À l’Île-du-Prince-Édouard, un risque de feux de forêt plus précoces et plus intenses

Si le risque de feux de forêt à l’Île semble pour l’instant derrière nous, les acteurs sont conscients que la menace demeure élevée. Ils se tiennent prêts pour cet été et assurent qu’ils peuvent compter sur l’aide du reste du pays. Avec le réchauffement climatique, ils savent aussi que les incendies seront de plus en plus fréquents et sévères.

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Marine Ernoult

IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne

 

 

 

L’île souffle, enfin. Après une semaine de pluie et de températures fraîches, «le risque immédiat de feux de forêt est beaucoup plus faible», selon Mike Montigny, directeur des services de lutte contre les incendies de l’Île-du-Prince-Édouard.  Le parc national et la province ont même levé leur interdiction de feux en plein air.

Mais la situation peut changer très rapidement. «Il suffit de deux ou trois semaines sans précipitations et nous pourrions à nouveau nous retrouver avec un risque élevé, voire extrême», prévient Mike Montigny.

«Ça peut virer de bord très vite, il suffit de 4 à 5 jours à plus de 30 degrés et des vents violents pour qu’un feu se déclenche», confirme Richard Barry, professeur à l’École de foresterie de l’Université de Moncton, spécialiste de la gestion du feu.

La province, mais aussi le parc national, assurent toutefois qu’ils ont les ressources nécessaires pour faire face à n’importe quel type d’incendie durant l’été.

Solidarité nationale

«Nous savons qu’avec les débris laissés par Fiona le risque d’un gros incendie existe. Nous nous sentons prêts», insiste Robyn Caissie, responsable de la sécurité des visiteurs et de la coordination des incendies au parc national de l’Î.-P.-É. Depuis 2000, le parc n’a connu que trois petits feux d’origine humaine.

Le parc dispose d’une équipe de onze personnes formées à la lutte contre l’incendie. Des équipements, comme des lances à eau, sont également présents sur les campings de Cavendish et de Stanhope.

En plus de ses 50 pompiers professionnels, la province travaille, elle, en étroite collaboration avec tous les services de pompiers volontaires de l’île.

«Il y a déjà eu quelques petits incendies cette année et nous avons pu être sur les lieux très rapidement : notre temps de réponse n’a jamais été aussi rapide qu’aujourd’hui», souligne Mike Montigny.

Les autorités comptent également sur l’aide des autres provinces et territoires. Mike Montigny affirme être en discussion constante avec ses homologues canadiens sur la manière de répartir les ressources humaines et logistiques dans l’ensemble du Canada.

«Nous avons tissé un réseau. Si on se retrouve dépassé, on peut même faire appel aux États-Unis, voire à d’autres pays dans le monde.»

Apprendre à protéger sa maison

De son côté, le parc national peut demander l’appui du bureau national de gestion des incendies de Parcs Canada. Cinq équipes spécialisées sont prêtes à intervenir dans tout le pays en cas de besoin. «Nous pouvons aussi obtenir des bombardiers d’eau, des hélicoptères capables de transporter des seaux d’eau», précise Robyn Caissie.

Pour tenter de limiter les risques, les équipes du parc pratiquent ce qu’on appelle des brûlages dirigés dans des zones prioritaires, autour des lignes et des poteaux électriques notamment.

«Quand le risque incendie est très bas en automne et en hiver, nous effectuons des travaux à la tronçonneuse et nous brûlons de petits tas de broussailles», rapporte Robyn Caissie.

La province promeut quant à elle le programme d’éducation et de prévention Fire Smart. Cette initiative nationale explique aux propriétaires comment mieux protéger leurs maisons.

Il est ainsi conseillé d’avoir des portes et un toit en matériaux résistants au feu comme l’asphalte ou l’argile. Il est également recommandé de maintenir une zone incombustible de 1,5 mètre autour des habitations. Cela signifie avoir une surface de terre, de roche ou de pierre, sans plantes, débris ou autres matériaux inflammables.

Combat inégal

Quels que soient les moyens déployés, les acteurs sont conscients qu’avec le réchauffement climatique, le combat va être de plus en plus inégal.

«La saison des incendies s’allonge déjà, car les arbres et la terre s’assèchent beaucoup plus rapidement», constate Robyn Caissie.

En cause, des hivers avec toujours moins de glace et de neige, des printemps et des étés toujours plus secs.

D’ici 2050, les feux seront plus fréquents, plus précoces et plus sévères, comme l’explique Richard Barry de l’Université de Moncton : «Davantage de gros arbres seront brûlés en profondeur et on aura plus de feux majeurs qui grimperont dans les cimes.»

Le chercheur révèle par ailleurs que les incendies seront plus difficiles à contrôler à cause «d’épisodes de vents et de sécheresses extrêmes».

«C’est un cercle vicieux, parce qu’il fait plus chaud, les arbres transpirent plus, ce qui assèche encore plus les broussailles et la matière organique au sol. Ça devient une poudrière», poursuit-il.

Face aux changements climatiques, Richard Barry appelle plus que jamais à réfléchir aux méthodes de gestion des incendies.

Il évoque notamment les techniques utilisées par les peuples autochtones : «On doit réussir à vivre avec le feu qui est aussi un élément essentiel à la régénération des écosystèmes forestiers.»

 

 

 

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Photos

 

Robyn Caissie est responsable de la sécurité des visiteurs et de la coordination des incendies au parc national de l’Î.-P.-É.  (Photo : Parcs Canada)

 

Photo : Pexels, Alexandre P.Junior

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  • Date de création 19 juin, 2023
  • Dernière mise à jour 19 juin, 2023
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