Julian Doucet fait entendre sa voix

Par Émilie Gougeon-Pelletier, IJL - Réseau.Presse - Le Droit|14 juillet 2023

Les résidents d’Ottawa connaissent bien la voix de Julian Doucet. Et maintenant, les abonnés d’Amazon Prime aussi.

C’est l’histoire de Justin qui, de retour de l’étranger à la suite d’une rupture avec son conjoint de longue date, tente de reconnecter avec sa fille adolescente, confiée en adoption à la naissance lorsqu’il venait tout juste de terminer le secondaire et qu’il n’était pas encore sorti du placard.

Mais cette histoire, c’est aussi celle de Julian Doucet, le créateur de «The Lake», la première série canadienne originale d’Amazon Prime.

Originaire d’Ottawa, Julian Doucet est comédien, auteur et producteur.

La voix bilingue que l’on entend dans les autobus et le train léger de la Ville d’Ottawa, c’est la sienne.

Et cette voix, il a décidé de l’utiliser sous une forme complètement différente en créant The Lake. «La première saison est beaucoup plus axée sur mon parcours, et la deuxième, un peu moins», note-t-il.

«Pas de ‘road map’»

Julian et Justin ont en commun les thèmes principaux abordés dans cette série. «La question d’adoption, c’est mon histoire.»

Dans la fiction, Justin revient d’Australie, où il a vécu pendant 15 ans. Il ne connaît pas beaucoup sa fille.

En réalité, alors qu’il était à l’école de théâtre, à Toronto, Julian Doucet a eu un enfant avec sa blonde. «C’était une adoption ouverte, on a choisi les parents ensemble», affirme-t-il.

Contrairement à Justin, l’auteur de la série connait sa fille depuis qu’elle est toute jeune. «On lui faisait des cadeaux, on faisait des activités ensemble. On se voyait deux fois par année. Mais elle avait sa vie, ses amis, elle était ado. […] Quand elle avait 15 ans, ses parents m’ont laissé l’accompagner en voyage. On est allé à Paris. Et chaque été par la suite, on a passé une semaine ensemble à l’été.»

Et cette relation singulière n’en est pas une qui a souvent été abordée à la télévision. «Cette dynamique-là, de s’apprivoiser, d’apprendre à se connaître, je n’ai jamais vu ça à l’écran. On ne savait pas vraiment comment agir ensemble. Est-ce qu’on avait plus une relation de frère et soeur? De papa et fille?»

Il admet avoir mis beaucoup de temps à écrire cette série. «Même si ce n’est pas exactement notre histoire, tous les sentiments sont vrais. Les questions que se posent les protagonistes sont vraies. Il n’y a pas de ‘road map’ pour savoir comment naviguer ces relations-là. Je voulais être fidèle à la vérité de ces émotions», souligne-t-il.

Le créateur de The Lake remarque que son personnage principal lui ressemble… à quelques différences notoires près. «Il a moins de honte que moi, il s’assume beaucoup plus à son âge que moi à cet âge. J’ai fait mon coming out alors que j’étais beaucoup plus vieux que lui. Je suis de la génération qui a vu la crise du sida. On partage beaucoup d’anxiété aussi, lui et moi. Mais je pense qu’où on se ressemble le plus, c’est lorsqu’on tombe. Quand on est à terre, on se relève et on se relance. Mon super pouvoir dans ma vie, c’est d’avoir pu me dire: ‘OK, ça n’a pas marché? Je me relève, je me relance. J’essaie à nouveau.’ Et bien sûr, Justin est beaucoup plus imbus de lui-même que moi», rigole-t-il.

Tournée à North Bay, en Ontario, la série met en lumière des histoires certes peu communes, mais auxquelles sont intégrés des personnages familiers et des références humoristiques bien de chez nous. «Prime Canada, ils voulaient vraiment une série hyper canadienne autour d’un lac pour leur première au pays, alors on a décidé d’y aller à fond. C’est certain que quand on a créé l’univers, on voulait des blagues pour tout le monde, mais aussi des blagues pour nous. Et on veut se moquer de nous-mêmes un peu, mais nous célébrer, aussi.»

Faire rouler l’économie locale

Le premier épisode est sorti en 2022, une année particulièrement lucrative pour l’industrie du cinéma et de la télévision en Ontario.

En 2022, cette industrie a engendré des retombées économiques de 3,5 milliards de dollars dans la province.

«Si on fait tellement de sous, pourquoi notre sort n’a-t-il pas changé?», se demande Julian Doucet.

«On est super fiers de pouvoir contribuer à l’économie de North Bay, mais on le serait encore plus si ça se distribuait plus à travers les artistes, les auteurs, les gens qui travaillent sur les plateaux. On voit qu’il y a un appétit, mais ça aiderait si on était capable d’être payés comme il se doit. […] Nos salaires sont demeurés assez figés au cours des dix dernières années», déplore-t-il.

Il souligne que lorsqu’il est question des plateformes de «streaming», le concept de redevances devient encore plus pertinent.

D’ici là, l’équipe de production se croise les doigts quant à la possibilité d’une troisième saison, affirme le créateur de la série.

Tout dépendra des chiffres.

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  • Date de création 17 juillet, 2023
  • Dernière mise à jour 17 juillet, 2023
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