Opération séduction envers les médecins dans l’Est ontarien

En pleine pénurie de médecins, les comtés unis de Stormont, Dundas et Glengarry (SDG) amorcent une restructuration de leur offre de soins de santé offerts sur leur territoire. Avec des ressources limitées, les centres de santé misent désormais sur le partage des effectifs entre eux afin que la population ait accès au plus grand éventail de soins de santé.

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Charles Fontaine

IJL – Réseau.Presse – Le Droit

La région de santé du Grand Fleuve, qui comprend la ville de Cornwall, les comtés unis de SDG, Akwesasne, une partie du canton de Russell ainsi que du sud-est rural d’Ottawa, fait face à une pénurie de 16 médecins de famille. C’est ce que révélait un sondage mené en 2022 par l’Équipe Santé Ontario (ESO) du Grand Fleuve.

Des 130 000 habitants de la région, 20 000 se trouvent sans médecin. En raison des retraites survenues dans la dernière année et celles qui se pointent à l’horizon, l’objectif de l’ESO du Grand-Fleuve est d’engager entre 25 et 30 nouveaux médecins, souligne sa responsable clinique, Marilyn Crabtree.

Afin de tenter d’attirer des médecins dans leur région, la municipalité de Russell et les Comtés unis de SDG offrent des subventions de 5000 $ aux médecins qui viennent s’installer dans leur région pour y travailler.

La campagne Date My County tente de «réparer le cœur brisé» des municipalités rurales en déficit de médecins. Les Comtés de SDG offrent cinq subventions aux nouveaux médecins attirés dans la région. De son côté, la municipalité de Russell convoite un médecin.

«Ce n’est pas un gros prix à payer pour combler un besoin essentiel», dit le maire de Russell, Pierre Leroux.

Ce chèque ne va pas convaincre quelqu’un de déménager dans la région, reconnaît Mme Crabtree.

«C’est simplement pour donner une visibilité à la région.»

«Burnout»

Marilyn Crabtree a été médecin de famille en chef au village de Morrisburg pendant près de 30 ans. Elle a quitté la vie clinique par pur épuisement professionnel.

«J’étais une victime du système brisé, comme tout le monde qui travaille encore dedans», dit-elle.

En raison de la charge de travail trop élevée, les employés se «noient», ajoute-t-elle.

«Parce qu’il n’y a pas assez d’effectifs, ils travaillent plus fort, ils sont épuisés, donc ils quittent leur emploi et nous manquons d’employés à nouveau, explique-t-elle. C’est une roue qui tourne. Le problème se nourrit lui-même et les gens partent.»

En 2020, elle s’est donc jointe à l’ESO du Grand-Fleuve, qui travaille à transformer les services de santé afin de mieux desservir la population.

«J’en avais assez d’essayer de régler le système un employé à la fois à la clinique, donc j’essaie de régler le système lui-même.»

L’ESO du Grand-Fleuve comprend Seaway Valley Community Health Centre, Centre de santé communautaire de l’Estrie, Glengarry Nurse Practitioner Led Clinic et Rideau St. Lawrence Family Health Team. Auparavant, ces quatre centres de santé travaillaient en silo, mentionne Marilyn Crabtree. Son équipe et elle misent maintenant sur un partage des ressources à travers les organisations afin que les patients puissent profiter du plus grand nombre de soins, peu importe où ils habitent.

«Maintenant, même si le médecin n’a pas de diététicienne ou de travailleur social à sa clinique par exemple, le patient peut y avoir accès avec une autre clinique», renchérit la responsable chez l’ESO Grand-Fleuve.

«Les centres de santé doivent donner un peu de ressources pour que tous y aient accès, ce qui est très difficile à négocier.»

Financement provincial

Afin d’agrandir les ressources en santé de cette région, l’ESO du Grand-Fleuve a reçu un fonds de quatre millions de dollars du gouvernement de l’Ontario en février. Malgré les neuf millions demandés, les centres de santé étaient soulagés de recevoir cette aide.

«Cette subvention est critique, dit Mme Crabtree. On a besoin davantage de fonds, mais c’est un bon avancement.»

Les postes de médecin de famille ouverts sont dans des centres de santé, plutôt qu’en clinique privée, où les employés ont plus de tâches connexes.

«Les emplois dans les centres de santé sont très convoités, donc je crois pouvoir remplir ces postes en quelques mois», évoque la responsable.

Particularité du milieu rural

Bien que la plupart des gens préfèrent vivre en ville, Marilyn Crabtree confirme que les Comtés unis de SDG n’ont pas de difficulté à attirer des médecins, puisque l’accès à Ottawa est plus facile.

Le canton de Russell, en revanche, peine à attirer des médecins, puisqu’ils travaillent en clinique et non dans des centres de santé.

«Avec le partage des ressources, ça va alléger la tâche des médecins dans le canton», mentionne M. Crabtree.

«Les nouveaux médecins sont plus attirés envers un environnement qui fournit de bonnes conditions de travail, poursuit-elle. La médecine n’a pas évolué au rythme de la société. Si tu prends un congé de maternité, tu n’es pas assuré d’être couvert et tes 1000 patients n’auront plus de médecin. Ça freine des personnes à faire ce métier. Ce modèle qui rassemble les équipes de santé pourra améliorer les conditions de travail.»

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Photos

Les comtés unis de Stormont, Dundas et Glengarry et le canton de Russell offre 5000 $ à des nouveaux médecins qui s'amènent dans leur région. (123rf)

L'ancienne médecin de famille Marilyn Crabtree a quitté sa clinique pour tenter d'améliorer le système de santé dans la région à l'ESO du Grand-Fleuve. (Marilyn Crabtree)

«Les nouveaux médecins sont plus attirés envers un environnement qui fournit de bonnes conditions de travail», confirme l'ancienne médecin de famille Marilyn Crabtree. (123rf)

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  • Date de création 1 mars, 2024
  • Dernière mise à jour 1 mars, 2024
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