Enseignement religieux : sous conditions

Le Manitoba est une province qui prône la neutralité religieuse au sein de ses écoles publiques. Pourtant, l’accès à l’enseignement religieux peut s’y frayer un chemin, quoiqu’il doive y être encadré. En témoigne l’ordre du jour de la Commission scolaire franco-manitobaine du 21 juin.

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Hugo Beaucamp

IJL – Réseau.Presse – La Liberté

L’enseignement religieux au Manitoba, c’est une vieille histoire d’identité, de langue, de politique et de luttes. L’éducation a fait beaucoup de chemin depuis 1890 et l’abolition des écoles confessionnelles.

Aujourd’hui laïques, certaines des lois qui régissent les établissements publics découlent directement de ce passé conflictuel entre la francophonie et le système éducatif. Ainsi, la Loi sur les écoles publiques, qui encadre ce système non confessionnel, permet malgré tout l’enseignement de la religion, sous certaines conditions.

Plus d’une dizaine d’alinéas sont consacrés à l’enseignement et aux exercices religieux dans les textes de loi mentionnés plus tôt. Ces derniers sont clairs : « L’enseignement religieux peut être dispensé dans une école du Manitoba s’il est autorisé par un règlement de la commission scolaire. »

Pour obtenir la mise en place de ces cours-là, une requête doit donc être formulée auprès de la commission scolaire compétente. Elle doit être signée par « les parents ou tuteurs d’au moins dix enfants fréquentant une école ayant une ou deux salles de classe », ou alors signée par « les parents ou tuteurs d’au moins 25 enfants fréquentant une école ayant au moins trois salles de classe ».

Des demandes fréquentes

À l’ordre du jour de la dernière réunion ordinaire de l’année académique 2022-2023 de la Commission scolaire franco-manitobaine le 21 juin, sous le volet Étude des politiques : Enseignement religieux, les membres de la commission ont adopté en première lecture l’enseignement religieux pour l’École communautaire Réal-Bérard.

En deuxième et en troisième lecture : l’enseignement religieux pour les Écoles régionale Notre-Dame, Saint-Joachim, Lagimodière et Pointe-des-Chênes. Bernard Lesage est président de la Commission scolaire franco-manitobaine (CSFM). Il détaille les étapes qui suivent la réception d’une demande : « La commission passe ensuite un arrêté, et si tout a été fait correctement, nous (la CSFM) devons approuver la demande. »

Les arrêtés doivent ensuite passer en troisième lecture, avant que les cours puissent être mis en place dans les écoles en question. « La pétition doit ensuite être renouvelée tous les ans », ajoute Bernard Lesage.

Au sein de la DSFM, ces demandes sont fréquentes et concernent plutôt les écoles situées au rural. Cela dit, le président de la Commission estime que cela est sûrement dû au fait qu’il existe simplement plus d’écoles élémentaires au rural. Par exemple, des cours de catéchisme sont dispensés au sein de l’École régionale Notre-Dame, à Notre-Dame-de-Lourdes, « depuis le huitième jour », lance le directeur de l’école, Daniel Couture, amusé.

Il a pris la tête de l’École régionale Notre-Dame il y a maintenant deux ans. Il précise que des cours de catéchisme étaient déjà dispensés avant son arrivée. « Ces cours sont offerts à environ
60 de nos 225 élèves. » À Notre-Dame, c’est une enseignante qui s’est portée volontaire pour enseigner le catéchisme bénévolement, « sans conflit avec son emploi du temps », précise Daniel Couture.

En effet, les enseignements religieux peuvent être donnés par un.e laïc.que, de n’importe quelle foi. Josh Watt est le directeur général de la Manitoba School Boards Association (MSBA).

Interrogé à ce sujet, il explique : « Si les parents ayant émis la demande n’identifient pas une figure d’autorité pour l’enseignement, le/la directeur.trice de l’école peut demander à un.e de ses instituteurs.trices s’il ou elle est intéressé.e à le faire bénévolement. Bien sûr, ce dernier peut refuser, auquel cas, les parents n’auront d’autre choix que de désigner quelqu’un qui fasse figure d’autorité. »

Mais les demandes étant récurrentes, « souvent, les écoles ont déjà quelqu’un en place », souligne Bernard Lesage.

Et si ces enseignements se font sur la base du bénévolat, ce n’est pas sans raison. Josh Watt rappelle que l’école publique est laïque, par conséquent, aucun financement n’est attribué à l’enseignement religieux dans les écoles publiques du Manitoba.

Pour tous?

Il est important de préciser que ces cours, une fois mis en place, concernent exclusivement les élèves dont les parents ont exprimé la demande de voir ces enseignements mis en place. Les autres élèves sont bien entendu complètement exemptés de participer à ces cours. La loi mentionne d’ailleurs que l’élève doit être dispensé si les parents en font la demande ou, dans le cas où l’élève serait majeur, s’il en fait lui-même la demande. Si elles sont relativement faciles à faire mettre en place, les classes d’enseignement religieux sont cependant bien encadrées par la loi, qui est restée en phase avec son époque. « Il ne s’agit pas seulement de catéchisme, pointe du doigt Josh Watt. Avec la diversification de la population, la loi a été changée pour promouvoir une définition plus inclusive de la religion. »

Ainsi, si le nombre de signataires est suffisant, les écoles peuvent également enseigner le judaïsme, l’islam ou encore le bouddhisme. Toutes les religions devraient pouvoir être enseignées.

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Photos : 

  • Bernard Lesage est le président de la Commission scolaire franco-manitobaine. +photo : Jonathan Semah
  • Daniel Couture est le directeur de l’École régionale Notre-Dame. + photo : Jonathan Semah
  • Josh Watt est le directeur général de la Manitoba School Boards Association. + photo : Marta Guerrero
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  • Date de création 30 juin, 2023
  • Dernière mise à jour 30 juin, 2023
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