Le ministre Steve Clark blâmé par le commissaire à l’intégrité

Le ministre des Affaires municipales et du Logement Steve Clark a contrevenu à la Loi sur l’intégrité des députés, a conclu le commissaire à l’intégrité de l’Ontario, David Wake, dans un rapport publié mercredi.


Par Émilie Gougeon-Pelletier, IJL - Réseau.Presse - Le Droit

Le ministre n’a pas posé assez de questions à son personnel et a «omis de superviser le processus de sélection des terrains de la ceinture de verdure à des fins d’aménagement», affirme le commissaire Wake.

Ce dernier soutient dans son rapport d’enquête que les omissions de Steve Clark ont «eu pour effet de favoriser indûment les intérêts privés de certains promoteurs immobiliers».

David Wake recommande à l’Assemblée législative de l’Ontario «de réprimander le ministre Clark pour son non-respect de la Loi».

Il avait ouvert une enquête après que la cheffe de l’opposition officielle Marit Stiles lui en ait fait la demande, en décembre 2022.

L’Ontario a créé la Ceinture de verdure en 2005 pour protéger des terres écosensibles et les épargner du développement immobilier et commercial.

En 2022, le gouvernement progressiste-conservateur de Doug Ford a retiré près de 3000 acres de ces terres pour y construire 50 000 logements et les a remplacés ailleurs.

Pourtant, les progressistes-conservateurs avaient assuré depuis 2018 qu’ils ne toucheraient jamais à ces terres.

«Il peut sembler incroyable que le ministre Clark ait choisi de faire l’autruche au sujet d’une initiative aussi importante entreprise par son ministère, mais je crois que c’est exactement ce qu’il a fait», estime le commissaire à l’intégrité.

Manœuvres malhonnêtes

Durant l’enquête du commissaire, 62 personnes ont témoigné et plus de 2300 documents ont été examinés.

«Les éléments de preuve dépeignent un processus marqué par des interprétations erronées, une précipitation inutile et des manœuvres malhonnêtes», soutient David Wake.

Au centre de l’histoire, le chef de cabinet du ministre Clark, Ryan Amato, a démissionné plus tôt ce mois-ci après avoir été pointé du doigt, sans être nommé, par la vérificatrice générale de l’Ontario dans son rapport publié le 9 août.

Elle aussi a fait enquête sur les circonstances entourant les échanges de terres sur la Ceinture de verdure entre le gouvernement ontarien et certains promoteurs immobiliers.

Ryan Amato a dirigé une petite équipe de fonctionnaires qui a proposé au ministre Clark, en octobre 2022, de retirer 15 propriétés de la ceinture de verdure pour y permettre le développement. Parmi ces sites, 14 ont été choisies par l’ex chef de cabinet Amato.

La preuve amassée par M. Wake indique que «M. Amato a conseillé au ministre Clark de ‘le laisser faire’ alors qu’il s’engageait dans un processus chaotique et presque irréfléchi qui, selon [le commissaire], a abouti à une décision opaque et mal informée qui a ouvert la porte à la promotion inappropriée des intérêts privés de certains promoteurs».

Les fonctionnaires membres de la petite équipe pensaient que les directives qu’ils recevaient du chef de cabinet provenaient du ministre et du cabinet du premier ministre, «mais, de son propre aveu et de celui d’autres témoins, M. Amato travaillait en grande partie seul et sans supervision», apprend-on.

Le rapport indique que même si les promoteurs n’avaient pas nécessairement été informés d’une potentielle ouverture de la Ceinture de verdure, «l’enthousiasme» de Ryan Amato à l’obtention de plus d’informations de la part des promoteurs sur leurs terrains était suffisant pour laisser penser qu’une telle opportunité était imminente.

Depuis le début de la controverse, le ministre Clark et le premier ministre Doug Ford martèlent qu’ils n’étaient pas au courant des discussions tenues au sein de leurs cabinets à ce sujet.

«Quoi qu’il en soit, il incombe au ministre de superviser son personnel. Les députés ne peuvent pas se soustraire à la responsabilité prévue par la Loi lorsque, par négligence ou inattention, ils ne supervisent pas des politiques ou des décisions importantes de leur bureau.»

Steve Clark reste en poste

Malgré la sortie du commissaire à l’intégrité et les appels répétés des partis d’opposition et des communautés de Premières Nations à la démission de Steve Clark en tant que ministre des Affaires municipales et du Logement, il restera en poste.

«Le ministre Clark continuera de s’efforcer de tenir notre promesse de construire au moins 1,5 million de logements et de veiller à ce que la confiance du public soit maintenue à chaque étape du processus», peut-on lire dans une déclaration du bureau de M. Ford, envoyée après aux médias la publication du rapport de David Wake.

«Nous avons reconnu les domaines dans lesquels nous devons nous améliorer ; le commissaire à l’intégrité l’a réitéré aujourd’hui, et nous continuerons de travailler pour renforcer le processus à l’avenir», a fait savoir le bureau du premier ministre.

Dans une autre déclaration, le ministre Clark a indiqué qu’il accepte les conclusions du commissaire à l’intégrité.

«Il y avait des failles évidentes dans le processus qui a conduit au rapport d’aujourd’hui. Je suis pleinement déterminé à tenir la promesse de notre gouvernement de construire au moins 1,5 million de logements et je veillerai à ce que le processus se déroule avec intégrité et confiance.»

Rappelons que la Police provinciale de l’Ontario (PPO), qui s’était penchée sur le dossier afin de déterminer si une enquête était nécessaire, a confié l’affaire à la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

La police fédérale n’a pas encore déterminé si une enquête criminelle sera effectuée ou non.

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  • Date de création 30 août, 2023
  • Dernière mise à jour 30 août, 2023
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