Indépendance guinéenne, la francophonie demeure

Samedi 7 octobre dernier, l’Association guinéenne de Calgary et les membres de sa diaspora ont fêté en grand le 65eanniversaire de l’indépendance de leur pays. Ils étaient plus de deux cents à partager une soirée riche en surprises dans le sud de la métropole albertaine.

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Arnaud Barbet

IJL-RÉSEAU.PRESSE-LE FRANCO

«Cela n’a pas été parfait, mais on y est arrivé», estime Ismael Diallo, le président de l’association, avec soulagement. Car, comme il l'explique, de nombreuses familles sont venues accompagnées de leurs enfants et il aurait aimé avoir plus de place pour leur offrir un lieu dédié.

Des enfants qui ont d’ailleurs eu la part belle lors de cette soirée puisqu’ils ont pu défiler dans les habits traditionnels des «quatre Guinées». Un moment très remarqué par le public et notamment par Marie-Thérèse Nickel, la directrice générale de l’ACFA régionale de Calgary, présente pour l’évènement, «les familles et les enfants qui ont défilé, [...] c’était incroyable!»

Ismael décrit avec passion la particularité de son pays d’origine composé de la Basse-Guinée située le long de l’océan, de la Moyenne-Guinée qui comprend le massif du Fouta-Djalon et son point culminant le mont Loura à 1 515 m d’altitude, la Haute-Guinée au milieu de la savane et la Guinée forestière qui, comme son nom l’indique, est parcourue par une zone forestière luxuriante. Il évoque des différences géographiques, mais aussi culturelles et, bien sûr, esthétiques.

Très fier de regarder ces enfants en habits traditionnels, il exprime son attachement à les voir vivre ces instants. «Le meilleur moment, c’est de voir nos enfants s’imprégner de notre culture alors qu’ils sont nés au Canada», explique-t-il en insistant sur cette difficulté à entretenir le lien, un lien essentiel pour l’avenir.

Une indépendance nationale, une langue qui fédère

Si la Guinée a été le premier pays d’Afrique subsaharienne à s’extraire du colonialisme français le 2 octobre 1958, la «langue de Molière» reste, selon Ismael, une fierté pour la plupart des immigrants et natifs du pays aujourd’hui installés en Alberta.

Alors si «l’indépendance représente un jour de célébration de la diversité culturelle, mais aussi la liberté qu’on [le peuple] a prise», c’est aussi une belle façon de rendre hommage à toutes celles et ceux qui se sont battus pour cela. Cela ne l’empêche pas d’assurer que le français est la langue utilisée au quotidien par sa communauté. À la maison, lors de retrouvailles, mais aussi pour des discours plus officiels, le français est omniprésent.

Polyglotte, il tient à ce que ses enfants l’utilisent afin de ne pas rompre le lien avec les anciens. «Mes enfants parlent français aussi pour communiquer avec leurs grands-parents, c’est la seule langue qui peut les réunir.» Si lui parle les deux langues officielles du Canada, trois des nombreux dialectes de Guinée (peul, soussou et malinké) et comprend l’arabe, il est conscient de son rôle dans la survie du français en milieu minoritaire et évoque aussi cette «langue romantique» comme un atout.

Il a d’ailleurs à cœur de rappeler que cette soirée a réuni de nombreux francophones. «Du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, du Cameroun, du Mali, du Nigéria ou du Rwanda, [...] tout le monde s’est retrouvé», mentionne-t-il. Ismael admet aussi que certaines ethnies ont aujourd’hui tendance à se diriger vers l’anglais, preuve s’il en est que l'équilibre linguistique est fragile.

Et lorqu’il évoque ce besoin «de fédérer autour de la diversité francophone» lors de cette fête, il n’oublie pas de remercier tous les partenaires de la francophonie présents à l’évènement. Marie-Thérèse Nickel insiste, elle aussi, sur l’importance, pour les organismes francophones, de pouvoir accompagner ces communautés qui ne «reçoivent pas de fonds de la part du gouvernement».

Elle explique avec clarté que cet accompagnement des communautés fait entièrement partie du plan d’action de l’ACFA régionale. «Nous devons être acteurs de l’intégration, [...] la francophonie aujourd’hui se rapproche de toutes ces communautés», détaille-t-elle. Selon elle, il faut réellement faire un effort pour communiquer à tous les publics. Il faut aujourd’hui «diffuser l’information at large» afin que la diversité dans son ensemble soit présente lors de tels évènements.

Dans l’ombre de l’inflation

Elle espère aussi que cet accompagnement plus régulier avec les associations qui représentent diverses communautés permettra de faciliter l’accès aux évènements proposés, «il n’est pas donné à toutes les familles de payer 35$ par personne pour participer». Une difficulté aussi évoquée par Ismael Diallo qui voit chaque année des dépenses supplémentaires lors de ces évènements. L’inflation que l’on connait au pays est aussi un facteur inhérent à la survie de ces rassemblements festifs et culturels, exprime-t-il d’un air soucieux.

Marie-Thérèse ne rate jamais la découverte de la gastronomie traditionnelle qui est régulièrement proposée lors de ces regroupements. «Un repas savoureux avec du riz pilaf, des épices, des bananes plantains, des crudités et des beignets… mes préférés», annonce l’épicurienne. Des mets qui, selon Ismael, auraient pu être plus riches si le coût de la vie n’était pas si cher.

Il profite de l’occasion pour remercier tous les bénévoles et les partenaires qui se rendent à chaque fois disponibles pour faire vivre la culture guinéenne et, plus largement, la culture africaine en terres albertaines. «Je donne rendez-vous à toute la communauté francophone l’année prochaine!»

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  • Date de création 19 octobre, 2023
  • Dernière mise à jour 19 octobre, 2023
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