Les taux de vaccination chez les enfants du Nunavut en chute libre

De 2017 à 2021, les données recueillies dans l’Enquête nationale sur la couverture vaccinale des enfants indiquent que le Nunavut présente une diminution de la couverture pour tous les vaccins recommandés. La proportion d’enfants de 2 ans protégés contre la rougeole, les oreillons et la rubéole est passée de 88,7 % à 34,6 % durant ces années.
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Karine Lavoie
IJL — Réseau.Presse — Le Nunavoix

L’Enquête nationale sur la couverture vaccinale des enfants (ENCVE) de 2021 présente les données sur la vaccination des enfants au Canada et donne des indications concernant l’effet de la pandémie de la COVID-19 sur l’immunisation des enfants âgés de 2, 7, 14 et 17 ans.

Menée tous les deux ans depuis 2011 par l’Agence de la santé publique du Canada en collaboration avec Statistique Canada, l’ENCVE mesure la proportion d’enfants ayant reçu les vaccins de routine recommandés à l’âge de 2, 7, 14 ou 17 ans, ainsi que les connaissances, les attitudes et les croyances des parents en ce qui a trait à la vaccination.

Le Nunavut fait bande à part

À l’échelle nationale, les résultats de l’enquête de 2021 démontrent pourtant que la couverture vaccinale nationale pour les enfants est demeurée généralement stable en 2021 par rapport à 2019, avec une légère augmentation chez les jeunes de 14 ans.

Certaines diminutions de la couverture vaccinale ont toutefois été mesurées chez les enfants de 7 ans en 2021 par rapport à 2019.

Au Nunavut, les plus récentes données disponibles démontrent un effondrement des taux de vaccination chez les enfants de 2 ans pour le vaccin contre la diphtérie, la coqueluche et le tétanos entre 2017 et 2021 avec une proportion qui est passée de 63,8 % à 24,1 % entre 2017 et 2021.

Même constat pour le taux de vaccination contre la poliomyélite qui a connu une baisse vertigineuse passant de 82,1 % en 2017 à 33,5 % en 2021 et pour celui de l’haemophilus influenzae de type B qui a chuté de 57,2 % à 24,1 %.

Au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, une baisse du taux de vaccination est aussi notée, mais ne ressemble en rien à celle du Nunavut. La proportion d’enfants de 2 ans protégés contre la rougeole est passée de 91 % à 85,3 % entre 2017 et 2021 au Yukon et de 91,8 % à 90,8 % aux Territoires du Nord-Ouest.

Le ministère de la Santé du Nunavut déclare ne pas être en mesure de valider les chiffres concernant le territoire puisqu’il ne dispose actuellement d’aucun registre d’immunisation.

Un travail est en cours afin d’enregistrer avec précision les taux de vaccination de la population.

Danny Ishulutak, responsable des communications au ministère de la Santé du Nunavut croit que la pandémie a joué un rôle dans la baisse de la vaccination.

« De nombreuses personnes éprouvent une lassitude à l’égard des vaccins et des messages à la suite des intenses campagnes d’information et de vaccination en cas de pandémie. En outre, il y a beaucoup de désinformation qui circule et qui affecte les perceptions et la compréhension des individus en lien avec la vaccination, et ce matériel a proliféré depuis la pandémie », affirme-t-il.

Anna Maddison, conseillère principale des relations avec les médias à la Direction générale des affaires publiques et de communications pour Santé Canada et l’Agence de la santé publique du Canada, n’est pas du même avis.

« Bien que certains parents et tuteurs aient dû faire face à des obstacles et à des retards en matière de vaccination, la majorité (80 %) des parents et des tuteurs d’enfants de tous les groupes d’âge ont déclaré que la pandémie de la COVID-19 n’avait pas remis en cause leur décision de faire vacciner leur enfant et que 18 % d’entre eux étaient plus enclins à le faire », précise-t-elle.

