Cohortes, masques, distanciation physique : un plan de retour à l’école qui reste à préciser
Dans un peu plus d’un mois, les 19 000 élèves anglophones et les 1100 francophones de l’Île-du-Prince-Édouard retrouveront les bancs de l’école. Les autorités provinciales ont rendu public un plan pour que cette rentrée se fasse dans les meilleures conditions. Il reste très général, chaque école étant chargée de l’affiner selon ses spécificités.
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Laurent Rigaux
Initiative de journalisme local – APF – Atlantique
La rentrée scolaire 2020/21 de l'Île-du-Prince-Édouard repose sur trois principes, selon Brad Trivers : la sécurité des enfants et du personnel, la présence en classe, la semaine complète. «L’apprentissage se fait mieux dans les écoles avec un personnel formé», explique le ministre de l’Éducation.
Des mesures de «bon sens» pour commencer
Le 8 septembre, quelque 20 000 élèves seront de retour dans les 62 écoles de la province (dont 6 francophones). Le 5 août dernier, un plan de 34 pages a été présenté aux médias. Ce document fixe les grands principes du retour en classe. Une bonne partie des annonces sont sans surprise.
La sécurité commencera à la maison. Les parents seront chargés de vérifier quotidiennement l’état de santé de leurs enfants. Toux, fièvre, courbatures, voyage récent en dehors de la bulle Atlantique, c’est eux qui décideront d’envoyer - ou non - les élèves à l’école, sur la base d’un questionnaire précis. «Ce sera leur responsabilité», insiste Brad Trivers. Une ligne de ce questionnaire, «autre symptôme», soulève des questions. La médecin hygiéniste en chef justifie ce choix de ratisser large par la difficulté, parfois, de définir précisément les symptômes chez les plus jeunes. Heather Morrison ajoute : «Quand un enfant est malade, même avant la COVID-19, il ne devrait pas venir à l’école. »
Si un élève ressent des symptômes pendant les heures de classe, il sera isolé immédiatement avec un masque et les parents seront contactés pour venir le chercher. Un suivi sera fait avec ces derniers dans les jours suivants. Si la COVID-19 est suspectée, les parents devront contacter le 8-1-1 pour obtenir un test. Ce processus est le même pour les enseignants. À noter que si un membre du personnel voyage en dehors de la bulle Atlantique et doit s’isoler à son retour, il devra prendre un congé, sans solde.
Les établissements seront désinfectés régulièrement; les enfants devront se laver les mains plusieurs fois par jour et des stations de gel hydroalcoolique seront disposées dans les établissements. Le partage de matériel, notamment sportif, sera minimisé autant que possible.
Des cohortes à géométrie variable
Ces dispositions relèvent du «bon sens» comme l’a répété à plusieurs reprises Brad Trivers. Car le principal bouleversement pour les enfants tient en deux mots : cohortes et masques.
Dans chaque école, des sous-groupes d’élèves, appelés cohortes, seront définis. «Ils seront aussi petits que possible», insiste Brad Trivers. Chaque cohorte aura ses propres heures d’arrivée et de départ, mangera à une heure précise et sera assignée à une zone spécifique de l’école, explique le ministre. En gros, les cohortes ne se croiseront presque pas et auront, dans la mesure du possible, des enseignants dédiés. Si des cours nécessitent la présence de plusieurs cohortes, la musique par exemple, les élèves seront installés à distance les uns des autres.
La taille des cohortes reste à définir, au cas par cas, selon les caractéristiques de chaque école. «Certaines de nos classes sont déjà petites, précise Marise Chapman, directrice par intérim de la Commission scolaire de langue française. Les maternelles et les 1re années à La-Belle-Cloche pourront être regroupées dans une cohorte par exemple. Dans les écoles plus grosses, une cohorte pourra comprendre tous les enfants de la 1re année.» Elle ne donne pas plus de détails pour les écoles francophones, car rien n’est finalisé pour le moment.
