Les troubles d’anxiété et de dépression à la hausse

La prévalence des troubles de l’humeur et d’anxiété a affiché une hausse marquée au cours des 10 dernières années selon une récente étude de Statistique Canada.

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Bobby Therrien

IJL – Réseau.Presse – Acadie Nouvelle - Atl

Selon les résultats de l’étude, la proportion de Canadiennes et Canadiens de 15 ans et plus avec un trouble d’anxiété généralisée a doublé de 2012 à 2022, passant de 2,6% à 5,2%.

En 2022, plus de cinq millions de Canadiens répondaient aux critères diagnostiques pour un trouble de l’humeur, un trouble d’anxiété ou un trouble lié à la consommation de substances.

Toujours selon l’étude, des augmentations comparables ont été observées en ce qui a trait à la prévalence des épisodes dépressifs majeurs, qui est passée de 4,7% en 2012 à 7,6% en 2022, et celle des troubles bipolaires, qui est passée de 1,5% à 2,1% au cours de la même période.

Valérie Saulnier, directrice adjointe régionale par intérim des services de santé mentale et de traitement des dépendances au sein du Réseau de santé Vitalité, remarque que le Nouveau-Brunswick suit cette tendance.

Selon elle, les visites pour des cas de santé mentale dans les urgences de Vitalité sont surtout liées aux troubles anxieux et de dépression. Elle a aussi remarqué une hausse des demandes de service en communauté. De plus, le taux d’occupation des unités psychiatriques atteint régulièrement son maximum.

Celle qui travaille au sein du réseau Vitalité depuis 2014 ne sait toutefois pas si cela s’explique par l’augmentation de la prévalence des cas ou si les gens sont plus enclins à chercher de l’aide auprès de services de santé mentale.

«Il est difficile de cibler la raison exacte (…) Je crois que, de plus en plus, le train de vie est rapide. On a beaucoup d’attentes envers nous-mêmes et les gens de la société. Ce qui fait que les gens peuvent développer plus de défis à gérer les symptômes liés aux troubles de l’humeur.»

«Il y a plusieurs facteurs qui peuvent influencer ces statistiques.»

En se basant sur des données  de Statistiques Canada publiées en 2022, le Nouveau-Brunswick figurait parmi les endroits où le taux de personnes qui perçoivent leur santé mentale comme étant mauvaise ou passable était le plus élevé (10,4%). Seuls la Nouvelle-Écosse et les Territoires du Nord-Ouest avaient un pourcentage plus élevé à ce chapitre.

Les jeunes sont de plus en plus affectés

La récente étude de Statistique Canada note que les plus fortes augmentations de 2012 à 2022 ont été observées chez les jeunes, particulièrement chez les jeunes femmes de 15 à 24 ans, pour qui la prévalence des troubles d’anxiété généralisée a triplé et celle des épisodes dépressifs majeurs a doublé.

La pandémie de COVID-19 a évidemment été identifiée comme un facteur aggravant, mais l’étude note que la détérioration de la santé mentale des jeunes a été observée bien avant 2020.

Valérie Saulnier observe une tendance similaire, elle qui a remarqué une augmentation des demandes de service de la part des jeunes.

«Notre taux est à la hausse autant chez les jeunes que chez les adultes, mais c’est évidemment inquiétant de voir que le taux de jeunes est plus élevé qu’auparavant. On s’attend à ce que cette population devienne adulte et nécessitera possiblement des services, alors on tente de se préparer en conséquence.»

Selon des statistiques du Conseil de la santé du Nouveau-Brunswick pour l’année scolaire 2022-2023, seulement 41% des répondants, soit des élèves de la 6e à la 12e année, ont indiqué qu’ils percevaient leur santé mentale comme étant très bonne ou excellente.

Plus de 50% des répondants ont avoué avoir eu des symptômes d’anxiété. Ce taux était à 47,8% en 2021-2021 et 32,6% en 2015-2016. Une proportion de 44,7% de ces mêmes jeunes a indiqué avoir ressenti des symptômes de dépression en 2022-2023, comparativement à 41,7% l’an dernier et à 31,2% en 2015-2016.

Vickie Plourde, psychologue, professeure et titulaire de la chaire de recherche interdisciplinaire en santé mentale des enfants et des jeunes à l’Université de Moncton, reconnaît que la pandémie n’a pas aidé la cause des jeunes, mais qu’il y a évidemment un éventail de raisons qui peuvent expliquer la situation.

