Du local à l’international au local : les balises d’Yvon Poirier

Yvon Poirier de Québec est convaincu que l’économie sociale solidaire, ESS, est la réponse aux problèmes d’équité et de mal distribution des ressources dans le monde.  aAvec l’aide de ses collègues du RIPESS (Réseau intercontinental de promotion de l’économie sociale solidaire), il a réussi à faire en sorte que le concept fasse l’objet d’une résolution adoptée par l’ONU en avril 2023.  Et le travail n’est pas fini. 

 

________________

Marine Ernoult 

IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne

Natif de la région Évangéline, dans le petit village de Cap-Egmont, Yvon Poirier a toujours été attiré par ce qui se passait loin de chez lui.  À 12 ans, il s’est abonné au magazine Times, tout en continuant à écouter les bulletins de nouvelles à la radio familiale.  

«Je me souviens comme si c’était hier du jour où, en 1956, j’ai annoncé à mon père qui venait de revenir de sa journée que la France et l’Angleterre avaient repris le Canal de Suez à l’Égypte.  Je trouvais ça tellement excitant», dit l’homme aujourd’hui âgé de 78 ans, qui habite à Québec.  

Fils de Dosithée Poirier et Alice Gallant, il est reconnaissant à ses parents d’avoir encouragé tous leurs enfants à faire autant d’études qu’ils le pouvaient.  «Mon père avait sa 10e année.  C’était rare pour l’époque. Ma mère avait sa 12e année, ce qui était encore plus rare.  Elle est devenue institutrice et, quand je suis né, c’est comme si j’avais une institutrice pour moi tout seul, et mes frères et sœurs ont aussi eu cette chance que nos parents valorisent l’éducation», dit l’Acadien, qui se considère aujourd’hui citoyen du monde.  

Les souvenirs d’Yvon Poirier dans sa région natale pourraient remplir des pages et des pages de La Voix acadienne.  La ferme de subsistance, le cochon tué l’automne, les pèlerinages annuels à Lennox Island pour la fête de Sainte-Anne (fin juillet), l’école de rang à Cap-Egmont, les assemblées de la SSTA, et le souvenir de son père se rendant à la coop.  

Citoyen du monde 

«C’est certain que la capacité des gens de la région de s’organiser en coopératives pour subvenir à leurs besoins a été pour moi une inspiration.  Mes parents, le besoin de s’entraider pour survivre, tout ça m’a rendu sensible aux réalités de personnes moins favorisées que moi, dans le monde, je dirais même le monde entier», dit celui qui s’est joint à moults délégations et forums internationaux pour promouvoir l’ESS et constater sur place, comment le concept pourrait améliorer les vies.  

Depuis qu’il a pris sa retraite hâtive de son poste d’enseignant au Cégep de Limoilou (Québec) en 1997, Yvon Poirier consacre le plus clair de son temps à promouvoir le concept de l’économie sociale solidaire comme une solution pour, entre autres, donner un nouveau souffle aux Objectifs de développement durable adoptés par l’Organisation des Nations Unies en 2015.  

«Les objectifs de développement durable (ODD) devaient réorienter le développement mondial en fonction des besoins des gens et de la planète d’ici 2030.  On est en 2023 et l’ONU elle-même constate des reculs sur certains des ODDs.  La grande raison c’est que ceux qui auraient l’argent pour financer le changement ne le font pas parce que ce n’est pas payant, de leur point de vue», dit Yvon Poirier.  

2015, année charnière

Alors que le RIPESS travaillait à la promotion de l’ESS depuis 2002, c’est à partir de l’adoption des ODD (Objectifs de développement durable) par l’ONU en 2015 que l’idée d’une résolution sur l’ESS a été plantée.  

Au fil des années, avec des collègues qui ont autant de foi que lui dans le concept de l’ESS, il a consolidé les appuis haut placés pour arriver à ce que des pays comme la France, l’Espagne et le Canada (environ 30 pays) rédigent et coparrainent la résolution A/RES77/281 qui a été adoptée par l’assemblée générale de l’ONU, le 18 avril 2023.  

