Ottawa enveloppée d’une épaisse fumée
Par Antoine Trépanier, Le Droit et Émilie Gougeon-Pelletier, Le Droit|6 juin 2023
Si les masques N95 sont de retour dans la capitale fédérale, ce n’est pas à cause d’une recrudescence de la COVID-19, mais bien en raison de la fumée causée par les incendies de forêt au Québec. Le smog est tel que Santé Canada recommande maintenant le port de ce couvre-visage pour certaines personnes.
Steven MacKinnon n’en croyait pas ses yeux lorsqu’il est arrivé au Parlement, mardi matin. Le ciel orange, l’odeur de fumée et la difficulté à respirer l’ont surpris et même préoccupé.
«Je souffre d’asthme, évidemment, les particules dans l’air, ça affecte», confiait le député de Gatineau et whip en chef du gouvernement Trudeau.
Dans l’édifice de l’ouest, où siègent les députés canadiens, l’odeur de la fumée gagnait tranquillement les couloirs.
«Je n’ai jamais vu ça dans ma vie, c’est incroyable», a lancé le leader du gouvernement à la Chambre des communes, Mark Holland.
Retour du port du masque
À l’instar de ses collègues du cabinet, le ministre Holland a constaté le retour du port du masque dans la capitale.
Et pour cause, Santé Canada recommande d’ailleurs le port du masque N95 pour les personnes particulièrement à risque comme les enfants, les femmes enceintes, les personnes âgées et les personnes avec des maladies pulmonaires et cardiaques. Le ministre de la Protection civile Bill Blair a d’ailleurs dit qu’il s’entretiendrait avec des représentants de Santé Canada à ce sujet.
«C’est une des recommandations qu’on fait comme fermer les fenêtres, ça fait partie d’une liste de vérification. On le recommande parce que c’est une bonne mesure et une bonne pratique», explique le biologiste au département de la qualité de l’eau et de l’air de Santé Canada, Francis Lavoie.
Rarement a-t-on vu une cote de 10+, le plus haut niveau enregistré, dans la région de la capitale fédérale.
Normalement, dans la région d’Ottawa, c’est de 2 ou 3. La qualité de l’air est de manière générale bonne.
— Francis Lavoie
Selon M. Lavoie, il est recommandé pour certaines personnes de rester à l’intérieur, puisque la fumée se retrouve à l’extérieur. N’empêche, l’odeur dans les corridors de l’édifice de l’Ouest et dans des édifices gouvernementaux, tout comme les résidences d’ailleurs, est bien réelle.
«C’est sûr que la majorité de notre exposition est à l’extérieur parce que c’est là que la fumée se trouve, mais effectivement, si on ouvre les fenêtres et les portes, ça peut rentrer à l’intérieur», dit-il.
La Chambre des communes «sécuritaire»
Au Parlement, Steven MacKinnon s’est dit préoccupé par la qualité de l’air au Parlement et dans les édifices gouvernementaux.
«Il y a des normes à étudier du côté de la ventilation et de la filtration de l’air pour voir ce qu’on peut faire pour améliorer la qualité des milieux de travail», a-t-il dit.
Un peu plus loin, son collègue Mark Holland abondait dans le même sens. Ce dernier disait vouloir parler avec l’administration de la Chambre des communes pour s’assurer que la qualité de l’air à l’intérieur de l’édifice est acceptable dans les circonstances.
«C’est vraiment la première fois dans ma vie que je prends le temps de penser à ce sujet-là», a-t-il reconnu.
Dans une déclaration écrite au Droit, la directrice des communications du président de la Chambre soutient que «les édifices de la Cité parlementaire sont sécuritaires, notamment en ce qui concerne la qualité de l’air».
«En ce qui a trait à la qualité de l’air en lien avec les feux de forêt, des ajustements au niveau d’admission d’air frais ont été faits et continueront d’être surveillés pour le confort et la sécurité des occupants», explique Amélie Crosson.
Selon elle, les odeurs de fumée dans l’Édifice de l’ouest et dans d’autres bâtiments de la cité parlementaire «pourraient quand même être présentes».
Le bureau de la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement Helena Jaczek a pour sa part affirmé que le ministère «surveille de près les avis sur la qualité de l’air à travers le pays et toute incidence possible que cela pourrait avoir sur la qualité de l’air à l’intérieur des immeubles».
Le maire d’Ottawa «très préoccupé»
Le maire de la Ville d’Ottawa Mark Sutcliffe a indiqué être «très préoccupé par ces conditions», dans une déclaration envoyée au Droit par texto, mardi.
«Je compatis avec ceux qui ont une capacité pulmonaire réduite et de l’asthme, et qui pourraient avoir des difficultés aujourd’hui», a-t-il écrit.
Mark Sutcliffe se dit «convaincu que les responsables de la santé publique prennent les décisions nécessaires pour protéger les résidents vulnérables».
La Ville d’Ottawa a annulé, mardi, tous ses programmes récréatifs et les ligues en plein air, a fait savoir la directrice du Service de sécurité publique, Beth Gooding. Elle ajoute que le smog n’a pour le moment «aucune autre répercussion sur les services».
La Ville s’attend d’ailleurs à ce que la qualité de l’air continue d’avoir des répercussions sur ces services mercredi.
Le chef du Service des incendies d’Ottawa (SIO), Paul Hutt, a expliqué au Droit que «les feux incontrôlés représentent un risque élevé pour Ottawa», et que «comme les feux incontrôlés sont de plus en plus fréquents et extrêmes au Canada, le SIO a effectué un travail de planification poussé et se tient prêt à intervenir lors de tout incident pouvant survenir dans la ville».
Le SIO dispose de cinq unités spécialisées en intervention forestière situées stratégiquement dans la ville.
Santé publique Ottawa insiste que la population devrait prendre au sérieux les recommandations de Santé Canada et d’Environnement et Changements climatiques Canada.
Des centaines de feux
En date du 5 juin, 417 feux étaient au Canada, dont trois nouveaux qui ont été déclarés lundi, selon le centre interservices des feux de forêt du Canada.
Plus de la moitié des incendies actifs sont considérés comme «hors contrôle»
Au total, 2275 feux ont été déclarés depuis le début de l’année 2023. Cela représente 3,7 millions d’hectares brûlés.
- Nombre de fichiers 1
- Date de création 6 juin, 2023
- Dernière mise à jour 6 juin, 2023