L’endettement inquiète de plus en plus les ménages albertains

Les effets de l’inflation et de la hausse des intérêts se font ressentir en Alberta tandis qu’on apprenait à la mi-janvier que 52% des citoyens se sentent inquiets face à leur niveau d’endettement. Et leurs préoccupations semblent justifiées si l’on se fie au nombre de faillites qui ont été déclarées en novembre dernier dans la province. Dans ce climat économique, le risque d’une récession pourrait bien être la goutte qui fait déborder le vase.

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Gabrielle Audet-Michaud

IJL-RÉSEAU.PRESSE-LE FRANCO

L’économiste en chef chez Alberta Central, Charles St-Arnaud, estime à «fortes» les chances qu’une récession «modeste» frappe le Canada au cours des prochains mois. Il se fait toutefois rassurant et pense que si une récession devait survenir au pays, elle risque de ne pas affecter la province albertaine trop durement.

«Ce qui semble être le scénario le plus envisageable, c’est que la croissance en Alberta va demeurer plus forte qu’ailleurs au Canada, mais ça reste à discuter», explique-t-il.

Une récession pourrait certes mener à des pertes d’emplois et une augmentation du taux de chômage, mais ce ne sera rien de «majeur», prévoit l’économiste. En même temps, cette récession pourrait être «le mal nécessaire pour ramener l’inflation à la cible de 2%» et du même coup, «augmenter le pouvoir d’achat des ménages», nuance-t-il.

C’est une hypothèse qu’appuie Lindsay Burchill qui est vice-présidente du secteur Insolvabilité des consommateurs pour le cabinet de comptables Meyers Norris Penny (MNP) à Calgary. Selon elle, l’inflation actuelle «érode la capacité des consommateurs à s’acquitter de leurs dettes» tandis que les taux d’intérêt «ne font qu’accroître le montant qu’ils devront rembourser au final».

Chez MNP, le nombre de consultations et d’appels a augmenté de manière considérable dans les derniers mois et pour cause : en novembre, le nombre de cas d’insolvabilité a atteint un sommet en Alberta avec plus de 1400 dossiers, une première depuis mars 2020. «Pendant la COVID, les faillites avaient chuté de 40% au Canada», rappelle Lindsay Burchill, notamment en raison des mesures d’aide financière mises en œuvre par le gouvernement fédéral pour soutenir les Canadiens.

L’anxiété et les dettes

Mais maintenant que les prestations ont pris fin, le goulot d’étranglement se resserre sur plusieurs ménages. Le plus récent sondage mené par Ipsos sur l’Indice des dettes à la consommation de MNP démontre que l’Alberta est la province qui s’inquiète le plus face à son niveau d’endettement. Selon Lindsay Burchill, cela est dû à l’historique économique en «montagnes russes» des dernières années qui rend la population albertaine plus «soucieuse et prévoyante».

«Il y a aussi le fait qu’en général, les Albertains ont tendance à être un peu plus surendettés que le reste des Canadiens. Nous sommes une province de propriétaires : il y a plus de propriétaires par habitant à Calgary qu’il y en aurait à Montréal par exemple», ajoute la vice-présidente du secteur Insolvabilité chez MNP.

Le fait le plus inquiétant du sondage, souligne Lindsay Burchill, c’est ce 30% d’Albertains qui disent être déjà incapables de payer leurs factures et de rembourser leurs dettes en même temps. «Ils peuvent à peine garder la tête hors de l’eau», s’indigne-t-elle. «Ces personnes, renchérit la vice-présidente, s’inquiètent moins de la menace d’une récession que de trouver des solutions pour pouvoir survivre jusqu’à la fin du mois.»

Développer de saines habitudes

Lindsay Burchill suggère à quiconque se trouvant dans une situation financière anxiogène ou précaire de consulter un syndic autorisé en insolvabilité. «Même si on n’est pas au point de déclarer faillite, le plus vite on consulte, le plus d’options s’offrent à nous, martèle-t-elle. La pire erreur, c’est de faire l’autruche et de se cacher la tête dans le sable jusqu’à être complètement enlisé.»

Le courtier financier Gui Glasspoole, lui, tente justement d’éduquer ses clients pour qu’ils développent de saines habitudes financières au quotidien. «Je travaille majoritairement avec la classe moyenne et ce que je vois le plus, ce sont des dettes de cartes de crédit, surtout chez les moins de 35 ans», avance-t-il. Cela est partiellement imputable au «système d’éducation qui ne semble pas fournir les outils nécessaires pour apprendre aux jeunes à faire un budget, à économiser et gérer leurs finances».

Selon le courtier du World Financial Group (WFG), ces concepts devraient être d’abord enseignés au secondaire. «C’est un mindset, la santé financière. Quand on ne planifie jamais rien en avance, c’est là que l’anxiété surgit», conclut-il.

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  • Date de création 14 février, 2023
  • Dernière mise à jour 13 février, 2023
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