Les Anges de la « bonne entente » mis à l’avant-scène

Les Anges de la bonne entente, installés à Penetanguishene en 1921, ont été récemment relocalisés afin de mettre en valeur le patrimoine de la ville de Penetanguishene. Du même coup, ce changement leur redonnait leur rôle d’hôte afin d’accueillir les gens à l’entrée de la ville.

Annique Maheu
IJL - Réseau.Presse
- Le Goût de vivre

Témoins de l’histoire de Penetanguishene

Passionnés de l’histoire tri-culturelle de Penetanguishene (autochtone, françophone et anglophone), le Prêtre de la Paroisse Sainte-Anne, Athol Murray, ainsi que Gerald Lahaie, résident et propriétaire d’un commerce à Penetanguishene, étaient à la tête du projet des anges de Penetanguishene, dévoilés il y a plus de cent ans.

Les anges, faits d’alliage de zinc et peints pour ressembler au bronze, tenaient un flambeau illuminé et étaient montés sur deux piliers portant les inscriptions «Ontario» sur un et «Québec» sur l’autre. Ces inscriptions devaient souligner l’existence harmonieuse de deux groupes linguistiques distincts à Penetanguishene, soit les Francophones et les Anglophones.

C’est en 1921, lors des célébrations du tricentenaire de l’arrivée de Samuel de Champlain (en 1615) dans la région de Penetanguishene que les anges ont été dévoilés pour la première fois au coin des rues Main et Thompson. Les festivités du 300e anniversaire échelonnées sur une semaine entière avaient été repoussées de 6 ans en raison de la Première Guerre mondiale et de la pandémie de la grippe espagnole. Les anges ont été installés à l’entrée de la ville et ont été surnommés les Anges de la «bonne entente», représentant la bonne relation entre les deux communautés linguistiques.

Symbole identitaire de la ville de Penetanguishene

Pour Nicole Jackson, conservatrice en chef du Musée et archives de Penetanguishene, les anges révélaient une identité très forte de la ville de Penetanguishene à l’époque.

«En 1921, les résidents de la province de l’Ontario étaient toujours sous l’emprise du règlement 17, interdisant l’usage du français comme langue d’enseignement, de communication et même du symbole de fierté d’être Francophone en Ontario. À mon avis, en installant ces anges, la ville et la communauté affirmaient que malgré ces règles, Penetanguishene était un petite ville accueillante et inclusive» constate Mme Jackson.

Mme Jackson souligne également que les activités lors des festivités du 300e anniversaire de l’arrivée de Champlain rendaient hommage à la présence autochtone à l’époque. «Le chef de la nation Wendat à Loretteville au Québec, Ovide Sioui, s’était rendu à Penetanguishene pour les célébrations, qui incluait la reconstitution des événements de la rencontre entre Champlain et les Wendats 300 ans auparavant. De plus, une cérémonie symbolique de l’enfouissement d’une hachette de paix entre les Wendats et les Iroquoiens de l’époque avait eu lieu. Ce n’était pas une petite affaire» affirme Mme Jackson.

En 1979 l’emplacement des anges ont été un lieu de rassemblement emblématique lors d’une marche de solidarité dans le chapitre des revendications des écoles secondaires de langue française en Ontario. Des élèves de l’École de la Huronie, aussi connue comme École de la résistance ont utilisé ce lieu de rencontre symbolique pour réclamer leur école secondaire francophone.

Dans les années 1980 et 1990, les anges ont servi d’images de marque pour plusieurs activités à Penetanguishene, dont le Carnaval d’hiver/Winterama, le plus ancien carnaval d’hiver en Ontario.

Au fil des ans, les Anges de la bonne entente ont demandé beaucoup d’entretien pour être finalement remplacés par de nouvelles statues faites de bronze durant les années 1990. Les anges originaux font maintenant partie de la collection du Musée et archives de Penetanguishene et sont exposés dans le hall d’entrée.

