Dur coup pour le mouvement des femmes en politique

La place des femmes en politique prend un pas de recul à la suite du départ de la mairesse de Gatineau, France Bélisle, confie la présidente de l’organisme Leadership féminin Prescott-Russell (LFPR), Marie-Noëlle Lanthier. Elle espère toutefois que cette démission mettra en lumière le climat politique difficile dans lequel les femmes évoluent, afin que le système change.

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Charles Fontaine

IJL – Réseau.Presse – Le Droit

Marie-Noëlle Lanthier milite depuis plusieurs années dans l’Est ontarien pour l’égalité des femmes en société, notamment une meilleure représentation politique. Elle s’est dite surprise et déçue d’apprendre la démission de la mairesse de Gatineau jeudi matin. Mme Bélisle a entre autres évoqué un environnement malsain au sein du conseil et de l’intimidation d’une part du public. Mme Lanthier y voit des causes qui rebutent les femmes à plonger dans l’arène politique.

«Les femmes s’avancent en politique non pas pour une question de statut, comme certains hommes, mais parce qu’elles sont passionnées et elles veulent changer les choses», explique-t-elle. «Malgré notre volonté à améliorer le sort de notre communauté, à la fin on finit seule. C’est encore plus vrai pour Mme Bélisle qui était indépendante. Elle ne pouvait pas s’appuyer sur un parti pour diffuser ces attaques.»

Depuis 2018, LFPR organise plusieurs conférences et ateliers pour inciter les femmes et les filles de leur région à s’impliquer au sein de leur communauté. En six ans, la représentation des femmes en politique dans Prescott et Russell n’a augmenté que de 4%, pour atteindre un summum historique de 25% des élus, tous paliers confondus.

«Ce qui est loin de la parité», rappelle Mme Lanthier.

Ce départ nuit au mouvement des femmes en politique, qu’elle tente de provoquer dans sa région.

«Elle a été très courageuse dans son point de presse, commente l’ancienne candidate à la mairie de La Nation. Autant que la situation soit déplorable, j’espère que ça permettra de dénoncer ce fléau. S’il y a des gens dans votre famille qui s’amuse à envoyer des injures sur les réseaux sociaux, il est temps de leur parler. Ça freine des femmes et des hommes à évoluer en politique.»

Défis politiques au féminin

Bien que l’intimidation ne provienne que d’une mince part du public, elle affecte grandement les élus, mentionnait le président de l’Union des municipalités du Québec (UMQ), Martin Damphousse, dans Le Droit.

Cette semaine, le maire du canton de Russell, Pierre Leroux, dénonçait justement les injures du public sur les médias sociaux.

Quelque 800 élus municipaux au Québec ont quitté leurs fonctions depuis le dernier scrutin de 2021, rapporte l’UMQ, notamment en raison de propos injurieux. Et ces insultes sont plus violentes envers les femmes, note Marie-Noëlle Lanthier.

«Si tu n’es pas jolie, tu vas te faire massacrer. Si tu es jolie, tu n’es pas intelligente. Il n’y a pas moyen de s’en sortir. On a beau vouloir ignorer ces commentaires, mais à un moment donné, ça nous affecte personnellement. La femme ne se sent plus à sa place», dit Marie-Noëlle Lanthier.

Est-ce que l’inégalité des femmes en société est empirée dans le monde politique ?

«Bien sûr, répond-elle. Pour certains hommes, et même des femmes, la place de la femme n’est pas en politique. La charge mentale est très lourde. Les femmes ne partent pas du même point que les hommes. C’est un plus grand sacrifice pour elle en raison de leurs obligations familiales.»

Les femmes doivent-elles apprendre à encaisser ces coups qui semblent inévitables en politique ?

«Quand une fleur ne fleurit pas, on corrige l’environnement dans lequel la fleur pousse, pas la fleur. Les femmes n’ont pas à s’ajuster à un système qui ne fonctionne pas», dit Marie-Noëlle Lanthier.

Pour expliquer les défis supplémentaires des femmes en politique, elle se réfère notamment à l’émission La Candidate, sur Tou.TV.

«Même si c’est de la fiction, beaucoup d’éléments collent à la réalité des femmes. Elles doivent prendre en considération l’impact sur leurs enfants avant de se lancer. La famille et les tâches domestiques prennent déjà beaucoup de place dans leur vie. Comment feront-elles pour conjuguer le tout?»

«La violence ne devrait jamais faire partie de ton emploi», conclut-elle.

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Photos

La démission de France Bélisle à la mairie de Gatineau représente un pas de recul dans les efforts à attirer des femmes en politique, se désole la présidente de Leadership Prescott-Russell, Marie-Noëlle Lanthier. (Simon Séguin-Bertrand/Le Droit)

Marie-Noëlle Lanthier milite depuis plusieurs années pour que les femmes prennent plus de place dans leur communauté. (Jan Amell Photography)

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  • Date de création 27 février, 2024
  • Dernière mise à jour 27 février, 2024
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