Laboratoires vivants : pour des pratiques agricoles plus vertes à l'Î.-P.-É.
Le projet «Laboratoires vivants» qui réunit fermiers, scientifiques et associations entame sa deuxième saison. Les quatorze fermes partenaires expérimentent des pratiques agricoles plus durables pour améliorer la santé des sols et la qualité de l’eau à l’Île-du-Prince-Édouard).
____________
Marine Ernoult
Initiative de journalisme local – APF – Atlantique
Dans les champs de l’Î.-P.-É., scientifiques, fermiers et associations de protection de l’environnement sont à pied d’oeuvre pour la deuxième saison du projet Laboratoires vivants, financé par le gouvernement fédéral. Ils récoltent les derniers échantillons de tubercules et tissus végétaux à destination de vingt équipes de spécialistes. En cette mi-octobre, la collecte touche à sa fin. «Il faudra attendre pour avoir des résultats définitifs, on aura seulement les premières tendances d’ici quelques mois», prévient Judith Nyiraneza, codirectrice scientifique du projet.
Lancé en août 2019, Laboratoires vivants est une première au pays. Quatorze fermiers se sont portés volontaires et ont mis à disposition certaines de leurs parcelles pour expérimenter des pratiques agricoles novatrices. Parmi eux, Matt Ramsay, propriétaire de la ferme Oyster Cove à Hamilton, qui produit notamment des pommes de terre, du soja et des céréales. «Ça va nous fournir beaucoup de données que nous n’avions pas auparavant car on est toujours limité par nos petits budgets», se réjouit l’agriculteur dont 15 % des terres sont certifiées bio. L’objectif du programme de recherche est triple : améliorer la santé des sols et la qualité de l’eau tout en maintenant la productivité des exploitations. «Les rendements sont stables dans la province depuis huit ou dix ans mais les récoltes sont difficiles pour de nombreux producteurs à cause des intempéries», constate Ryan Barrett, coordonnateur de la recherche au Potato Board.
Couvert végétal pour protéger les sols
Les agriculteurs prennent de plus en plus conscience de l’importance de protéger leurs terres. Le sol sablonneux de l’Île est en effet fragile. «On est très inquiet car on n’a pas assez d’arbres, et l’hiver, le vent, la pluie et les tempêtes de neige érodent les champs qui sont à nu, reconnaît Matt Ramsay. La seule chose qui peut nous aider, ce sont des sols plus résistants avec des taux de matière organique élevés, qui retiennent mieux l’humidité.» Johanna Kelly, directrice de l’ONG Kensington North Watersheds, également partenaire du projet, confirme : «Si les sols ne sont pas en bonne santé, les fermiers ont besoin de plus d’intrants pour s’assurer une bonne récolte, il y a plus de ruissellement et donc plus de pollution dans les cours d’eau.»
Les acteurs interrogés sont unanimes : la période où les parcelles sont exposées aux intempéries doit être réduite au maximum. L’une des solutions, ce sont les cultures de couverture, plantées à l’automne ou au printemps. «Certaines sont pérennes, semées pour plusieurs années, elles maintiennent le sol en place grâce à leurs racines et augmentent la matière organique», explique Johanna Kelly. «Cela présente un bénéfice écologique, mais cela profite aussi à l’agriculteur, qui a des cultures plus productives et plus résistantes aux maladies», poursuit-elle.
Aspect économique
Matt Ramsay n’a pas attendu Laboratoires vivants pour modifier ses pratiques. «On essaie des choses depuis des années, mais les scientifiques sont maintenant avec nous sur le terrain pour répondre à nos questions», apprécie-t-il. Les équipes testent un large panel de techniques comme la rotation des cultures, la gestion efficiente des herbicides ou l’irrigation. Le coût financier supporté par les agriculteurs est également pris en compte. «Ces pratiques ne se font pas à peu de frais, elles requièrent beaucoup de travail en plus, admet Johanna Kelly. C’est normal que le fermier veuille savoir ce que ça lui rapporte en termes de rendement.»
Depuis un peu plus d’un an, les quatorze partenaires travaillent main dans la main. Ils tentent de surmonter les barrières auxquelles font face les fermiers dans la mise en place de pratiques agricoles plus durables. «Nous impliquons les agriculteurs au maximum pour qu’ils soient nos ambassadeurs», assure Judith Nyiraneza. «On a de très bonnes relations, on construit la confiance. Plus on avance dans le projet, plus on se parle», ajoute Johanna Kelly. Le projet, qui devait initialement s’achever en 2022, sera probablement prolongé.
-30-
PHOTOS : (incluant titre de la photo, légende et crédit du photographe ou courtoisie)
Johanna Kelly : Pour Johanna Kelly de Kensington North Watersheds, les pratiques agricoles expérimentées dans le cadre du projet Laboratoires vivants, «présentent un bénéfice écologique mais profitent aussi à l’agriculteur qui a des cultures plus productives et plus résistantes aux maladies». (Courtoisie)
Judith Nyiraneza : «Nous impliquons les agriculteurs au maximum pour qu’ils soient nos ambassadeurs», explique Judith Nyiraneza, codirectrice scientifique du projet. (Courtoisie)
- Nombre de fichiers 3
- Date de création 16 octobre, 2020
- Dernière mise à jour 16 octobre, 2020