Moderniser l’accueil et renouer avec son histoire

En 2020, le Comité du patrimoine de la ville de Penetanguishene a exprimé ses inquiétudes face aux impacts que les projets de développement d’immeubles et de rues dans la ville avaient sur la visibilité des anges et leur symbolisme. L’endroit où les anges avaient été installés à l’origine n’était plus convenable car ceux-ci semblaient perdus dans le décor en raison de la construction de nouveaux immeubles tout autour.

Grand projet patrimonial de la ville de Penetanguishene

Le projet de réfection et de déménagement des anges allait avoir plusieurs composantes. Tout d’abord le déménagement des anges se ferait à l’endroit exact de la frontière de la ville de Penetanguishene, tout près du nouveau sentier pédestre. Permettant ainsi de retrouver le sentiment d’entrer dans la ville grâce à l’installation d’une nouvelle affiche désignant la ville de Penetanguishene et la construction de nouvelles bases pour élever les anges sur le plan visuel. Du même coup rehausser le sentiment d’être accueilli avec des jardins et des pavés autobloquants. Pour compléter le tout, l’installation d’un nouveau panneau d’interprétation pour afficher la reconnaissance des territoires autochtones ainsi que des panneaux expliquant l’histoire des anges en anglais et en français étaient de mise.

Le projet serait dirigé par Sherry Desjardins, Directrice du département de récréation et services communautaires à la ville de Penetanguishene.

«Au début, plusieurs résidents étaient réticents face au projet et ne voulaient pas qu’on touche aux anges. Certains avaient des membres de leur famille qui avaient posé les roches originales, et ne voulaient donc pas y voir de changements. Mais maintenant qu’ils voient le résultat, ils disent wow! Je vois la vision que vous aviez. Ils sont fiers du projet des anges» partage Mme Desjardins.

Mme Desjardins souligne l’importance de la collaboration avec le Comité du patrimoine et de partenaires communautaires dont l’école des arts Quest aux débuts du projet, le Club Rotary et La Clé, organisme catalyseur de la communauté francophone de Simcoe.

Selon Mme Desjardins, un des objectifs principaux du projet était «de partager avec les jeunes, l’histoire de la communauté et de l’harmonie que vivaient les Francophones et Anglophones à Penetanguishene, à une époque où c’était rare dans la province de l’Ontario. Les jeunes ne remarquent pas les anges et ne comprennent pas leur histoire».

Il était donc important pour Mme Desjardins et l’équipe du projet de faire le dévoilement officiel des anges à la Fête du drapeau franco-ontarien au mois de septembre dernier. Cette occasion a permis à la ville de partager l’histoire des anges durant la cérémonie publique rassemblant les résidents de la ville, ainsi que les élèves des écoles de Penetanguishene.

Le projet qui recevra bientôt les touches finales dont l’installation d’un banc et des panneaux d’interprétation, a été rendu possible grâce à une subvention de 272 913$ du Gouvernement du Canada sous le programme de Développement des communautés par le biais des arts et du patrimoine. La somme totale du projet est d’environ 400 000$.

Heureuse du résultat de ce projet, Mme Desjardins souligne que les résidents de Penetanguishene sont encouragés à s’inscrire à la plateforme Connect Penetanguishene. C’est là où tous peuvent en apprendre davantage sur les projets de la municipalité et comment ils peuvent participer aux processus de consultation et de commentaires.

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Photos

Titre : Ville de Penetanguishene
Légende : Les anges de la bonne entente à Penetanguishene en 1921 à son emplacement original.
Crédit : Ville de Penetanguishene

Titre : Musée et archives
Légende : Les élèves de l’École de la résistance se sont rassemblés près de l’ange représentant la francophonie en 1979.
Crédit: le Musée et archives de Penetanguishene

Titre : Les anges de la bonne entente
Légende : Les anges de la bonne entente à leur nouvel emplacement, maintenant plus visibles et accessibles, à la frontière de la ville de Penetanguishene.
Crédit: Annique Maheu

  • Nombre de fichiers 4
  • Date de création 7 décembre, 2023
  • Dernière mise à jour 7 décembre, 2023
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