Partager l’attente des isolés

Il y a un peu plus d’un an, naissait au sein de la paroisse Sacré-Cœur à Orléans, le Service d’accompagnement spirituel des personnes malades ou âgées à domicile (SASMAD). Une initiative, qui, au-delà de la religion, suit évidemment les paroles de Saint-Mathieu : «J’étais malade et vous m’avez visité.»

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André Magny
IJL – Réseau.Presse – L’Orléanais

Gilles Côté est grand-père. Il croit aussi en Dieu. Et en l’humain. C’est un homme engagé au sein de sa paroisse. En 2014, avec d’autres personnes, au sein de Sacré-Cœur d’Orléans, un petit groupe s’est formé, non seulement pour prier pour les personnes malades, mais aussi pour trouver des moyens de faire en sorte qu’elles ne soient pas oubliées. Puis, en 2020, c’est la découverte de SASMAD-Montréal et de ses 400 bénévoles. Gilles Côté explique qu’à partir de ce moment, ce fut le point de départ «pour mettre sur pied un service semblable à Orléans.»

Des contacts furent établis et une formatrice, Christiane Lemaire, de l’organisme montréalais est venue à Orléans pour partager son savoir. Par la suite, après vérification des antécédents judiciaires, une cinquantaine de bénévoles ont suivi les 21 heures de formation pour faire partie de SASMAD-Ottawa-Cornwall. Les hôpitaux et les centres de soins de longue durée comme la Résidence St-Louis bénéficient de leur écoute.

Au-delà des croyances

En entrevue, Gilles Côté est très clair : SASMAD n’est pas là pour endoctriner qui que ce soit, mais bien plus pour écouter. Comme le mentionne le site de la paroisse Sacré-Cœur, «l’accompagnement spirituel n’est pas un service de thérapie, ni de psychothérapie, de coaching de vie, ni d’enseignement catéchétique», mais repose essentiellement sur l’acte gratuit d’amour qui est d’écouter l’autre.

Il y a d’abord une rencontre avec le ou la bénéficiaire qui fait une demande – ou quelqu’un de son entourage – pour avoir accès à SASMAD, puis un maillage est fait entre la personne bénévole et la personne qui demande à être écoutée.

Gilles Côté est également très conscient que les bénévoles doivent être encadrés, car il s’agit d’une démarche souvent émotive auprès d’un patient malade. «On les rencontre aux deux mois pour les ressourcer, mentionne M. Côté. Ils ont besoin de dire comment ils se sentent dans telle ou telle situation.»

Être écouté

Qu’on soit davantage religieux comme l’était le poète français Charles Péguy quand il écrivait «la mort n’est rien, je suis simplement dans la pièce d’à côté» ou encore plus existentialiste comme Albert Camus, qui voyait dans la mort l’expression de l’absurdité de la vie, ce que les personnes en fin de vie semblent vouloir avant tout, c’est d’être entendues.

Antoine (prénom fictif pour respecter l’anonymat) reçoit depuis mars 2021 les services d'un accompagnateur SASMAD. Il a eu recours à l’organisme orléanais parce qu’il se sentait «seul et sans ressource. J’étais gêné de partager mes problèmes personnels avec les autres», confie-t-il. Avouant que la spiritualité est nouvelle dans sa vie, ce qu’il apprécie par-dessus tout, c’est de sentir «que tout le temps qu’il me donne m’est complètement dédié et m’est complètement donné.»

De plus, le fait que les services de SASMAD soient aussi donnés en français est rassurant. Pendant la visite d’un bénévole comme l’affirme Antoine, «il y a plusieurs émotions et s’il faut les chercher ou s’assurer de leur donner la bonne signification, ça ralentit le processus et amoindrit la qualité du service.»

À cet égard, Gilles Côté tient à préciser que SASMAD tente toujours de faire le meilleur jumelage possible lors des demandes d’accompagnement. «Nous avons reçu des demandes de personnes anglophones et nous avons acquiescé à ces demandes quand nous le pouvions. Une autre demande a été faite pour une dame âgée originaire de la République dominicaine. Nous avons trouvé une bénévole qui possédait assez d'espagnol pour communiquer avec elle. Nous avons aussi deux autres bénévoles qui s'entretiennent avec leurs bénéficiaires en lingala.»

Être accompagnante

Diplômée de l’Université d’Ottawa en développement international, à 30 ans, Sandra Gnou a senti le besoin de s’engager dans cet accompagnement spirituel. Elle a remarqué «qu’avec la COVID, demander de l’aide, ce n’était pas facile.» Elle a donc suivi la formation du SASMAD et, depuis un an, elle a accompagné deux personnes.

Si la seconde est toujours vivante et reçoit des soins de longue durée, la première, une femme, a reçu la visite de Mme Ganou pendant les six derniers mois de sa vie. «Lors des premières rencontres, se souvient Sandra, le silence était souvent présent. Puis, elle me demandait d’où je venais, me parlait de mes cheveux. Finalement, elle m’a avoué que j’étais la seule personne qui venait la visiter. C’était vraiment mon amie.»

Et le danger de trop s’attacher n’est-il pas là? Sans le nier, Sandra Ganou avoue qu’il faut apprendre à aimer avec détachement. C’est d’ailleurs l’une des leçons qu’elle retient de sa formation avec SASMAD. Tout comme Gilles Côté, elle mentionne que si elle est libre de parler de sa spiritualité, ce service d’accompagnement ne met pas l’objectif là-dessus. «C’est vraiment écouter qui est essentiel. Et de partager l’amour dans la simplicité.»

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Bas de vignette : Gilles Côté, le directeur du Service d’accompagnement spirituel des personnes malades ou âgées à domicile (SASMAD Ottawa-Cornwall). Crédits : SASMAD Ottawa-Cornwall

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  • Date de création 15 août, 2022
  • Dernière mise à jour 15 août, 2022
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