L’incidence de la pandémie n’est cependant pas entièrement prise en compte chez les enfants de 2, 14 et 17 ans dans l’échantillon de l’ENCVE de 2021, car de nombreux enfants avaient reçu certains de leurs vaccins de routine avant le début de la pandémie.

Avec les couvertures vaccinales enregistrées, le Nunavut est bien loin d’atteindre les objectifs de la Stratégie nationale d’immunisation (SNI) du Canada qui ont été établis en 2017 et qui doivent être atteints d’ici 2025 pour les vaccins qui sont financés par les fonds publics.

Cela comprend un objectif de couverture vaccinale de 95 % pour les vaccins destinés aux enfants évalués à l’âge de 2 ans et de 7 ans.

« Toute réduction de la couverture vaccinale a de quoi inquiéter, car elle signifie que les communautés et les personnes qui y vivent sont moins bien protégées contre les maladies évitables par la vaccination. Des taux élevés de vaccination contribuent à prévenir la propagation et l’éclosion de maladies infectieuses au Canada », affirme Anna Maddison.

Sans porte-parole en lien avec la vaccination au Nunavut, la Société pédiatrique du Canada n’a pas été en mesure de commenter sur les raisons qui expliquent la situation particulière du territoire.

Le ministère de la Santé du Nunavut affirme poursuivre ses efforts pour améliorer les taux de vaccination dans l’ensemble du territoire.

« Nous travaillons activement à la sensibilisation communautaire et aux efforts de promotion de la santé pour lutter contre l’hésitation à la vaccination chez les enfants. Reconnaissant que les stratégies traditionnelles ne sont pas toujours efficaces, nous explorons des approches créatives pour mieux établir des liens avec les communautés. Nous mettons l’accent sur l’amélioration de l’engagement communautaire en tant que principale méthode pour adapter efficacement les messages, en veillant à ce qu’ils résonnent d’un lieu de sécurité culturelle », déclare Danny Ishulutak.

Le retour de la coqueluche

L’Agence de la santé publique du Canada informe que l’augmentation de l’activité coquelucheuse cette année au pays n’est pas inattendue puisqu’elle fait suite à une période de faible incidence pendant les années de la pandémie de la COVID-19.

L’activité de la coqueluche augmente généralement tous les deux à cinq ans ; le nombre de cas au Canada se situant entre 500 et 4500 par an.

Récemment, le ministère de la Santé du Nunavut a confirmé la présence de cas de coqueluche sur le territoire.

Des avis d’exposition potentielle sur un vol de Canadian North le 9 mars 2024 et sur un vol de Calm Air le 17 mars 2024 ont été annoncés.

« L’une des principales préoccupations est le risque accru que posent les éclosions de rougeole et de coqueluche au Canada, en particulier pour les Nunavummiut qui sont sous-vaccinés », indique Danny Ishulutak.

Le ministère se veut toutefois rassurant en précisant que le personnel de la santé fait un excellent travail pour contenir l’éclosion grâce à une combinaison efficace de recherche des contacts, de gestion et de traitement des cas et des contacts ainsi que par un travail de promotion de la santé et de rattrapage de la vaccination.

Devant la hausse des cas de rougeole au pays, le ministère de la Santé du Nunavut a également publié un message d’intérêt public le 5 avril dernier en demandant aux Nunavummiut de tenir leur couverture vaccinale contre la rougeole à jour afin de contribuer à protéger le territoire devant le risque croissant d’éclosion.

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Au Nunavut, les plus récentes données disponibles démontrent un effondrement des taux de vaccination chez les enfants de 2 ans pour le vaccin contre la diphtérie, la coqueluche et le tétanos entre 2017 et 2021 avec une proportion qui est passée de 63,8 % à 24,1 % entre 2017 et 2021.

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  • Date de création 24 avril, 2024
  • Dernière mise à jour 26 avril, 2024
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