La FPFTNL tente de rebâtir les ponts

En plus d’une réussite de plusieurs projets pilotés par la Fédération des parents francophones de Terre-Neuve et du Labrador soulignée lors de son assemblée générale annuelle, l’organisme essaie toujours de «rebâtir des ponts» avec des organismes francophones.

Cody Broderick

IJL - Réseau.Presse - Le Gaboteur

Le 29 novembre dernier, des parents des quatre coins de la province se sont rencontrés sur le Web afin de participer à la 34e assemblée générale annuelle (AGA) de la Fédération des parents francophones de Terre-Neuve et du Labrador (FPFTNL).

Élu au conseil d’administration l’année dernière, le président, Richard Deveau, a pu très rapidement découvrir de première main les succès et les défis de l’organisme au cours de l'année financière écoulée. «C’était une belle année», résume-t-il dans son rapport. «J’ai vraiment apprécié [être dans] ce rôle mais c’était quand même une année difficile.»

Avec une excédent d’environ 14 000$ à la fin mars dernier, Martine Fillion, directrice générale de l’organisme, donne un aperçu du travail accompli au cours de l’année: développement professionnel des parents et enseignants, des services de prématernelle et parascolaires ainsi que le service de francisation familiale, qui a eu «le plus de difficulté à redémarrer» à cause de la pandémie. «Cette année, 2022-2023, les familles sont plus ouvertes à nous accueillir dans leur maison», explique-t-elle en affirmant que la FPFTNL a adapté les formations aux particularités du service et a renouvelé sa documentation pour renforcer le volet sur la santé et la sécurité.

En plus de ces services, la FPFTNL a également accompagné cinq familles dans le soutien des enfants ayant des besoins particuliers en offrant de l’expertise professionnelle en ergothérapie, orthophonie et psychologie.

Les fossés et ses ponts à rebâtir

Au cours de sa première année à titre de président, Richard Deveau a passé beaucoup du temps sur le terrain. Ses objectifs étaient doubles, explique-t-il: «Un, pour me présenter en tant que nouveau président de la Fédération des parents, et aussi, pour essayer de rebâtir des ponts entre notre organisme et d’autres organismes.»

En février dernier, avec la directrice générale, Martine Fillion, monsieur Deveau s’est rendu à Ottawa pour rencontrer la Commission nationale des parents francophones (CNPF) et d’autres associations et fédérations des parents du pays. L’immigration et les statistiques sur les ayants droits à l’éducation en langue minoritaire ont dominé les discussions. Actuellement, l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés qui établit les Droits à l'instruction dans la langue de la minorité ne s'applique qu'aux citoyens canadiens, mais la Fédération espère voir une évolution pour y inclure les nouveaux arrivants.

«Plus on a d’ayants droits dans nos écoles [francophones], effectivement rendrait les services et l’éducation que reçoivent nos enfants encore mieux», explique le président. «C’est quand même assez important de savoir combien il y a d’ayants droits dans chaque région. [Il est également important d’évaluer] ce qu’on peut faire pour aller chercher d’autres [élèves et] créer de nouveaux ayants droits.»

Pour faire face à ces défis, la FPFTNL comptait organiser un projet d’accueil pour les nouveaux arrivants d’expression française à Terre-Neuve-et-Labrador, avec le COMPAS, service d’accueil francophone de la Fédération des Francophones de Terre-Neuve et du Labrador (FFTNL), comme collaborateur potentiel. Si les deux organismes avaient tous deux et la FPFTNL avait quant à elle réservé une partie de la subvention de 50 000$ pour le COMPAS, le directeur de la FFTNL aurait finalement refusé de s'engager plus loin dans cette collaboration.

Une correspondance s'est ensuite faite par courriel avec la présidente de l'organisation de l'époque, Sophie Thibodeau, pour trouver une manière de collaborer. «J'ai jamais reçu de réponse ou accusé de réception», témoigne monsieur Deveau. Le Gaboteur a tenté de contacter la FFTNL pour obtenir plus de renseignements, mais n'a pas reçu de réponse au moment d’écrire ces lignes.

Si ce manque de collaboration s'est révélé être un enjeu majeur pour le FPFTNL, l'année dernière, un fossé plus profond s’est creusé entre ces deux organismes. Pendant une rencontre avec des représentants de Patrimoine Canada pour parler du mandat de la FPFTNL, son financement et ses perspectives d’avenir, le président a pris connaissance d’une nouvelle qu’il n’a «pas trop aimée»: dans une lettre destinée au ministre d’Éducation de Terre-Neuve-et-Labrador, la FFTNL aurait remis en question le financement de la FPFTNL et aurait suggéré que l’organisme n'appuie pas tous les programmes et les services pour lesquels il reçoit des fonds. La FPFTNL n’a pas encore lu la lettre, mais son président a un mauvais pressentiment: «il nous semble à ce point-ci que la FFTNL travaille contre nous autres». «Ce ne sont pas de bonnes nouvelles», résume-t-il.