En se fiant aux données du conseil de la santé, elle soupçonne que le temps passé devant les écrans et le sommeil insuffisant peuvent aussi être des facteurs aggravants.

«On peut penser que plusieurs comportements viennent augmenter les symptômes rapportés. Ça peut être une explication qui vient nous dire que, oui, il y a la pandémie, mais qu’il y a peut-être d’autres défis qui viennent augmenter leurs symptômes. Ça reste évidemment des hypothèses.»

Mme Plourde estime que les jeunes sont aussi plus à l’aise pour parler de santé mentale, même s’il reste encore beaucoup de stigmatisation entourant le sujet et qu’il est parfois difficile d’obtenir de l’aide dans un délai raisonnable au Nouveau-Brunswick.

Elle explique également que les jeunes sont souvent plus à risque de développer des problèmes de santé mentale, car les symptômes commencent à se développer davantage à l’adolescence.

«C’est une période de vie transitoire dans laquelle il se passe beaucoup de choses au niveau du développement du cerveau. Il y a des études au niveau mondial qui montrent que la prévalence des problèmes de santé mentale est plus grande à cette période de leur vie. On sait que les filles sont plus touchées, mais on ne sait pas exactement pourquoi.»

Améliorer la livraison des services

Afin de s’attaquer à cette problématique, le Réseau Vitalité a développé divers programmes comme le renforcement des connaissances des intervenants et les thérapies à séance unique pour offrir un accès plus rapide aux services.

«On tente de mettre en place des modèles et des programmes qui donnent un accès plus rapide pour la prise en charge des symptômes de santé mentale afin d’éviter que ça devienne un problème aigu.»

Valérie Saulnier s’est d’ailleurs réjouie du taux de satisfaction des usagers et de la réduction des listes d’attente dans les centres de santé mentale et de traitement des dépendances communautaires.

«En milieu hospitalier, on est toujours en train de réévaluer la coordination des soins pour assurer un accès rapide et une bonne continuité de soins.»

Des partenariats ont aussi été développés, avec le ministère de la Santé du Nouveau-Brunswick notamment, afin de financer l’ajout d’effectifs afin de répondre à cette demande de services à la hausse.

«Malgré la hausse, on a beaucoup d’espoir en ce moment au niveau de la nouveauté des programmes et de l’ajustement des services en conséquence. Il y a un train d’optimisme qui s’en vient par rapport à l’accès (aux services) et on a des gens dédiés à la cause», a soutenu Mme Saulnier.

De son côté, Vickie Plourde juge que la situation demeure somme toute inquiétante et qu’il reste du travail à faire pour mieux outiller les jeunes. Elle reconnaît par contre que des efforts sont en train d’être mis en place pour faciliter l’accès aux services.

«Il y a plusieurs mouvements à divers endroits, comme le Canada et le Nouveau-Brunswick, pour développer des services intégrés en santé mentale et physique pour les jeunes. C’est un modèle plus axé sur les besoins du jeune, dans un espace sécuritaire.»

Selon Mme Plourde, il existe certains sites du genre dans la province. Un projet de recherche, permettant de documenter les effets de ces services intégrés, a conclu que les jeunes étaient très satisfaits des services reçus, notamment en accédant à un professionnel de la santé dans un délai raisonnable.

«On a vu que ç’a eu un impact assez significatif sur leur santé mentale. Après avoir visité ces sites, on a remarqué qu’il y avait eu une diminution de leur détresse psychologique. Ce projet a permis de montrer que ce type de site de services intégrés jeunesse peut vraiment avoir un effet positif sur le fonctionnement de ces jeunes.»

D’après la psychologue, il serait important de poursuivre le développement de ces programmes en les rendant accessibles à plus d’endroits dans la province et en les faisant connaître davantage.

Ressources utiles en santé mentale

-211 NB

-Ligne d’écoute CHIMO : 1-800-667-5005

-Ligne d’écoute Espoir pour le mieux-être : 1-800-667-5005

-https://bridgethegapp.ca/fr_ca/youth-national/ : ressource pour les familles

 

 

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  • Date de création 2 octobre, 2023
  • Dernière mise à jour 2 octobre, 2023
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