L’Ontario veut mettre fin aux tragédies liées aux buts de soccer

Par Émilie Gougeon-Pelletier, IJL - Réseau.Presse - Le Droit|25 juillet 2023

Ses amis devaient le rejoindre au terrain de soccer pour une sortie au cinéma. En attendant, Garrett Mills s’est dit qu’il ferait un exercice de chin-up sur la barre transversale du but de soccer. Ce simple mouvement allait lui être fatal.

«Croyez-le ou non», dit David Mills, mais le but de soccer de 200 à 300 livres qui a fracassé le crâne de son fils en 2017 était le seul en ville qui n’était pas fixé au sol au moment de la tragédie.

Les buts de soccer, souvent en métal, peuvent peser quelques centaines de livres et sont susceptibles de se renverser.

Quand David Mills a répondu à l’appel du policier qui lui demandait de se rendre à l’hôpital, sa famille s’apprêtait à se rendre à une levée de fonds pour la sensibilisation des lésions cérébrales.

Aux urgences, il priait pour que son fils âgé de 15 ans n’ait pas souffert de dommages au cerveau. «Nous pourrions nous adapter s’il est paralysé», se disait-il.

Mais jamais David Mills n’avait imaginé que son fils était sans vie, dans la pièce d’à côté.

«Nous nous sommes assis avec le corps de Garrett pendant un certain temps avant de lui dire au revoir, chacun à notre manière. Je lui ai donné un dernier baiser sur la joue, puis nous sommes rentrés chez nous et nous nous sommes assis en silence dans le salon, essayant de comprendre ce qui s’était passé.»

Le legs de Garrett

Quatre jours avant sa mort, le fils de David Mills lui avait dit que quand il allait partir, il aimerait laisser un legs.

Depuis son décès, les gouvernements ontariens se succèdent et tardent à imposer des exigences relatives aux buts de soccer mobiles en province.

Mais le député progressiste-conservateur Ric Bresee s’est donné comme mission de mettre fin aux tergiversations.

Ce député de Hastings-Lennox-Addington, voisin de la famille Mills, s’était dit troublé par la nouvelle du décès du jeune garçon, en 2017, alors qu’il était maire du canton de Loyalist.

La même année, Ric Bresee a lui-même perdu un enfant, des suites d’une maladie.

Ces deux pères de famille étaient liés par le deuil. «J’ai été contacté par Dave Mills pour exprimer sa sympathie, pour tendre une main, une oreille, une voix pour m’aider à travers mon processus de deuil. Disons simplement qu’aucun parent ne devrait avoir à enterrer un enfant.»

Ric Bresee a déposé en avril dernier le projet de loi 99, surnommé la Loi de 2023 sur le legs de Garrett.

Ce document législatif est la quatrième version du projet de loi qui a été introduit depuis la mort de l’adolescent. Il est le seul à avoir franchi l’étape de la deuxième lecture.

Cette Loi imposerait aux organismes de soccer et aux responsables des terrains de soccer des exigences liées à l’utilisation sécuritaire des buts de soccer mobiles mises à la disposition du public.

Elle prévoit des inspections et exige que le ministre du Tourisme, de la Culture et du Sport mette sur pied un mécanisme qui permet de déposer des plaintes pour non-conformité présumée à la Loi.

En Amérique du Nord

Les décès liés au basculement d’un but de soccer sont moins inusités qu’on l’imagine.

Comme Garrett Mills, plus de quarante personnes ont perdu la vie en Amérique du Nord en raison du renversement d’un but de soccer depuis 1979, selon le site Web américain Anchored for Safety.

Ce site a été créé par les parents de Zachary Tran, un garçon de six ans de l’Illinois qui est décédé en 2003 après qu’un but de 180 livres lui soit tombé sur la tête lors d’une pratique de soccer.

Grâce aux efforts de sensibilisation de ses parents, l’Illinois a adopté en 2011 une loi portant le nom de Zachary Tran qui exige des plans de sécurité liés à la fixation des buts et qui interdit la fabrication ou la vente de nouveaux buts de football mobiles qui ne résistent pas au basculement.

La même année, le Wisconsin n’a pas tardé à adopter une loi similaire, en l’honneur du petit Zachary Tran.

L’Illinois est l’un des cinq États américains à avoir adopté ce genre de lois.

Au Canada, seul le Yukon s’est doté d’une telle loi, à la suite du décès de Jaedyn Amann-Hicks, une fillette de cinq ans, également victime d’un accident impliquant un but de soccer mobile, en 2012.

Celle-ci jouait au soccer avec ses amis à Watson Lake, lorsqu’un ami s’est appuyé contre le filet de soccer pliable. Le filet est tombé, frappant l’enfant à l’arrière de la tête. Elle a été transportée d’urgence à l’hôpital mais est décédée quelques heures plus tard des suites de ses blessures.

Depuis 2014

En Ontario, Jacqueline Palm attend depuis 2014 qu’une loi puisse empêcher que ce qui est arrivé à sa fille, Jaime Palm, arrive à d’autres enfants.

Un mercredi après-midi de juillet, à Bradford, une municipalité au nord de Toronto, l’adolescente de 15 ans jouait sur le terrain avec son ami lorsqu’elle s’est retrouvée coincée sous la barre transversale du but. Incapable de soulever le but, son ami a appelé le 911 et Jaime Palm a été transportée d’urgence à l’hôpital, où elle a succombé à ses blessures.

«Jaime était une belle et dynamique jeune femme de 15 ans. Elle était extrêmement athlétique et extravertie», a soutenu sa mère Jacqueline Palm, lors de son témoignage à Queen’s Park, le 13 juillet dernier, au comité permanent de la politique sociale, qui étudie le projet de loi.

«Jamie avait une joie de vivre pas comme les autres. Elle était gentille. Elle avait de la compassion et elle se souciait de tous. Jaime était un leader parmi ses pairs.»

Jacqueline Palm et son conjoint Rob espèrent voir le projet de loi 99 se concrétiser. «Nous espérons et souhaitons que ce projet de loi soit adopté et intégré dans la législation afin que nos magnifiques enfants comme Jaime et Garrett puissent avoir la possibilité de vivre pleinement la vie qu’ils méritent tant.»

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  • Date de création 25 juillet, 2023
  • Dernière mise à jour 25 juillet, 2023
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