Arbres déracinés par Fiona en forêt : «Il ne faut surtout pas les enlever»
Island Nature Trust évalue encore les impacts de Fiona dans les 66 zones naturelles qu’elle gère à travers la province. Mais on peut déjà dire que la situation n’est pas bonne, avec de larges pans de forêts mis à nu. La nature mettra des décennies avant de s’en remettre. Amy Frost-Wicks, gestionnaire du programme d’intendance des terres au sein de l’association, fait le point.
_______________________
Marine Ernoult
IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne
Amy Frost-Wicks, gestionnaire du programme d’intendance des terres au sein d’Island Nature Trust, nous parle des dommages causés par la tempête post-tropicale Fiona dans les zones naturelles gérées par l’association environnementale. Elle évoque le processus de régénération de la nature et l’importance de ne pas enlever les arbres au sol.
Quelle est la situation dans les 66 zones naturelles gérées par Island Nature Trust?
Nous évaluons encore les impacts de Fiona dans de nombreuses zones. Cela prend du temps, car nous ne pouvons pas pénétrer à l’intérieur des bois. C’est trop dangereux, beaucoup d’arbres menacent de tomber. Il nous reste environ la moitié des zones à inspecter. Pour l’instant, on a terminé l’évaluation des dommages dans les forêts qui comportent des chemins de randonnée ouverts au public. C’était notre priorité, car nous espérons les réouvrir bientôt. La situation n’est pas bonne, beaucoup d’arbres sont au sol. On utilise un drone pour mesurer l’ampleur des dégâts, et vu du ciel, on peut identifier de larges pans de forêts mis à nu, avec l’intégralité de la végétation déracinée. Mais on garde espoir, à d’autres endroits, la situation n’est pas aussi horrible que ce à quoi on s’attendait. Ce qui nous inquiète maintenant, c’est l’arrivée des premières neiges. De nouveaux arbres risquent de tomber sous le poids des flocons.
Après une tempête comme Fiona, comment la nature va-t-elle se régénérer?
C’est un processus long. En forêt, le sol contient de nombreuses graines qui tombent des arbres. En temps normal, un petit nombre seulement réussit à germer, car les bonnes conditions ne sont pas souvent réunies. Le sol n’est pas assez humide, il est recouvert de trop de végétations annexes. Mais lors d’un évènement perturbant comme Fiona avec de nombreux gros arbres déracinés, le sol de la forêt, et avec lui les graines qu’il recèle, est largement exposé à la lumière du soleil. Cela va permettre à ces graines de germer plus facilement. Et dans une ou deux saisons, on verra de nombreuses pousses de jeunes arbres. C’est crucial si l’on veut que la nature nous protège à nouveau lors de prochaines tempêtes liées au réchauffement climatique.
Vous évoquez un processus long, on parle de combien d’années?
Cela va prendre des décennies. Les forêts naturelles avec une grande diversité d’espèces d’arbres, d’âges variés, récupèreront mieux et plus vite que les forêts plantées qui ne comptent qu’une ou deux espèces d’arbres du même âge. À travers l’Île-du-Prince-Édouard, on a des poches de forêts en bonne santé avec des zones naturelles protégées par des propriétaires privées, des associations comme la nôtre ou Nature Conservancy, ou encore par les gouvernements fédéral et provincial. Mais à cause de l’histoire de la colonisation et de l’agriculture à l’île, il n’y en a pas beaucoup.
À propos des nombreux arbres au sol, que faut-il faire, les laisser ou les enlever?
Il ne faut surtout pas les enlever. Ils vont se décomposer dans le sol, y apporter des nutriments, cette biomasse va aider l’écosystème à se régénérer. À terre, ils fournissent également un habitat pour les oiseaux et toute la faune sauvage. Autre avantage, les troncs au sol contribuent à prévenir les feux de forêt, car ils absorbent et retiennent plus d’humidité.
Que peuvent faire les Insulaires pour vous aider? On leur demande surtout de laisser de l’espace à la nature dans les prochaines années. Ne coupez pas et n’enlevez pas les arbres dans les bois. Le long des côtes, ne marchez pas sur les dunes et ne vous approchez pas non plus des zones où les dunes étaient présentes avant la tempête. Elles auront plus de chance de se reformer, car les plantes et le sable sont toujours là. C’est la clé. Au sein de notre association, il y a par ailleurs quelques opportunités pour être volontaire. Nous menons également une campagne pour lever des fonds, appelée «Mend a Patch». L’objectif est de nous aider à restaurer les zones naturelles touchées par Fiona.
-30-
Photos
Suite à Fiona, les dommages sont importants dans les 66 zones naturelles gérées par Island Nature Trust. (Photos : Gracieuseté)
Amy Frost-Wicks est gestionnaire du programme d’intendance des terres au sein de Island Nature Trust. (Photo : Gracieuseté)
- Nombre de fichiers 7
- Date de création 25 octobre, 2022
- Dernière mise à jour 25 octobre, 2022