Suite à sa visite à Ottawa, le président a passé son temps à organiser «beaucoup de réunions et beaucoup de rencontres» avec les membres de l’organisme et avec ses partenaires, comme le nouveau service postsecondaire de la FFTNL, le Conseil scolaire francophone provincial et FrancoQueer, organisme dédié à l’inclusion des personnes de diversité sexuelle et genres.

Avec la création d’un nouveau consortium sur la possibilité d’avoir des programmes postsecondaires en français dans la province, consortium comprenant des organismes dédiés à la langue de Molière, monsieur Deveau annonce avoir fait une demande pour y participer. «Encore une fois, on a été refusé», dit-il, car il n'y a pas eu d'enjeu lié aux ayants droits. «Ce n’était pas nécessaire d’avoir une fédération qui représentait les parents, bien que l’association Canadian Parents for French, elle, y siégeait», regrette le président.

Au mois de mai, une deuxième réunion s’est tenue à St. John’s avec la CNPF et les onze associations et fédérations des parents du pays. Un des grands sujets abordés lors de la rencontre était le rôle des parents dans le recrutement et la rétention des enseignants. «En tant que parents, ou Fédération des parents, est-ce qu’on a un rôle à jouer là-dedans?» demandait alors le président. Citant la pénurie d’enseignants à Happy Valley-Goose Bay, il a défendu l’idée selon laquelle «ça tombe un petit peu sur les parents ou les gens de la communauté d’accueillir ces enseignants là.» Aucune conclusion précise n'a encore été tirée de ces discussions, mais Le Gaboteur suivra ce dossier avec attention au cours des prochains mois.

En plus d’une collaboration étroite avec la CNPF, la FPFTNL a collaboré avec ses confrères des provinces maritimes pour créer l’Association atlantique en éducation à la petite enfance, qui offrira bientôt des ateliers et du mentorat tout en luttant contre l’isolement.

Cette année, le président poursuit sa mission initiale de reconstruction des liens, «mais avec ceux qui le souhaitent», souligne-t-il. «Ceux qui ne veulent pas travailler avec nous, au lieu de travailler avec eux, on va passer à autres choses.»

«La meilleure analogie to bring that point home, c’est l’idée de la maman ours, right? [...] Un parent peut être très gentil, on cherche toujours le mieux pour nos enfants puis on travaille avec d’autres parents pour le mieux et le bien être de nos enfants, mais si vous commencez à travailler à l'encontre de nos enfants - là, faites attention.»

Nouveaux membres et les parents à l’honneur

Le président termine son rapport en soulignant une augmentation de membres et la résurgence du comité de parents de St. John’s. Avec le siège du CSFP et d’autres organismes francophones dans la capitale, il est important pour l’organisme d’y avoir une voix forte, explique monsieur Deveau. «Je suis fier qu’on ait quelques nouveaux représentants de [St. John’s] ici ce soir puis on va continuer à foncer dans cette direction», dit-il.

Au cours de la prochaine année, l’organisme espère attirer plus de membres dont les enfants fréquentent une école anglophone. «On travaille avec le Conseil scolaire [francophone provincial], mais c’est à nous autres de pousser le conseil scolaire un petit peu», explique le président. «S’il y a des raisons pour que les parents sortent leurs enfants des écoles francophones, je pense que c’est important de les ramener à notre table pour qu’on puisse les entendre puis ensuite être leur voix au conseil scolaire et au sein de la communauté francophone.»

Martine Fillion ajoute que, comme «pour la majorité des organismes», la rétention et recrutement des bénévoles pose un défi pour la FPFTNL. Une réunion est prévue ce mois-ci pour réfléchir à des stratégies de recrutement. À cet égard, elle cite une nouvelle plateforme d'outils, de formations et d'ateliers dans la gestion de ses services pour ses parents bénévoles.

Par ailleurs, les parents bénévoles de la FPFTNL ont été honorés par le Prix national Ghislaine Pilon du CNPF, pour tout le travail accompli depuis 1989 pour le développement de la francophonie et l’éducation en français de la petite enfance. Ce prix est décerné annuellement à un individu ou organisme pour souligner l’avancement de la cause des parents francophones au niveau local, provincial, territorial ou national.

La directrice félicite les parents bénévoles pour leur travail acharné: «Que vous agissiez seul ou en collaboration avec des organismes, des gouvernements et des écoles, vous comprenez les besoins et saisissez les enjeux de vos milieux, vous êtes la bougie d’allumage de votre communauté!»

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  • Date de création 17 décembre, 2023
  • Dernière mise à jour 14 décembre, 2023
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