Le ramadan dans un Nord en pleine crise

Une première pour l’humanité, mais aussi pour les musulmans vivant à Iqaluit en cette période de pandémie.
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Hawa Diallo
Initiative de journalisme local – APF – Territoires

Si pour certains les longues journées ensoleillées du printemps sont les bienvenues par rapport aux longues nuits d’hiver de l’Arctique, pour d’autres cela consiste en un énorme défi. Le ramadan a débuté le 23 avril dernier et prendra fin le 23 mai prochain. Tout au long du mois, les musulmans à travers le monde jeûnent du lever au coucher du soleil.

Au Nunavut, le printemps est marqué par le début des journées très longues. De manière graduelle, le soleil commence à se coucher de plus en plus tard, jusqu’en juin, où certaines régions du territoire peuvent voir la lumière du jour jusqu’à 24 heures d’affilée. À Iqaluit, les journées du mois de mai peuvent compter jusqu’à 19 heures de lumière, ce qui signifie 19 heures sans manger ou boire pour les musulmans qui font le ramadan. Leur routine habituelle est alors chamboulée de manière draconienne : ils doivent manger vers 2 h 30 du matin, avant le lever du soleil, et rompre le jeûne aux environs de 21 h, au coucher du soleil.

Rares sont les musulmans qui jeûnent au Nunavut. Ils préfèrent jeûner selon les durées du jour de l’Ontario, d’après Abdoul Karim, un des fidèles impliqués à la Mosquée d’Iqaluit. « Ils ont trouvé une fatwa qui leur a permis cette démarche », explique-t-il. Une fatwa est définie comme un avis juridique qui est donné à un musulman par un spécialiste de la loi islamique sur une question particulière. Dans le cas des musulmans nunavois, la fatwa concerne la question du jeûne qui devient extrêmement difficile en raison des longues heures de luminosité, précise Abdoul Karim.

Une difficulté supplémentaire 

La durée du jour n’est pas le seul facteur perturbant pour les musulmans du Nunavut : la COVID-19 ne rend pas la tâche facile non plus cette année. En effet, les mesures de confinement en place partout au territoire pour éviter la transmission du virus font en sorte que les musulmans doivent célébrer le ramadan en isolement.

La mosquée d’Iqaluit, Masjid, est fermée depuis le début de la pandémie, mais les musulmans de la région espèrent tout de même se retrouver tous ensemble pour la prière nocturne Tarawih le 14 mai prochain, date à laquelle la crise sanitaire au Nunavut devrait prendre fin.

Si la crise est prolongée, les musulmans du Nunavut devront célébrer le ramadan la mosquée fermée. C’est une nouvelle qui attriste la communauté musulmane, mais qui n’empêche toutefois pas la célébration du mois du jeûne. « Étant donné que, pour les musulmans, Dieu est omniprésent, ils n’ont pas besoin d’intermédiaire comme un imam [personne qui dirige la prière en commun] », explique Abdoul Karim. « La prière à la maison en temps de confinement est donc autant valable qu’à la mosquée. »

« Aussi contradictoire que cela puisse être, ce temps de confinement offre l’occasion de vivre le ramadan de manière plus privée », termine-t-il.

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  • Date de création 1 mai, 2020
  • Dernière mise à jour 5 mai, 2020
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