les chercheurs à commercialiser leurs idées.

«Mon projet sert à améliorer les performances des turbines marémotrices sans coût d’extra significatif,» explique-t-il.

L'ingénieur illustre le potentiel de son projet: «Au Canada, 6-8% de l’électricité provient de l’énergie éolienne. C'est assez pour offrir de l’électricité pour 3,3-3,6 millions de maisons,» précise-t-il. «Selon une étude de Offshore Energy Research Association of Nova Scotia, en 2040, l’industrie de l’énergie marémotrice pourrait contribuer jusqu’à 1,7 milliard de dollars au produit intérieur brut de la Nouvelle-Écosse, créer jusqu’à 22 000 emplois à temps plein et générer 815 millions de dollars en revenu de travail.»

Fin février dernier, le gouvernement provincial a dévoilé un nouveau cadre fiscal pour l'énergie éolienne et l'hydrogène, poursuivant ses efforts pour développer l'industrie d’énergie renouvelable. «C’est une bonne nouvelle, mais je sais qu’il y a des préoccupations à ce sujet.»

Optimiste, il a déjà rencontré le ministre provincial de l'Industrie, de l'Énergie et de la Technologie, Andrew Parsons pour parler de son projet. «Je l'ai trouvé très déterminé à propos du projet,» confie le chercheur.

Si les clients cibles de l’ingénieur sont les gouvernements fédéral et provincial, il souhaite que sa province d’adoption profite le plus de son projet.

«Ça peut sembler cliché, mais j’aimerais vraiment que mon travail soit bénéfique pour, premièrement, les amis terre-neuviens puis nationalement pour tous les Canadiens et finalement internationalement à travers le globe,» conclut-il. «Le mouvement de l’énergie propre est une de mes passions et Terre-Neuve a un potentiel impressionnant.»

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BOÎTE
Javad Abedini: ingénieur, polyglotte et photographe

«Arrivée à Terre-Neuve-et-Labrador en tant qu'étudiant international en 2013, j'ai toujours eu un faible pour les groupes minoritaires [...] et j'ai toujours essayé de promouvoir la sensibilisation et de les aider à obtenir l'exposition qu'ils méritent,» nous confie Javad Abedini dans un courriel.

Le polyglotte parle le français, anglais, persan, arabe et portugais. «Cependant, pas tous au même niveau,» explique-t-il modestement. En plus de langues, l’ingénieur s’intéresse à la photographie et à la randonnée dans ses heures perdues.

Si sa mère est linguiste et enseigne l’anglais en Iran, Javad s’intéresse aux nouvelles langues depuis longtemps. «Pour moi, apprendre des langues, c'est comme apprendre de nouvelles façons de penser.»

Il ajoute: «Ici, je travaille parfois à temps partiel pour le tribunal des affaires familiales, où je traduis pour des clients dont la langue maternelle n'est pas très répandue à Terre-Neuve-et-Labrador, comme le dari [ou] le pachtou.»

«Mon intérêt pour l’apprentissage du français a commencé il y a plusieurs années quand j’ai lu Le Petit Prince d’Antoine de St-Exupéry,» explique l’ingénieur. En vue d'un séjour étudiant au Brésil, le voyageur a consacré son temps à la langue portugaise, mais c’est à Terre-Neuve où il a retrouvé sa motivation pour approfondir son français.

«Quand je suis arrivé à Terre-Neuve, lors de l’exploration de cette belle province, j’ai fait beaucoup de randonnées et j’ai rencontré beaucoup de francophones sur les différents sentiers. C’est à ce moment que j’ai pris la ferme décision d’apprendre le français afin de communiquer avec eux.»

Il a ensuite commencé à suivre un cours de français à l'université et a même commencé à tisser des liens avec d'autres personnes dans la ville qui parlent français. «Plus tard, je suis tombé sur le Compas et j’ai rejoint leurs cafés-rencontres. Ça m’a beaucoup aidé,» ajoute-t-il.

«Je dois dire que je suis débutant en français et qu’il me reste encore beaucoup à apprendre,» dit-il humblement, mais dans un français très compréhensible.

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Titre : Javad-portrait
Crédit : Courtoisie
Légende : En plus de langues, l’ingénieur s’intéresse à la photographie et aux randonnées dans ses heures perdues.

Titre : Javad-equipe
Crédit : Courtoisie
Légende : Javad et ses collègues célèbrent une de ses réalisations au Centre pour l'innovation dans l'enseignement et l'apprentissage (Centre for Innovation in Teaching and Learning) de l'université.

Titre : Javad-machines
Crédit : Courtoisie
Légende : Javad et son équipe font partie des 35 groupes qui participent au programme Lab2Market de cette année à l'Université Dalhousie. Sur les 21 universités canadiennes représentées dans le programme, six, dont l’Université Memorial, sont situées dans le Canada atlantique.

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  • Date de création 31 mars, 2023
  • Dernière mise à jour 31 mars, 2023
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