Les tendances politiques du printemps

Les libéraux conservent leur rôle d’opposition officielle à l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard, mais s’effondrent dans les sondages. Les intentions de vote pour les verts progressent tandis que la popularité du gouvernement progressiste-conservateur est en baisse, traduisant un ras-le-bol des insulaires face aux crises de la santé et du logement. 

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Marine Ernoult

IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne

 

Le Parti libéral garde son statut d’opposition officielle à l’Île-du-Prince-Édouard. Darlene Compton, la présidente de l’Assemblée législative, en a décidé ainsi avant la reprise des travaux parlementaires le 27 février dernier. 

Depuis l’élection d’un nouveau député vert, Matthew MacFarlane, au début du mois de février, les libéraux et les verts ont le même nombre de députés, trois chacun. 

Darlene Compton a justifié sa décision en évoquant une logique de continuité. Des décisions similaires ont déjà été prises au Nouveau-Brunswick, en Alberta et à la Chambre de communes du Canada. À chaque fois, le parti ayant obtenu le statut d’opposition officielle en premier a gardé son rôle.

«Au regard de ces précédents, la décision du statu quo était la plus appropriée», commente Don Desserud, professeur de sciences politiques à l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard. 

«Darlene Compton ne devait pas prendre de décision qualitative sur le meilleur parti d’opposition, elle devait préserver sa neutralité», ajoute-t-il. 

«Résultats désastreux» pour les libéraux

Le statut d’opposition officielle n’empêche pas les libéraux de s’effondrer dans le dernier sondage trimestriel de Narrative Research (mené auprès de 300 Insulaires du 8 au 13 février). 

Ils ne récolteraient que 12 % des voix si une élection avait lieu aujourd’hui. Le pourcentage le plus bas depuis août 2021.

«Ce sont des résultats désastreux. C’est incroyablement inquiétant pour un parti qui a été l’une des deux principales formations politiques de la province», réagit Don Desserud. 

Le politologue lie cette chute libre dans les intentions de vote au rejet du gouvernement de Justin Trudeau au niveau fédéral.

«Les Insulaires sont mécontents des libéraux à Ottawa alors ils s’en prennent aux libérauxprovinciaux. Ces derniers affirment qu’ils ne sont pas les mêmes, mais les gens ne font pas la différence», analyse-t-il. 

Les verts s’en sortent mieux dans le sondage de Narrative Research. Si une élection était organisée aujourd’hui, ils obtiendraient 28% des suffrages, soit une augmentation de 10 points de pourcentage par rapport au mois de novembre 2023.

«C’est un parti qui fait de plus en plus parler de lui et connaît une croissance lente depuis près de dix ans, observe Don Desserud. Lors du prochain scrutin en 2027, ils pourraient retrouver leur statut d’opposition officielle, sur une base encore plus solide qu’avant.»

Grande «frustration» des Insulaires 

Aux yeux du politologue, le handicap commun aux verts et aux libéraux est l’absence d’un chef de parti élu. 

Dans le sondage, Karla Bernard, cheffe intérimaire des verts, est plébiscitée par 17 % des personnes interrogées, Hal Perry, chef intérimaire des libéraux, par seulement 12 % des sondés.

«Lorsque les gens réfléchissent à leurs options de vote, ils pensent à quelles personnes formeront le prochain gouvernement. S’ils ne savent même pas qui sera le Premier ministre, ils sont moins enclins à soutenir ce parti», explique Don Desserud.  

Le chercheur insiste sur le besoin d’un chef de file libéral charismatique, capable de redorer l’image de la formation politique : «Il leur faut quelqu’un qui sera perçu comme un sauveur, qui jouit d’un respect et d’une admiration universels.»

Les progressistes-conservateurs n’échappent pas aux critiques des Insulaires. 51 % des sondés se disent plutôt satisfaits de l’action du gouvernement en place, contre 61 % un an plustôt. La popularité du Premier ministre Dennis King est également en baisse. 

Des résultats qui, selon Don Desserud, restent honorables : «Il n’est pas rare de voir le soutien au gouvernement s’éroder au cours d’un deuxième mandat, il faut surtout voir si la tendance à la baisse se maintient.»

L’universitaire note une grande «frustration» des insulaires à l’égard des crises du système de santé, du logement et des opioïdes qui tardent à se résoudre. 

Il s’attend à ce que Dennis King et ses ministres soient interpellés à maintes reprises sur ces questions pendant la nouvelle session de l’Assemblée législative qui vient de s’ouvrir.   

 

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Photos

 

Darlene Compton, la présidente de l’Assemblée législative. (Photo : Laurent Rigaux)

 

Don Desserud est professeur de sciences politiques à l’Université de l’ÎPÉ. (Photo : Gracieuseté)

 

Karla Bernard, cheffe intérimaire du Parti vert. (Photo : Marine Ernoult)

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  • Date de création 8 mars, 2024
  • Dernière mise à jour 8 mars, 2024
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