Premier voyage au pays des flocons pour de nouveaux arrivants

Des cristaux qui dévalent doucement du ciel et restent en suspension un moment avant de s’écraser au sol. Un tapis blanc qui s’étend bientôt sur la chaussée, en silence. Des villes autrefois bétonnées se transformant peu à peu en forteresses givrées. Cette première neige, dans toute sa splendeur, suscite à la fois l’appréhension et l’émerveillement des nouveaux arrivants installés depuis peu en Alberta. Certains d'entre eux ont accepté de partager leur récit avec la rédaction.

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Gabrielle Audet-Michaud

IJL-RÉSEAU.PRESSE-LE FRANCO

Parmi eux, Elie Ewodo Gouedjoue qui a quitté son Cameroun natal, il y a à peine quelques mois, pour poser ses valises à Edmonton. Il évoque cet émoi qu’il a vécu à l’idée de découvrir le blanc manteau des hivers canadiens à son arrivée au pays. «Nous qui venons d’un continent où il n’y a presque pas de neige, nous sommes toujours excités à l’idée d’en apercevoir et il y a beaucoup d’anticipation par rapport à ça quand on arrive au Canada», se livre-t-il.

Heureusement pour cet ingénieur spécialisé dans le traitement des déchets, la première bordée de neige n’a pas tardé à recouvrir le nord de la province, cet automne. «Un matin, il a neigé, comme ça. J’étais très content en me réveillant, mon fils aussi. C’était le 23 octobre, je m’en souviens parce que j’avais rendez-vous à Accès Emploi», partage-t-il avant de laisser poindre un silence.

Ce matin-là, l’euphorie a cependant été interrompue par la réalité glaciale lorsqu'il s'est aventuré à l’extérieur de son appartement à six heures du matin pour ne pas manquer son rendez-vous, précise-t-il. «Je voulais m’habituer aux transports en commun en prenant le bus, mais ça a été une vraie aventure.»

Une fois arrivé à son arrêt, frigorifié, Elie a rapidement réalisé que ses orteils et ses doigts étaient saisis par le froid et que les habits qu’il avait prévus pour la neige étaient inadaptés au climat de l’Alberta. «Le pire, c'est qu’il y avait un jeune homme près de moi qui était en sweatshirt, bien tranquille, comme si de rien n’était. Moi, j’avais tellement froid, même dans le bus, que j’ai dépassé ma destination.»

Un froid plus mordant qu’anticipé 

Avec amusement, Elie confesse s’être préparé sommairement à l’arrivée de l’hiver, pensant que les températures seraient similaires à celles de Dschang, la ville la plus froide du Cameroun, où il a fait ses études. Une prise de conscience l’a cependant rapidement rattrapé. «Je me disais que je n’aurais aucune difficulté au Canada, que je pourrais porter les mêmes vêtements qu’au Cameroun… Ça ne me faisait pas peur. Mais il y a froid et froid et clairement, je n’étais pas prêt à affronter le niveau qu’il y a ici», mentionne-t-il.

Le lendemain de son choc thermique, décidé à ne pas subir à nouveau le froid mordant, Elie est néanmoins allé acheter des vêtements d’hiver de «style canadien». «Il n’y a que les bottes de neige que je n’ai pas encore achetées parce qu’il n’a pas neigé de tout novembre», conclut-il.

Evelyne Assadou, une Ivoirienne établie à Calgary depuis quelques mois, partage une expérience similaire. Le matin de sa première neige, en octobre, elle est sortie, elle aussi, avec enthousiasme pour savourer la magie des flocons. «Je n’étais pas certaine au début que c’était vraiment de la neige, mais quand ça a commencé à s’accumuler au sol, j’étais très contente. En plus, c’était le jour de mon anniversaire», avance-t-elle.

Après quelques minutes passées à l’air libre, la réalité l’a cependant happée de plein fouet. «Je n’étais pas préparée. Je ne savais pas qu’il fallait qu’on se protège les oreilles, le cou, les doigts, la tête. C’est beaucoup plus froid que ce que je m'imaginais», explique-t-elle avec humour.

Heureusement, les températures clémentes de novembre lui ont offert un certain répit qu’elle ne tient toutefois pas pour acquis. «Ma fille de trois ans a adoré jouer dans la neige, elle a même hâte qu’il y ait plus de neige. Moi, je me parle tous les jours et je me dis : “tu peux te réveiller demain et qu’il fasse moins trente ou moins quarante, alors profite du soleil”.»

Un hiver qui s'est fait attendre

Carine Guedioura, qui habite en sol canadien depuis avril 2023, a été surprise par les douceurs inattendues du dernier trimestre de l'année. Cette mère de famille d’origine algérienne s’était bien préparée à l’arrivée de l’hiver en s'imaginant qu’une première tempête balayerait la province albertaine dès septembre. «On pensait qu’il allait faire beaucoup plus froid, on se préparait à un froid glacial, à des montagnes et des montagnes de neige. On a même acheté des manteaux et des bottes pour les températures extrêmes», résume-t-elle.

Mais comme les chutes de neige ont été plutôt rarissimes en octobre et novembre en Alberta, cet équipement d’hiver est resté soigneusement rangé. Malgré tout, Carine a vécu sa première rencontre avec les flocons quelque part en octobre, un moment qu'elle décrit comme étant «irréel». «Je suivais un cours en ligne pour apprendre l’anglais quand c’est arrivé. Je me suis excusée et je suis sortie pour apprécier le moment. C’était magnifique. Mes enfants jouaient dans la neige et ils étaient émerveillés», relate-t-elle.

La petite famille s’attend à ce que l’hiver s’installe de manière plus rigoureuse, ce qu’ils perçoivent positivement puisqu’ils pourront «enfin» découvrir les sports d’hiver. Ils espèrent s’initier au ski et au patin à glace dans les mois à venir. «On a tellement eu du temps doux depuis notre arrivée au pays que là on est prêts à avoir froid», exprime la mère de famille. Et le froid tant attendu est bien là en ce mois de janvier...

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  • Date de création 18 janvier, 2024
  • Dernière mise à jour 18 janvier, 2024
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