Les circonscriptions de la Nouvelle-Écosse

Les Acadiens de la Nouvelle-Écosse ont longtemps combattu pour une représentation effective en politique. Étant une minorité francophone vivant dans une majorité anglophone, ils ont au cours de l’histoire mené la course au combattant pour avoir un élu. 

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Farida Agogno 

IJL – Réseau.Presse – Le Courrier de la Nouvelle-Écosse - Atl

Étant l’un des peuples fondateurs de la province néo-écossaise, les Acadiens s’y sont installés au 17e siècle. Après la Déportation, qui a eu lieu de 1755 à 1763, ils sont autorisés à revenir. À leur retour, les autorités britanniques voulaient éviter leur concentration. Voilà pourquoi le peuple acadien va subir une dispersion géographique qui va impacter leur représentation politique.

La dispersion des Acadiens sur l’étendue du territoire fait qu’ils sont minoritaires dans les régions. N’ayant pas le poids démographique nécessaire à Argyle, Clare, Isle Madame (Richmond) et Chéticamp pour élire un représentant, ils subissent une sous-représentation politique au cours de l’histoire.

Inclus dans le comté de Yarmouth, la région d’Argyle connaît une irrégularité dans la représentation politique acadienne. Avant la Déportation, les Acadiens vivaient déjà dans la région. Attirés par les emplois dans l’industrie de pêche, beaucoup choisissent Argyle comme destinations après la Déportation. Malheureusement, ils attendront 20 ans avant d’obtenir des titres fonciers.

En 1836, pendant les élections provinciales, le premier Acadien en Amérique du Nord est élu à l’Assemblée législative. Il s’agit de Simon d’Entremont.

Ce dernier ne réussira pas à se faire réélire en 1840. Dès cette défaite, 54 ans vont s’écouler avant l’élection d’un Acadien dans la région. De 1894 à 1933, six députés acadiens sont élus et, de 1933 à 1984, seulement deux.

À Chéticamp, on remarque le même phénomène. Majoritaires, les Acadiens se sont installés à Chéticamp vingt ans après Argyle.

Sur le plan politique, ils ont été représentés seulement deux fois, la première fois par Moses J. Doucet de 1897 à 1906 et la deuxième par Hubert Aucoin de 1925 à 1928. Et, ils n’ont pas réussi à élire un des leurs au niveau fédéral.

Basé dans le comté de Richmond, le premier Acadien élu répond au nom d’Henry Martell en 1840. Et de manière discontinue, 10 Acadiens ont représenté la région avec un élu au fédéral en 1988. C’est le député Francis Leblanc.

À Clare, la représentation semble effective. Entre 1836 et 2013, un Acadien à représenté la région à l’échelle provinciale de façon continue.

Pour une meilleure représentation politique, les circonscriptions acadiennes protégées s’instaurent. Dorénavant, les frontières électorales ne sont plus déterminées par l’Assemblée législative. Les partis politiques s’entendent alors afin de permettre aux groupes minoritaires, donc les Acadiens, de jouir d’une meilleure représentation.

Une attention particulière est alors accordée aux Acadiens sur le plan politique, car « si les Acadiens constituent une communauté d’intérêts au niveau provincial, les communautés acadiennes de Clare, Argyle et Richmond constituent elles-mêmes des communautés d’intérêts au niveau local ».

Pourtant, dans ce processus de considération particulière, Chéticamp ne bénéficie pas de cette exclusivité, et cela malgré les suggestions de la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse (FANE) sur le sujet.

En 2009, le nouveau gouvernement néo-démocrate de Darrell Dexter favorise l’abolition des circonscriptions protégées. Désormais, la représentation politique des Acadiens n’est plus assurée.

En conséquence, la circonscription d’Argyle est fusionnée au district anglophone majoritaire de Barrington; Clare est étendue jusqu’à Digby et Richmond est élargie pour inclure le Cap-Breton West.

Face à cette injustice, la FANE entame une bataille judiciaire. En 2012, elle dépose une poursuite contre le gouvernement. En 2017, la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse prend une décision finale : les Acadiens peuvent ainsi avoir une voix à l’Assemblée législative, sauf Chéticamp qui ne bénéficie pas d’une circonscription et d'élus pour représenter les Acadiens de la région.

Mais selon l’avocat Michel Doucet, représentant de la FANE dans ce combat, « c’est une grande victoire que les Acadiens de la Nouvelle-Écosse peuvent célébrer. Il aura fallu aller devant les tribunaux pour l’obtenir. »

En gros, les Acadiens ont subi des torts historiques qui ont entraîné des conséquences sur leur représentation politique. Minoritaires, ils n’ont pas eu une présentation politique régulière, en dépit de l’introduction des circonscriptions protégées, de son abolition et de la victoire de la FANE.

La déception plane toujours dans la région de Chéticamp qui ne jouit pas d’une représentation francophone.

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  • Date de création 19 juin, 2023
  • Dernière mise à jour 22 juin, 2023
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