De la broderie pour changer le statu quo

Sarah Khraishi est membre du groupe Palestine Action YYT depuis novembre dernier. En tant que Terre-Neuvienne née d’un père palestinien, cette cause lui tient à cœur malgré les 7000 kilomètres qui la séparent du conflit.

«À Terre-Neuve, nous pouvons nous sentir éloignés et détachés des problèmes du monde. Et même si cela a quelque chose de réconfortant, ce n'est tout simplement pas vrai: nous sommes tous liés les uns aux autres», dit-elle. Avec la broderie palestinienne à la galerie d'art Eastern Edge, cette artiste tisse de la compréhension dans la distance qui sépare ces deux réalités très différentes.

Le tatreez à la terre-neuvienne

Sarah Khraishi partage avec enthousiasme ses ateliers sur le tatreez, ou la broderie palestinienne, qui ont lieu à Eastern Edge.

Inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO en 2021, le tatreez tire ses origines des régions rurales de la Palestine. Cet forme d’art existe depuis des siècles, transmise oralement d'une génération à l'autre. Les symboles d'oiseaux, d'arbres et de fleurs, comme celles que l'on trouve sur les œuvres de Sarah Khraishi, sont traditionnellement brodés sur les vêtements féminins. Le site Web de l’UNESCO précise que le choix des couleurs et des motifs indique l’identité régionale de la femme, ainsi que son statut marital et économique.

Les ateliers de Eastern Edge sont divisés en deux parties. La première traite de l'histoire de l'art, de son rôle et de son évolution au fil du temps, ainsi que de sa signification pour les Palestiniens d'aujourd'hui. La seconde partie, animée par l’artiste textile Beck MacLeod, consiste à travailler avec le tatreez.

«Enseigner aux gens l'art et la culture de la Palestine est tellement important. Lorsque l'on peut évoquer des siècles de vêtements profondément enracinés dans le territoire, cela témoigne d'un lien durable et de l'ancienneté de ce lien. Le territoire n'était pas vide. On voit leur relation avec le territoire, la façon dont ils s'habillaient et la nourriture qu'ils mangeaient.»

«Il est important de trouver vos compétences et de savoir comment vous pouvez contribuer au groupe. Les événements éducatifs et culturels ne sont pas suffisants en soi, mais ils constituent un moyen de participer au mouvement.» La première classe à Eastern Edge a eu lieu le 5 mars, et la prochaine aura lieu le 26 mars. Si les deux se sont remplies rapidement, elle espère en organiser plus à l’avenir.

Une culture toujours vivante

Les océans peuvent séparer Terre-Neuve-et-Labrador de la Palestine, mais grâce à Internet, de plus en plus de ressources sont à la portée des internautes. Le problème, selon l'artiste, n'est pas nécessairement que les gens ne sont pas conscients de la situation. C’est plutôt la façon dont ils digèrent les informations qu'ils trouvent à ce sujet.

«Prenons l'exemple d'une personne qui reçoit un diagnostic grave», dit-elle. «Il y a des gens qui trouveront tout ce qu'ils peuvent sur la maladie et comprendront tout ce qu'il y a à savoir. D'un autre côté, il y a des personnes qui ne veulent rien savoir et qui ignorent tout. Il s'agit d'un problème systémique beaucoup plus vaste, mais il y a une tendance à ne pas rechercher les informations qui sont pénibles ou inconfortables. C'est très dur et je ne blâme pas les gens pour cela.»

Elle ajoute qu'il est décourageant de constater que seuls certains médias tiennent lieu de références et que seules certaines voix sont considérées comme fiables ou dignes de confiance, ce qui peut être très préjudiciable à la manière dont les discours populaires se déroulent.

Pour changer la trajectoire du discours, l'artiste souhaite rappeler au monde que la culture palestinienne est bien vivante. «Il est facile, au milieu de cette tragédie, de penser que l'identité palestinienne se limite à la souffrance et à l'horreur. Bien qu'il soit important de ne pas détourner le regard, c'est bien plus que cela. Il est humanisant et guérissant pour tout le monde, y compris pour nos alliés, de voir qu'il y a encore de la joie et une culture qui persiste. Elle est toujours belle et vivante.»

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  • Nombre de fichiers 2
  • Date de création 24 mars, 2024
  • Dernière mise à jour 9 avril, 2024
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