Attentes et défis pour l'avenir de l’éducation francophone

Malgré le manque d’attention portée à l'éducation francophone lors de la récente campagne électorale, l'Association des enseignantes et des enseignants francophones de l'Alberta (AEEFA) espère être en mesure de faire valoir ses besoins auprès du Parti conservateur uni (PCU) dans les prochains mois. D'autres acteurs du milieu souhaitent également poursuivre leur collaboration avec le gouvernement provincial afin d'améliorer l'accessibilité de l'éducation francophone à tous les niveaux.

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Gabrielle Audet-Michaud

IJL-RÉSEAU.PRESSE-LE FRANCO

Le climat de tension qui a prévalu entre les enseignants albertains et le gouvernement provincial, sous le règne de l'ancien premier ministre Jason Kenney et de l'ancienne ministre de l'Éducation Adriana LaGrange, a entraîné une perte de confiance qui n’est pas sur le point de disparaître, note le président de l’AEEFA, Stéfane Kreiner.

Dans ce contexte, il estime que le PCU devra d’abord et avant tout réaliser un travail de rattrapage auprès des enseignants pour colmater les brèches existantes. «On a eu quatre années extrêmement difficiles dans la profession enseignante. La relation avec le gouvernement PCU a été complètement fracturée», analyse-t-il.

Durant cette période, les restrictions budgétaires ont eu un impact considérable sur le milieu éducatif, se traduisant notamment par une explosion du nombre d'élèves par classe. De plus, les ressources d'aide destinées aux jeunes avec des défis d’apprentissage et des enjeux de santé mentale ont été restreintes.

«Quand j’ai trop d'élèves dans ma classe, je ne peux pas faire du un à un pour suivre l’apprentissage de chacun. Je suis forcé de prioriser les élèves qui ont de gros besoins, ce n’est pas équitable et même dysfonctionnel», appuie le président de l’AEEFA qui enseigne également à l’école primaire catholique francophone Notre-Dame, située à Edmonton.

Il espère que l’augmentation du financement dans le système d'éducation permettra non seulement de recruter de nouveaux enseignants, mais aussi de mettre à leur disposition un système d'assistance pour les élèves ayant des «besoins spécifiques».

Le curriculum en question

Sous le mandat d'Adriana LaGrange, des critiques ont également surgi concernant le contenu du nouveau curriculum qui a commencé à être mis en œuvre dans les écoles en septembre 2022. Selon Stéfane Kreiner, ce curriculum ne prépare pas adéquatement les élèves pour l'avenir, une préoccupation qui est exprimée par les enseignants «depuis déjà des années» sans être entendue.

Cependant, l’arrivée de Demetrios Nicolaides, ancien ministre de l’Enseignement postsecondaire, à la tête du ministère de l'Éducation (Alberta Education) pourrait bien changer la donne. L’enseignant croit même à une meilleure ligne d’écoute.

«On sait que tout le monde sera mieux servi si on travaille tous ensemble. Réparer la relation avec les enseignants devra être une priorité exceptionnelle pour le nouveau ministre. On a plusieurs dossiers sur lesquels il faut travailler ensemble», analyse-t-il.

Poursuivre le travail entamé

Du côté de la Fédération des conseils scolaires francophones de l’Alberta (FCSFA), l’objectif au cours des prochains mois sera de réitérer les priorités sur lesquelles le ministère de l’Éducation devra se pencher. Celles-ci devant assurer le respect des obligations constitutionnelles en matière d’équivalence réelle.

«On a fait beaucoup d’éducation auprès du gouvernement qui était au pouvoir et qui a été réélu. Ils sont très au courant de nos besoins et on va continuer de défendre les droits des Albertains avec le [nouveau] ministre», explique Tanya Saumure, présidente de la FCSFA.

Elle compte notamment s'appuyer sur le dernier recensement de Statistique Canada, qui a identifié 67 000 enfants qui auraient droit aux services d’éducation en français dans la province, pour encourager le gouvernement albertain à construire un nombre plus élevé d’écoles.

«On veut pouvoir répondre aux obligations des conseils scolaires et offrir une éducation francophone à l’ensemble des ayants droit de la province. En ajoutant des écoles, on limite aussi le temps de trajet en autobus», appuie la présidente.

Entre inflation et financement stable

En ce qui concerne l'enseignement postsecondaire, l'Association des Universitaires de la Faculté Saint-Jean (AUFSJ) s’attend à ce que la nouvelle ministre Rajan Sawhney soit plus sensible face aux défis financiers auxquels les étudiants font face et qui entravent leur capacité à bénéficier d'une expérience universitaire «de qualité». L'inflation et l'augmentation du coût de la vie continuent en effet d'avoir un impact important sur la population étudiante.

«Il nous faut de meilleures mesures que celles annoncées en février 2023. Le gouvernement doit agir face à l’insécurité alimentaire et créer des mesures financières qui permettent d’atteindre beaucoup plus d’étudiants», implore le coprésident de l’AUFSJ, Taylor Good.

Pour ce qui est de la situation financière du Campus Saint-Jean, Taylor plaide en faveur d’un financement «stable et à long terme» provenant de tous les paliers gouvernementaux, «y compris et notamment» du provincial.

«Même si la plateforme [électorale] du PCU ne mentionnait pas le Campus Saint-Jean, nous avons déjà vu le fruit d’une forte campagne de sensibilisation en juin 2022, alors on sait que c’est faisable. Maintenant, il faut s'assurer que le financement reste stable et qu’on ne revienne pas à la situation d’il y a deux ans», explique-t-il.

Selon ses observations, la demande croissante pour l’éducation francophone postsecondaire devrait se maintenir dans les années à venir. Afin d’éviter de cumuler un retard irrécupérable, il est donc essentiel que le gouvernement investisse en amont. «Il faut que le provincial reconnaisse ses responsabilités en avance et si on le fait, ça va devenir de bons investissements qui auront un bon retour pour tout le monde», avance-t-il.

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  • Date de création 24 juin, 2023
  • Dernière mise à jour 24 juin, 2023
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