Un groupe-témoin de 6 écoles (anglophones) ont déjà publié leurs plans opérationnels afin de servir d’exemple. Les documents en ligne illustrent la complexité du concept. Les 570 élèves de l’école primaire Westwood seront ainsi répartis en 4 super cohortes (rouge, bleu, verte, jaune) dans lesquelles il y aura 3 ou 4 cohortes plus petites.
Concernant les arrivées et les départs, l’échelonnement souhaité par les autorités semble difficile à mettre en oeuvre. À l’école de Montague, tout le monde est invité à venir entre 8 h 20 et 8 h 35 et à se rendre aux entrées assignées à chaque cohorte. Les départs sont prévus, très précisément, entre 15 h 10 et 15 h 14, selon le document.
Un plan flexible, déjà critiqué par l’opposition
Autre changement majeur pour les enfants, le port du masque : tous les élèves devront en avoir un avec eux. Il sera fortement recommandé aux enfants de la 7e à la 12e année de le porter dans les espaces communs, dont les classes. Les plus jeunes pourront aussi le mettre, mais le ministre «n’a pas d’attente irréaliste» sur ce point. Heather Morrison explique que les jeunes enfants sont moins susceptibles de transmettre le virus que les adolescents, mais espère que les élèves l’adopteront et en feront un accessoire de mode. Le personnel sera aussi pourvu en masque et devra le porter à l’intérieur.
Le service d‘autobus restera disponible et les cohortes s’y croiseront. Le port du masque pour tous les élèves et les chauffeurs y sera donc «fortement recommandé». Heather Morrison justifie l’absence d’obligation stricte par la situation épidémiologique actuelle à l’Île, mais prévient que les consignes pourront changer à tout moment, selon l’évolution de la pandémie. Afin d’éviter une surcharge des autobus, les parents seront encouragés à déposer leurs enfants à l’école en voiture (ils ne pourront pas sortir du véhicule). Le ministère recommande aussi aux enfants qui le peuvent de venir à pied ou à vélo.
Nul doute que ces aménagements seront amenés à évoluer Le ministère insiste sur le côté «flexible» du plan, conçu selon les recommandations sanitaires du moment. Le Parti vert n’a pas tardé à réagir, par la voix de Karla Bernard. La députée de Charlottetown-Victoria Park, porte-parole de l’opposition officielle pour l’éducation, dénonce un plan «absolument décevant», qui n’est «rien d’autre qu’une régurgitation des directives du bureau de la médecin hygiéniste en chef».
Tous ces débats sur la sécurité sanitaire en feraient presque oublier le programme solaire. Les enfants rattraperont les manques de l’année dernière. Les mathématiques et l’alphabétisation sont particulièrement concernées, explique Tammy Hubley-Little, directrice de l’enseignement en langue anglaise. Certains sujets de l’année 2020/21 seront étudiés en priorité, au cas où les écoles doivent à nouveau fermer .
Enfin, du personnel supplémentaire est prévu pour réussir cette rentrée sous le signe de la COVID-19. Quelques enseignants (moins de dix) vont être embauchés à la Commission scolaire de langue française, un chauffeur d’autobus supplémentaire est annoncé, ainsi que quatre nouveaux adjoints administratifs et six concierges.
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PHOTOS : (incluant titre de la photo, légende et crédit du photographe ou courtoisie)
Trivers : Le ministre de l’Éducation, Brad Trivers, a présenté le 5 août dernier les principes encadrant le retour à l’école des 20 000 élèves de la province.
Morrison : La médecin hygiéniste en chef Heather Morrison prévient que le port du masque, pour le moment recommandé, pourrait devenir obligatoire selon l’évolution de la pandémie à l’Île.
THL : L’année scolaire 2019/20 a été interrompue par la COVID-19. Tammy Hubley-Little, directrice de l’enseignement en langue anglaise, prévoit que les principales lacunes à combler concerneront les mathématiques et l’alphabétisation.
Chapman : Marise Chapman, directrice par intérim de la Commission scolaire de langue française, n’est pas inquiète au sujet des cohortes, la plupart des classes francophones étant assez petites.
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- Date de création 7 août, 2020
- Dernière mise à jour 7 août, 2020