Garder le momentum pour les services aux immigrants francophones

En attendant de voir si la nouvelle cible en immigration francophone du gouvernement fédéral répondra aux attentes, les acteurs en immigration francophone du Canada se préparent pour le renouvèlement des budgets. Plus de services pour l’accueil de réfugiés francophones, meilleur accueil des résidents temporaire, renouvèlement des CFA... Les pistes d’action ne manquent pas et les travailleurs étaient à Sudbury pour en discuter les 14 et 15 septembre.

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Julien Cayouette

IJL – Réseau.Presse – Le Voyageur

 

La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) a rassemblé les 13 réseaux d’immigration francophones (RIF) et les 14 communautés francophones accueillantes (CFA) du pays dans le Nord de l’Ontario pour son forum annuel sur l’immigration francophone. 

Les discussions ont en grande partie porté sur le renouvèlement du financement en 2024-2025 et les cinq années qui suivront. «C’est un moment important pour les groupes pour réfléchir sur ce que l’on a fait, qu’est-ce qu’on a construit comme services, qu’est-ce qui a bien marché, moins bien marché et où on s’en va», dit le directeur général de la FCFA, Alain Dupuis.

Le nombre de services d’établissements francophones est passé de 40 à 80 an cinq ans, rappelle-t-il. Il faut garder le momentum. Sans ignorer la pénurie de logements, il faut aussi se rappeler que plusieurs domaines ont une pénurie de main-d’œuvre, comme les écoles de langue française, les garderies et la santé.

Les CFA seraient un des succès des derniers cinq ans. Les régions désignées, même sans infrastructure d’accueil préalable, on a vu parfois un nombre record  de familles francophones s’établir dans ces communautés, comme à Prince George en Colombie-Britannique qui en a accueilli 30 l’an dernier.

Le gestionnaire du RIF de la Saskatchewan, Ferdinand Bararuzunza, était aussi curieux de savoir si le gouvernement avait pensé à la hausse du cout de la vie dans l'attribution des futures subventions. Question qu’il a posée à une représentante d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) . «Je n’attendais pas de réponse immédiate, mais je sais qu’une voix qui sort finit par se faire entendre.»

Le coordonnateur des services en immigration du Centre de santé communautaire du Grand Sudbury responsable de CFA - Sudbury, Moïse Zahoui, a été heureux de constater que les CFA sont «bien vues» du côté du gouvernement. «On n’a pas de réponse quant à la continuité, mais on a déjà le sentiment de cette bonne nouvelle et on peut espérer quelque chose de positif.»

Plus de réfugiés

«Il y a seulement quatre endroits au pays où on peut accueillir des réfugiés francophones», note le directeur de la FCFA. Il y en à Cornwall, à Winnipeg et deux au Nouveau-Brunswick. «Mais on sait que les réfugiés francophones, ils arrivent partout au pays.»

L’accueil des réfugiés demande des services supplémentaires, comme de l’appui psychologique. Pour qu’une région puisse en accueillir officiellement, ces services doivent être mis en place dans leur langue. 

«Il y a des zones de conflits dans le monde qui sont des zones francophones», comme en Afrique subsaharienne, note Alain Dupuis, qui veut que plus de communautés puissent offrir ces services.

Meilleur accueil des résidents temporaires

Lors de la période de questions avec l’agente d’IRCC, le coordonnateur du Réseau du Nord de l’Ontario pour l’immigration francophone, Thomas Mercier, a rappelé qu’il ne fallait pas plafonner le nombre d’étudiants francophones qui peuvent s’inscrire dans les collèges et universités de langue française au pays. Une demande applaudie par l’assemblée.

Alain Dupuis ajoute en entrevue avec Le Voyageur que l’accueil des résidents temporaires est également une des clés de l’immigration francophone. «On les reçoit comme étudiants internationaux ou avec un permis de travail, ils apprennent à connaitre nos communautés, mais, souvent, ils n’ont pas les services en français parce que ce sont les provinces qui sont responsables de leur accueil.»

Les trouver et les approcher pour qu’ils profitent aussi des services d’accueil pourrait plus facilement les diriger vers la résidence permanente. «La rétention reste un défi. Si les gens ne trouvent pas un emploi ou s’ils ne sont pas bien accueillis, ils vont quitter.»

Le Canada aurait accueilli plus de 230 000 résidents temporaires en 2021-2022, mais le nombre de francophones n’est pas clairement comptabilisé.

Une cible nationale

La cible d’immigration francophone n’était pas très loin dans la tête des organisateurs, mais elle n’était pas à l’ordre du jour puisque le cabinet des ministres est en réflexion et devrait faire une annonce prochainement. La FCFA continue à rappeler que la cible ne peut pas être de moins de 12 % dès la première année, sinon le poids démographique des francophones du Canada continuera à décroitre.

Le directeur général de la FCFA est optimiste, parce que la nouvelle Loi sur les langues officielles (LLO) du Canada exige l’adoption d’une politique «pour rétablir et augmenter le poids démographique des francophones» au Canada au niveau de 1971. «Ça, c’est majeur», insiste-t-il. 

La FCFA demande un minimum de 12 % — un taux déterminé à partir d’une étude publiée en 2022 — dès la première année avec des augmentations annuelles permettant d’en arriver à 20 % en 2026,

Une cible par province

Le doctorant en science politique à l’Université d’Ottawa, Guillaume Deschênes-Thériault, a mené l’étude de la FCFA pour analyser la proportion d’immigrants francophones nécessaire pour stabiliser et augmenter le poids démographique des francophones au pays. Il a présenté les résultats de l’étude pendant le forum. 

Le chercheur note que chaque province devrait également trouver son propre taux. Dans certaines provinces par exemple, une proportion de moins  de 12 % d’immigrants francophones permettrait quand même l’augmentation de leur poids démographique. 

Ailleurs, seulement des pourcentages beaucoup plus élevés que 12 % pemettraient de rétablir les populations.

Dans tous les cas, des plans stratégiques pour chaque province, le leadeurship du fédéral et du financement seront nécessaires pour atteindre les objectifs.

Parler avec des humains

À la fin des deux journées de travail, les participants au forum étaient surtout heureux d’avoir pu rencontrer d’autres personnes qui vivent des défis similaires et en discuter face à face. 

La coordonnatrice de la CFA - Yellownifke, Lisa Boisneault, indique que réfléchir et discuter en groupe «ça donne énormément d’idées. Ce que j’adore voir, c’est qu'on est vraiment très impliqués dans nos postes, dans nos missions.»

Pour le coordonnateur du Réseau en immigration francophone des Territoires du Nord-Ouest depuis le mois d’aout seulement, Aleksandar Kovacevic, ce forum était une chance de recueillir un maximum d'informations. «Pour moi c’est super important de me préparer pour le prochain appel d’offres. Aussi pour le contact humain, c’était très apprécié parce que ça va être plus facile d’appeler quelqu’un en cas de besoin.»

M. Kovacevic a été inspiré par une initiative d’un RIF d’une autre province qui s’est allié avec un organisme anglophone de services aux immigrants pour desservir une communauté éloignée. «Aux T.-N.-O, il y a des communautés où il y a très peu de francophones. Comment assurer une présence? Comment renforcer ces communautés qui ont très peu de membres?»

 

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Le directeur général de la FCFA, Alain Dupuis — Photos : Julien Cayouette

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  • Date de création 20 septembre, 2023
  • Dernière mise à jour 18 septembre, 2023
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