Élections provinciales à l’Î.-P.-É. : large victoire des progressistes-conservateurs

Les progressistes-conservateurs ont remporté 22 des 27 sièges de l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard. Avec trois députés, les libéraux vont former l’opposition officielle, tandis que les verts doivent se contenter de deux sièges. Deux politologues livrent leur analyse.

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Marine Ernoult

IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne

 

 

 

Les progressistes-conservateurs ont remporté une victoire écrasante aux élections provinciales de l’Île-du-Prince-Édouard le 3 avril dernier. Ils ont gagné 22 des 27 sièges à l’Assemblée législative, et tous les ministres sortants ont été réélus.

Le premier ministre Dennis King s’assure ainsi un deuxième mandat, ce dernier largement majoritaire. Les libéraux obtiennent quant à eux trois sièges, et les verts doivent se contenter de deux députés.

Don Desserud, professeur au département de sciences politiques de l’Université de l’Î.-P.-É., explique le succès des progressistes-conservateurs par un «excellent travail de terrain» et une campagne «bien orchestrée».

«Ils ont fait beaucoup de porte-à-porte pour convaincre leurs sympathisants d’aller voter, et leur message “on a fait de notre mieux comme nouveau gouvernement, imaginez ce que l’on aurait fait si on n’avait pas traversé toutes ces crises” a bien fonctionné», analyse le politologue.

«Quand on regarde dans l’histoire de la province, les Prince-Édouardiens donnent au moins deux mandats successifs à un parti, il faut vraiment quelque chose de grave pour qu’ils changent leur vote», ajoute-t-il.

Les libéraux perdent le vote populaire

Aux yeux du politologue Gabriel Arsenault, la gestion de la pandémie de COVID-19 par les progressistes-conservateurs a également joué un rôle décisif.

«C’est le premier scrutin qui suit la crise sanitaire. Les Prince-Édouardiens ont fait savoir qu’ils étaient satisfaits du travail du gouvernement de Dennis King au cœur de la pandémie», observe le professeur à l’École des hautes études publiques de l’Université de Moncton.

Du côté des libéraux, c’est une victoire en demi-teinte. Ils obtiennent trois sièges, soit un de moins qu’à la dissolution de la Chambre. La cheffe Sharon Cameron n’a pas été élue, mais elle a réussi à redonner le titre d’opposition officielle à son parti.

Don Desserud considère que les libéraux ne se sont pas remis de leur défaite de 2019 : «Leur avantage, c’est que tout le monde connaît leur marque, mais ils ne sont pas suffisamment connectés aux électeurs et n’ont pas de ligne claire.»

Le spécialiste rappelle que, élection après élection, le total des votes accordé aux libéraux ne cesse de baisser. En 2019, seulement 29,4 % des citoyens ayant voté leur avaient accordé leur confiance. En 2023, ce pourcentage est tombé à 17,2 %.

Les verts, «jeune parti sans ancrage»

Les rouges récoltent ainsi moins de suffrages exprimés que le Parti vert : ils terminent 4,4 points de pourcentage derrière eux.

«Les libéraux ont eu moins de voix, mais ils en ont eu aux bons endroits, dans leurs bastions. C’est pour cela qu’ils ont un député de plus que les verts», détaille Don Desserud.

Les verts sont désormais le troisième parti de la province. Ils n’ont pas réussi à reproduire l’exploit de 2019, lorsqu’ils s’étaient hissés en deuxième position, devenant ainsi l’opposition officielle pour la première fois de l’histoire.

Le chef des verts, Peter Bevan-Baker, a été réélu à l’issue d’une course serrée. Karla Bernard siègera à ses côtés à l’Assemblée législative. Néanmoins, le parti perd six sièges. Cet échec ne surprend pas Don Desserud et Gabriel Arsenault.

«Les résultats de 2019 constituent plutôt une exception, on assiste à un retour à la normale avec les deux formations traditionnelles en tête, commente Gabriel Arsenault. Les verts sont encore un jeune parti sans ancrage profond.»

«En 2019, les électeurs ont voté vert plus parce qu’ils étaient fatigués des libéraux, moins parce qu’ils adhéraient aux valeurs et à la philosophie du Parti vert», renchérit Don Desserud.

Le politologue relativise toutefois la défaite et assure que le Parti vert a construit une «base électorale solide» : «Les verts ont fini en seconde position dans 18 circonscriptions et ont obtenu deux fois plus de votes qu’en 2015. Ils doivent continuer leur travail de terrain pour élargir leur base et prouver leur crédibilité aux quatre coins de la province», ajoute-t-il.

Abstention record

L’autre enseignement du scrutin, selon Don Desserud, c’est l’abstention record. Seulement 68,5 % des personnes admissibles ont glissé leur bulletin dans l’urne, d’après les données d’Élections Î.-P.-É. Il s’agit du taux de participation le plus bas depuis les années 1960.

«C’est inquiétant, car les Prince-Édouardiens sont connus pour voter en grand nombre, observe Don Desserud. Cette fois-ci, beaucoup ne se sont pas intéressés à des élections qu’ils considéraient comme inutiles. La décision d’avancer le scrutin a aussi eu un impact négatif.»

«Ce n’est pas dramatique. Par rapport au reste du Canada, ça reste un bon chiffre, nuance Gabriel Arsenault. Les gens ne se sont peut-être pas mobilisés, car ils étaient convaincus que les progressistes-conservateurs allaient de toute façon gagner.»

Gabriel Arsenault souligne enfin l’élection d’un Acadien francophone, Gilles Arsenault, dans la circonscription d’Évangéline-Miscouche. En 2017, la Commission de délimitation des circonscriptions électorales a reconnu que ce député doit re-présenter tous les Acadiens et francophones de la province.

 

 

 

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Photos

 

Gabriel Arsenault est professeur à l’École des hautes études publiques de l’Université de Moncton.  (Photo : Courtoisie)

 

Don Desserud est politologue à l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard. (Photo : Courtoisie)

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  • Date de création 17 avril, 2023
  • Dernière mise à jour 17 avril, 2023
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