Logements à Notre-Dame-de-Lourdes : un problème qui persiste

Aux alentours de Notre-Dame-de-Lourdes, les entreprises, ce n’est pas ce qui manque. Le village, qui comptait 751 âmes en 2021, offre du travail à celui qui en cherche. Ce qu’il peine à offrir en revanche, ce sont des logements. 

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Hugo Beaucamp

IJL – Réseau.Presse – La Liberté

C’est un problème qui ne date pas d’hier. « Ça fait 30 ans que nous sommes à court de logement », lance le président de la Corporation de développement communautaire (CDC) Lourdéon, Alain Comte, en se redressant sur sa chaise.

Dans le petit village de Notre-Dame-de-Lourdes, on imagine facilement que les endroits où il faut faire la queue se comptent sur les doigts d’une main. Pourtant, Alain Comte est formel, lorsqu’il s’agit du marché de l’immobilier, les files d’attente sont bien réelles. « Les maisons ici se vendent avant même d’être mises sur le marché. Il existe toute une liste de personnes qui cherchent un logement. » Des personnes, mais aussi des organismes et des corporations. « Ils cherchent à acheter des maisons pour leurs nouveaux employés qui arrivent ici. Par exemple, l’hôpital cherche à acheter des maisons pour ses garde-malades ou ses docteurs », illustre le président de la CDC.

Seulement voilà, cette difficulté latente à trouver un toit entraîne avec elle toute une multitude de problématiques. Entre autres, Alain Comte souligne qu’il est « presque impossible » de trouver des logements disponibles à la location dans Notre-Dame-de-Lourdes. Et cela pose un gros problème de rétention pour le village et ses employeurs. Pour un individu qui vit à Winnipeg, difficile d’envisager de faire trois heures de trajet aller-retour chaque jour, surtout en hiver, pour aller travailler à Notre-Dame-de-Lourdes. Mais si la seule option est d’acheter, les gens portés jusqu’à Notre-Dame par la perspective d’un contrat de travail n’ont pas les moyens de prendre la température avant de s’installer. Or l’achat d’une maison est une décision qui, pour la grande majorité des gens en tout cas, demande d’abord un minimum de réflexion, mais a aussi un certain coût.

Parfois les nouveaux arrivants trouvent une solution, comme ce fut le cas pour Virginie Mazoyer, enseignante française arrivée en 2016. « Après avoir postulé spontanément à l’École régionale Notre-Dame, la directrice de l’époque, Linda Leclerc, en sachant qu’il n’y avait pas de logement, m’a proposé de m’héberger. » Mais tout le monde n’a pas cette chance, et tous les résidents de Notre-Dame-de-Lourdes n’ont pas forcément la place pour héberger tous les nouveaux venus.

Mona Spencer, la directrice des services de santé pour la région Santé Sud, explique les défis de logement pour les personnes en formation. « À l’année longue, on accueille six à dix étudiants de médecine qui sont logés dans deux appartements ou dans la communauté; et pour les 8 à 12 étudiants en soins infirmiers, on a un accord avec l’Université de Saint-Boniface pour les loger dans un motel. » Le centre de santé lui-même rassemble environ 150 employés et embauche 20 à 25 personnes tous les ans. Certaines ont un pied-à-terre dans la région.

Enfin, Denis Bibeault, conseiller de la Municipalité rurale de Lorne et ancien maire de Notre-Dame-de-Lourdes, ajoute que « les gens sont souvent juste de passage ici. Les infirmières, par exemple, qui viennent pour des postes temporaires ou qui sont en formation. La même chose s’applique aux médecins. Ces gens-là ne sont pas ici pour acheter. » Les données récoltées par Statistique Canada semblent aller dans ce sens-là. En 2016, le village comptait 744 habitants permanents, cinq ans plus tard en 2021, l’agence en recensait 756. À peine un peu plus d'une dizaine de personnes en cinq ans, soit une croissance de 1,6 %. À titre de comparaison, la population du Manitoba a augmenté de 5 %, passant de 1 278 365 à 1 342 153.

Un besoin de permanence

Et pour l’ancien maire, qui est aussi à l’initiative de la création de la CDC Lourdéon, c’est justement parce que les personnes migrant vers le village ne sont que de passage que les locations sont si rares au village. « Dans le domaine de la santé, le fait que les gens viennent suivre des formations ici est relativement nouveau. Depuis environ cinq ans. Or, les gens qui louent des appartements, ça ne les intéresse pas de louer pendant huit mois et que leurs appartements soient vides le reste de l’année. C’est une perte d’argent. » Le plus intéressant est donc de vendre ses biens immobiliers. Le tableau est clair, Notre-Dame-de-Lourdes est en plein cercle vicieux.

Un cercle vicieux qui concerne tout le monde, pas seulement les nouveaux arrivants. Pour les gens qui ont grandi à Notre-Dame et qui souhaitent y faire leur vie, la situation est tout aussi délicate. « Chez les jeunes aussi c’est compliqué. S’ils cherchent une maison, ils ne sont pas sûrs d’en trouver. Et s’ils en trouvent une, une maison coûte un demi-million de $, parfois plus! Ils sont jeunes, ils n’en ont pas les moyens », conclut Alain Comte.

Alors côté CDC, on explore quelques pistes de solutions. On tente d’obtenir des subventions gouvernementales, mais on saisit aussi le taureau par les cornes. Par exemple, la CDC a fait construire des unités 55 Plus, réservées aux personnes de plus de 55 ans. Un complexe de 18 condominiums au nord de l’église, dont les travaux ont commencé en 2003 pour se terminer en 2021. « Nous avons construit en fonction de la demande », explique le président de la corporation. Ainsi, les 18 unités sont actuellement occupées, et les aînés qui s’y sont installés ont libéré des maisons pour ceux en recherche de logement.

Du côté de Santé Manitoba, pas de plan concret d'investissement pour le moment. « Pour loger nos employés et nos étudiants, on doit travailler avec la communauté », souligne Mona Spencer.

Parmi les solutions envisagées par le président de la CDC Lourdéon, trouver des promoteurs immobiliers disposés à construire au village. Après tout, si Notre-Dame-de-Lourdes manque de quelque chose, ce n’est pas d’attractivité : « Il y a beaucoup de travail, assure Alain Comte. On a de nombreuses industries ici, et la santé aussi recrute beaucoup. »

 

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Photos : 

  • Alain Comte est président de la Corporation de développement communautaire Lourdéon. + photo : Hugo Beaucamp
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  • Date de création 30 juin, 2023
  • Dernière mise à jour 30 juin, 2023
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