Des écoles francophones auront droit à une cure de jeunesse

Les conseils scolaires Centre-Nord et FrancoSud ont poussé un soupir de soulagement collectif lors du dévoilement du budget provincial 2023 puisque quatre de leurs écoles bénéficieront de nouvelles infrastructures. Si ces chantiers sont accueillis à bras ouverts, un travail de rattrapage important demeure nécessaire afin que l’ensemble des enfants albertains admissibles à l'instruction en français puissent profiter d’installations modernes.

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Gabrielle Audet-Michaud

IJL-RÉSEAU.PRESSE-LE FRANCO

À Airdrie, un nouvel établissement secondaire était «attendu depuis très longtemps» pour alléger la surpopulation de l’école francophone actuelle qui accueille des élèves de la maternelle à la douzième année depuis son ouverture en 2005. Selon le président du Conseil scolaire FrancoSud, Marco Bergeron, quelques élèves avaient récemment décidé de plier bagage pour intégrer des établissements anglophones «mieux adaptés» à leurs besoins.

«Le problème, c’est que, comme tout le monde occupe la même bâtisse, on ne peut pas offrir les infrastructures normales d’une école secondaire à nos plus vieux», explique Marco Bergeron. Il souligne, entre autres, la petitesse et l’ergonomie inadaptée du gymnase pour recevoir les élèves du secondaire.

Les nouvelles installations de l’école secondaire devraient assurer une meilleure rétention des prochaines cohortes, mais aussi offrir des places supplémentaires à une population francophone grandissante. Rappelons que les données du recensement de 2021 ont dévoilé que la ville d’Airdrie a enregistré la deuxième plus forte croissance démographique de l’Alberta depuis 2016.

Celle-ci a d’ailleurs engendré l’installation d’un nombre important de francophones dans la région au cours des dernières années. «Il ne faut pas oublier qu’on est rendus la troisième ville de la province avec le plus grand nombre d’enfants ayant droit à l’éducation francophone», ajoute Marco Bergeron.

À Lethbridge, un gymnase en attendant plus

À l’école La Vérendrye, c’est le gymnase qui sera agrandi, un projet qui a pris une dizaine d’années avant de se concrétiser. Sauf que le président du Conseil scolaire FrancoSud anticipe qu’une demande de terrain devra également être envoyée au cours des deux prochaines années pour créer une école secondaire.

Un enjeu de surpopulation similaire à celui de l’école à Airdrie est en voie de se dessiner. «À Lethbridge aussi, la communauté francophone continue de grandir et on veut éventuellement avoir une école primaire et une école secondaire à part pour accueillir tous ces élèves dans des infrastructures réfléchies pour leurs groupes d’âge», mentionne Marco Bergeron.

Jumelage de deux écoles à Edmonton

À Edmonton, après plusieurs défis liés à l’acquisition de terrain, le Conseil scolaire Centre-Nord (CSCN) s’est finalement rabattu sur l’idée de jumeler l’école secondaire Michaëlle-Jean à l’école primaire Gabrielle-Roy pour en faire une seule infrastructure sur le terrain actuel de cette dernière. Celle-ci sera démolie dès que le nouveau bâtiment sera sorti de terre. «Pour garder les deux écoles dans la même zone scolaire, ce qui semblait le plus raisonnable, c’était d’arriver avec un projet commun», indique le directeur général du CSCN, Robert Lessard.

Le CSCN en est encore à l’étape de la conceptualisation. Il explique toutefois que le nouvel édifice prendra en compte le caractère distinct des deux écoles. «On a quelques hypothèses sur ce à quoi ça ressemblera. On sait qu’il va y avoir deux entrées différentes et des espaces dédiés. C’est important de faire la distinction pour les élèves, surtout lorsqu’ils arrivent au secondaire», précise le directeur général.

L’infrastructure des deux nouvelles écoles permettra aussi d’accueillir quelques élèves en plus, cela dans un espace «digne du 21e siècle». «On avait des édifices vraiment désuets, construits il y a plus de cinquante ans, c’était évident qu’ils avaient surpassé leur durée de vie et qu’ils n’étaient plus conformes aux normes actuelles», analyse Robert Lessard.

Des besoins criants 

Au nord-est de la province, à Fort McMurray, il faut ajouter l’engagement du gouvernement pour financer la conception de plans architecturaux afin de remplacer l’école Boréal. En effet, celle-ci est aujourd’hui sous-dimensionnée par rapport au nombre d’élèves qui la fréquentent. «On n’a pas assez d’espace pour accueillir nos élèves de la maternelle à la douzième année», mentionne le directeur général du CSCN.

Malgré qu’il se réjouisse des annonces du gouvernement, Robert Lessard rappelle que les besoins en matière d’infrastructures scolaires sont encore «significatifs», particulièrement dans la région urbaine d’Edmonton et dans certaines municipalités rurales où les édifices sont vétustes.

«Je ne veux pas dire que les autres systèmes scolaires de la province n’ont pas de besoins, mais dans notre cas à nous, ça devient limitant pour notre croissance parce que l’accès à l’école francophone n’est pas garanti partout en ce moment, faute d’infrastructures», explique-t-il.

Le directeur général évoque notamment la croissance du CSCN qui se chiffre entre 3 à 5% annuellement depuis 1994, un chiffre «élevé» pour un milieu scolaire. «Et puis si la province continue d’accueillir de nouveaux arrivants francophones, il faut qu’on crée de nouveaux espaces pour ces enfants qui ont, eux aussi, le droit à l’éducation en français», s’exclame Robert Lessard.

Marco Bergeron fait un constat similaire lorsqu’il analyse les infrastructures actuelles du FrancoSud et la demande grandissante dans les régions desservies par son conseil scolaire. «On a beaucoup de projets en attente. On va voir des demandes dans le coin de Chestermere, l’école La Mosaïque à Calgary est déjà pleine donc on doit trouver un nouveau terrain pour ouvrir une nouvelle école dans le nord-est… C’est loin d’être fini», affirme-t-il.

En outre, les deux gestionnaires s’entendent pour dire que le financement «instable» de la province complexifie leur travail de planification à long terme. Par exemple, le budget 2022 ne prévoyait aucune somme pour moderniser ou construire de nouvelles écoles francophones.

«C’est pas compliqué, il faudrait qu’il y ait plus d’argent», résume Robert Lessard. Selon lui, le gouvernement albertain doit améliorer sa constance et injecter des sommes annuelles au sein des conseils scolaires, sans quoi tout le système francophone sera mis en péril.

Un risque d’autant plus important qu'il est dû à ce que le bassin d’élèves albertains ayant droit à l’éducation en français a largement été sous-estimé au cours des dernières années. Les données récoltées par Statistiques Canada révélaient, en novembre 2022, que plus de 67 000 enfants albertains étaient éligibles à l’école en français en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Ces statistiques démontrent «l’écart énorme entre la capacité actuelle de nos écoles francophones et le potentiel de fréquentation», avait alors commenté l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) par voie de communiqué. Une analyse à laquelle Robert Lessard adhère. «Les inscriptions pourraient augmenter et il faut qu’on se prépare à ça», dit-il. «Mais pour acquérir des nouveaux édifices, on a besoin d'argent», souligne-t-il en pesant bien ses mots.

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  • Date de création 24 mars, 2023
  • Dernière mise à jour 24 mars, 2023
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