À Prescott et Russell, les femmes réclament l’égalité

«Quand ça ne va pas bien pour les femmes et les filles, ça ne va pas bien dans le monde», affirme Marie-Noëlle Lanthier, présidente de Leadership féminin Prescott-Russell (LFPR). «Ce sont elles qui sont responsables des familles et des enfants qu’on élève.»

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Charles Fontaine

IJL – Réseau.Presse – Le Droit

Il faut donc agir, croit la militante. Avec une nouvelle campagne de sensibilisation.

L’égalité des genres est loin d’être atteinte dans Prescott et Russell, proclament plusieurs organismes locaux comme le sien. En amont de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, il était donc temps, disent ces groupes engagés, de dresser un portrait de la condition féminine dans plusieurs secteurs de la région, afin de dénoncer les barrières systémiques à l’égalité des genres.

Lancée en 2022, la Table Concerté.e.s pour l’égalité réunit une trentaine d’organismes locaux, dont LFPR et Centraide, afin de «contribuer à la résilience et à l’épanouissement des femmes et des filles du milieu rural de Prescott-Russell».

La campagne «Élevons nos voix» présente un portrait de la condition de la femme dans la région, afin d’améliorer la situation sous différents aspects.

Santé et équité sociale – Enjeux qui affectent la résilience et la santé globale des femmes

Justice et sécurité – Traitement des femmes en matière de justice

Économie et entrepreneuriat - Participation des femmes à la prospérité économique

Politique et gouvernance - Participation des femmes dans les lieux décisionnels.

«L’idée n’est pas de lancer de nouveaux programmes, mais d’aider les organismes à mieux 

s’aligner vers la parité», explique Mme Lanthier.

Le Centre de leadership et d’évaluation (CLÉ) a été mandaté pour la recherche et la rédaction de ce rapport de 38 pages.

Présence politique

La présence des femmes en politique dans le secteur est en ce moment la plus forte historiquement, avec un quart de la représentation politique. C’est toutefois «loin d’être paritaire», selon les organismes.

«Certains hommes pensent que les femmes ont autant de chances de se présenter en politique, rapporte la présidente de LFPR. Au contraire, les tâches familiales compliquent la tâche. Elles ont besoin d’un plus grand appui, surtout pour les femmes monoparentales.»

Plus d’une famille sur huit dans Prescott et Russell est monoparentale et près des trois quarts de ces familles sont menées par une femme.

Iniquité salariale

Le revenu médian des femmes est plus bas que celui des hommes, ce qui crée un écart salarial de 17 %. Au Canada, la différence de revenus est de 11,1 %. Le taux de chômage dans Prescott et 

Russell est également plus élevé chez les femmes, à 7,3 %.

Le rapport tente d’expliquer ces écarts par «la surreprésentation des hommes dans des secteurs hautement rémunérés, comme la construction et la fabrication, et la surreprésentation des femmes dans des postes à temps partiel, qui tendent à être moins bien rémunérés».

«D’autres analyses mentionnent les pénalités sur le revenu causé par la maternité et les interruptions de carrières», écrit-on.

La Table Concerté.e.s pour l’égalité veut se pencher sur les raisons pour lesquelles les femmes travaillent moins.

«En affaires, c’est un choix difficile d’avoir un enfant ou non, soutient Mme Lanthier. Les systèmes qui nous gouvernent n’ont pas évolué au même rythme que la société.»

Logement

Plus de deux tiers des personnes en attente d’un logement dans Prescott et Russell sont des femmes, ce qui représente «l’un des défis les plus importants pour la condition féminine». Le manque de logement peut avoir des incidences sur son niveau de stress, sa sécurité, sa capacité à participer sur le marché de travail, ainsi que sa capacité et son désir de s’engager dans des rôles de gouvernance.

«Si les politiciens veulent une présence féminine en politique, il faut commencer par leur offrir un logement pour qu’elles puissent vivre en sécurité», proclame l’ancienne mairesse de Hawkesbury, Jeanne Charlebois, lors d’une envolée en conférence de presse.

«Je vois des femmes qui ne sont pas écoutées, poursuit-elle. J’en parle depuis 2006. Combien de fois va-t-on appuyer des résolutions qui ne mènent à rien ? Aujourd’hui, tu ne vois peut-être pas l’avantage des petites maisons à prix modiques. Mais un jour, ce sera ta petite fille qui en aura besoin. C’est un problème auquel il faut faire face maintenant et non demain.»

La violence faite aux femmes demeure largement supérieure à celle subie par les hommes, quelle qu’en soit la nature. En 2020, les hommes représentaient 30 % des victimes d’incidents conjugaux et d’infractions sexuelles.

Milieu rural

La ruralité de la région accentue les problèmes vécus par les femmes, croit Marie-Noëlle Lanthier.

«Sans institutions postsecondaires comme en ville, elles n’ont pas accès à un plaidoyer public pour revendiquer leurs convictions», explique-t-elle.

En milieu rural, les gens sont également plus isolés et les modèles familiaux n’ont pas évolué au même rythme qu’en ville.

«Les rôles parentaux sont plus ancrés dans la tradition, rapporte-t-elle. Les rôles sont bien définis par rapport aux générations passées. La population francophone est également plus établie dans la religion, où des coutumes et pratiques reflètent le patriarcat. Les changements des modèles mentaux sont plus difficiles à apporter.»

Une première étape

Ce portrait de la condition féminine dans Prescott et Russell va permettre aux organismes, entreprises et paliers politiques de mieux guider leurs actions pour donner une plus grande place aux femmes dans leur milieu.

«Ces chiffres viennent confirmer nos impressions de ce que vivent les femmes, souligne Mme Lanthier. Maintenant, on sait où aller creuser davantage pour améliorer la situation.»

Qu’est-ce qui vous a le plus surpris dans ce rapport ?

«Pour les femmes, il n’y avait rien de surprenant, répond Mme Lanthier. Celles qui travaillent avec les femmes dans les organismes ont entendu beaucoup de témoignages qui confirment les statistiques reflétées.»

La campagne «Élevons nos voix.com» se déroulera du 20 février au 8 mars sur les réseaux sociaux de LFPR et se clôturera par une conférence de Kim Thuy le 8 mars.

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Photos

Un rapport sur la conditions féminines dans Prescott et Russell vient confirmer les préoccupations des femmes et des filles par rapport aux inégalités des genres dans plusieurs secteurs. (123RF)

Marie-Noëlle Lanthier, présidente Leadership féminin Prescott-Russell (Jan Amell Photography)

La présidente de la Banque alimentaire de Hawkesbury, Jeanne Charlebois, se dit déçue par l'inaction des gouvernements pour améliorer la condition féminine dans la région. (Charles Fontaine/Le Droit)

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  • Date de création 20 février, 2024
  • Dernière mise à jour 20 février, 2024
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