Le travail n’est pas fini.  Comme le texte de la résolution le suggère, les pays doivent maintenant adhérer à la résolution, développer des politiques et des plans de mise en œuvre.  «Évidemment, on aimerait que le Canada fasse partie de ces pays.  On y travaille.»

ripess.org 

Dans un article qu’il a publié sur le site Web du RIPESS (ripess.org) le jour même de l’adoption de la résolution par l’ONU, le 18 avril 2023, Yvon Poirier disait reconnaître que les défis à relever pour inclure pleinement l’ESS dans tous les aspects du développement visant à atteindre les ODD sont énormes.  

«Nous devrons déployer l’approche de l’ESS là où elle est encore faible, voire inconnue, et renforcer sa capacité là où elle existe déjà. Nous devrons renforcer les organisations et les réseaux. Le défi financier sera énorme, car le système financier mondial dans lequel nous vivons fait tout ce qu’il peut pour limiter le financement au secteur des entreprises traditionnelles», confie-t-il dans cet article.  

Il est convaincu que l’ESS peut permettre de «sortir des centaines de millions de personnes de la pauvreté absolue».  Il préconise l’adoption d’une fiscalité progressive par les gouvernements des pays décrits comme «riches et développés». 

Parmi ses constats : 

  • Les paradis fiscaux doivent être abolis. 
  • Tous les pays doivent adopter des mesures de protection sociale complètes. 
  • L’ESS doit faire partie de l’effort pour sortir de l’économie du carbone. 
  • Les économies locales doivent être renforcées.  
  • L’abolition de la pauvreté n’est pas possible dans un monde où 1 % de la population accapare environ 63 % de la richesse produite en 2021 et 2022. 
  • L’ESS doit être vue comme une approche holistique qui englobe tous les secteurs de la vie économique, comme c’est le cas pour les ODD. Tout est interconnecté.

Lien avec le local 

Le local et l’international sont également interconnectés.  «J’en connais qui agissent seulement à l’international, en oubliant de travailler dans leur propre milieu.  Pour ma part, j’ai été très impliqué dans le mouvement syndical, pour améliorer les conditions de travail de mes collègues et des autres syndiqués.  Et je suis toujours membre de la Caisse d’économie solidaire, la principale coopérative financière québécoise spécialisée en économie sociale et en investissment responsable (IR), qui finance des projets d’économie sociale», rappelle Yvon Poirier.  

Après tout, ce qui est international pour les uns est local pour d’autres.  

Jusqu’en 2014, Yvon Poirier venait chaque année dans sa région natale.  En 2014, sa mère Alice, qui vivait au foyer de soins coopératif Le Chez-Nous, est décédée.  Depuis, Yvon Poirier suit les nouvelles de l’Île entre autres par l’entremise de La Voix acadienne où sa sœur, Éveline Poirier, a travaillé dans sa jeunesse et où son père, Dosithée, a même été vendeur d’annonces.

 

-30-

PHOTOS : (incluant titre de la photo, légende et crédit du photographe ou courtoisie)

 

Yvon Poirier.  (Photo : Gracieuseté)

Le 22 juillet 2022, Yvon Poirier a été invité à agir comme modérateur pour une rencontre sur le rôle de l’ESS dans la réalisation des objectifs de développement durable.  Cette photo se trouve sur ripess.org.   C’est aussi sur ce site que l’on peut en apprendre beaucoup plus sur l’économie sociale solidaire.  

Yvon Poirier aux Nations Unies, le 13 décembre 2022 à l’ONU.  

Le 15 juillet dernier, Le Soleil a publié un article sur Yvon Poirier et la résolution sur l’ESS adoptée par l’ONU.  Yvon Poirier a fait parvenir cette image à Georges Arsenault qui nous l’a transmise.

 

  • Nombre de fichiers 5
  • Date de création 30 juillet, 2023
  • Dernière mise à jour 30 juillet, 2023
error: Contenu protégé, veuillez télécharger l\'article