Lancement d’un nouveau programme en droit autochtone à l’Université d’Ottawa

La Section de droit civil de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa a récemment lancé le premier programme de Certificat en droit autochtone en français au Canada. L’établissement scolaire multiplie les efforts afin d’intégrer les réalités autochtones dans son offre d’enseignement.
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Karine Lavoie
IJL – Réseau.Presse – Le Nunavoix

Le lancement officiel du Certificat en droit autochtone de l’Université d’Ottawa s’est tenu le 17 aout dernier alors que ses premiers étudiants, qui sont désireux d’être des ambassadeurs du droit autochtone, ont été présentés.

Le programme qui s’adresse aux apprenants autochtones parlant français permet de s’initier aux systèmes juridiques de différents peuples autochtones et de les comparer aux systèmes étatiques du Québec et du Canada dans certains domaines clés.

La première cohorte d’étudiants du programme se compose d’une vingtaine d’apprenants, ce qui représente un niveau de participation au-delà des attentes de l’établissement avec le peu de temps disponible pour en faire la promotion. D’une durée d’un an, l’enseignement de ce Certificat se déroule sur le territoire, en présentiel et en ligne.

Un programme reflétant la culture autochtone

Ayant cessé en 2005, le programme de pré-droit de l’Université d’Ottawa se donnait comme objectif de préparer les étudiants autochtones vers les études à la licence en droit. Eva Ottawa, professeure adjointe à la section de droit civil de l’Université d’Ottawa a elle-même suivi ce cours en 1999.

C’est à la demande de la doyenne de l’Université il y a deux ans qu’Eva Ottawa a collaboré avec Sophie Thériault, professeure et vice-doyenne aux études à la Section de droit civil, à la révision de ce programme.

L’objectif était de trouver une manière d’accueillir les apprenants autochtones d’une façon qui reflétait leur culture. « C’était vraiment de partir des ordres juridiques autochtones, de leur monde. Le droit, on a une façon différente de le voir. On n’a pas de terme dans notre langue, généralement en langue autochtone, pour dire "droit", mais on a quand même une façon de le voir; de le concevoir », explique Eva Ottawa, qui spécifie l’importance de la tradition orale dans la transmission des savoirs.

Plusieurs domaines du droit seront abordés au cours de l’année, dont les ordres juridiques autochtones et le droit de la famille, le droit constitutionnel, le droit criminel, le droit foncier, le leadeurship et la gestion de conflit.

L’enseignement est inspiré de l’approche pédagogique autochtone. Les apprenants, dont l’âge varie de la mi-vingtaine à 70 ans, ont d’abord assisté à un cours obligatoire introductif en présentiel au Domaine Notcimik, un site culturel lié à la nation atikamekw. Pour l’occasion, deux ainés étaient présents afin de transmettre leurs connaissances et bonifier l’enseignement.

Dans le cadre de ce cours, le droit naturel a par exemple été abordé en observant la nature. « Chez les Atikamekw, comme chez les Anishnaabe et d’autres Premières Nations, il y a six saisons. À travers les six saisons, il y a beaucoup d’interactions; on observe la nature et l’interaction entre les différents animaux. On tire des enseignements ou des principes juridiques à travers ces éléments », relate Eva Ottawa.

Selon Eva Ottawa, qui est la seule enseignante autochtone en droit civil à l’Université d’Ottawa, le lancement du Certificat en droit autochtone est un pas énorme concernant les appels à l’action encourageant la revitalisation et la valorisation des traditions juridiques autochtones. « On va certainement continuer à travailler pour continuer dans la lancée », déclare-t-elle.

L’enseignement du droit chez les Nunavummiut

Comptant environ 650 étudiants autochtones entre ses murs, l’Université d’Ottawa possède un Plan d’Action autochtone et un Institut de recherche et d’études autochtones. Un travail est réalisé afin d’intégrer la réalité autochtone à travers l’enseignement prodigué. Des professeurs et des ressources autochtones sont également à l’emploi de l’Université.

Bien qu’aucun Nunavummiuq ne soit inscrit au Certificat en droit autochtone, Eva Ottawa souhaiterait que les Inuits soient davantage représentés dans l’établissement dans le futur. Elle souligne à cet effet que des approches ont été réalisées auprès d’un professeur inuit afin qu’il vienne enseigner à l’Université d’Ottawa. « On serait vraiment honoré et enchanté d’avoir des apprenants inuits. Justement, on veut donner la place pour aborder les ordres juridiques autochtones et même inuits », affirme-t-elle.

En collaboration avec l’Université de la Saskatchewan, le Collège de l’Arctique du Nunavut (NAC) offre, pour sa part, un programme de droit de manière sporadique. Celui-ci n’est disponible que pour les résidents du Nunavut et aux étudiants majoritairement inuits. Alors que la récente cohorte vient d’obtenir son diplôme en 2021, le programme n’est actuellement pas offert au Collège.

« Le principal avantage du programme du NAC lorsqu’il est offert est que les étudiants du Nunavut peuvent apprendre sur place à Iqaluit et rester sur le territoire. L’accent est mis sur l’Inuit Qaujimajatuqangit, les questions autochtones et inuites et les systèmes politiques et judiciaires du Nunavut, tout en obtenant un diplôme de droit canadien accrédité », affirme le département des communications du Collège de l’Arctique du Nunavut.

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Photo 1
Crédit : Courtoisie Bonnie Findlay, Université d’Ottawa
Légende
La première cohorte d'étudiants; incluant la doyenne Marie-Eve Sylvestre (en bleu) et vice-doyenne Sophie Thériault (assise en première rangée à gauche).

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  • Date de création 2 septembre, 2022
  • Dernière mise à jour 7 septembre, 2022
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