1755 : avant le 28 juillet, le Grand Dérangement a commencé à Beaubassin

Comme tous les ans, quelques dizaines de fidèles se sont rassemblés autour du monument de l’Odyssée acadienne, à Dieppe, afin de commémorer la proclamation de la Déportation. Cependant, le Grand Dérangement a débuté avant cette date.

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Damien Dauphin

IJL – Réseau.Presse – Le Moniteur Acadien

  

La Fédération des associations de familles acadiennes (FAFA) avait invité ses membres et sympathisants à se retrouver à Dieppe pour faire mémoire du souvenir du Grand Dérangement. C’est le 28 juillet 1755 que fut prise la décision de déporter les Acadiens lors du grand conseil d’Halifax. Ils « dérangeait le système », et certains prétendaient qu’ils constituaient une menace à la sécurité militaire britannique.

« C’est l’excuse qui fut avancée pour proclamer la Déportation, raconte Jean Gaudet. Il ne faut pas méconnaitre non plus que la plupart des pressions en faveur de la Déportation des Acadiens venaient des colons britanniques de Nouvelle-Angleterre, en particulier de Boston. Ils se sont fait un devoir de fournir les bateaux et les soldats qui ont ramassé les Acadiens. »

Jean Gaudet est un puits de science historique. Si Grand-Pré est un lieu mythique de l’odyssée des Acadiens, selon les faits qu’il relate, les premières exactions des Britanniques ont commencé dans le secteur de Beaubassin, et ce, bien avant la date fatidique du 28 juillet.

« Ç’a commencé au mois de juin avec les gens qui avaient été capturés à Beaubassin et le long de la rivière Petitcodiac, et qui avaient été gardés un mois dans un fort. Environ 87 d’entre eux avaient réussi à creuser un trou sous la palissade et en sortir. La plupart des familles de la région n’ont pas été déportées. Elles se sont sauvées et ont eu de la misère. Ces gens qui sont restés pour survivre durant toutes ces années du Grand Dérangement ont probablement plus souffert que ceux qui, malheureusement, ont été déportés », a-t-il précisé.

À 17h55 précises, M. Gaudet a fait sonner les cloches en mémoire de l’événement. Symboliquement, Mère Nature a contribué à cette solennité au moyen d’un clin d’œil surnaturel. Dans les minutes qui ont précédé ce carillon, le ciel du Grand Moncton s’est progressivement assombri pour se couvrir de gros nuages noirs. Si aucun orage n’a éclaté, il est remarquable que les cumulonimbus se fussent concentrés au-dessus de Riverview.

Une quarantaine de personnes étaient présentes. Parmi les dignitaires se trouvaient Véronique Mallet, directrice générale de la Société nationale de l’Acadie (SNA), ainsi qu’Alexandre Cédric Doucet, président de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), accompagné de son directeur général, Ali Chaisson.

Plus tôt dans la journée, M. Doucet était venu se recueillir en privé devant le monument. « Il faut se souvenir des souffrances vécues par nos ancêtres. Il est de notre devoir de garder notre Acadie vivante », avait-il alors écrit sur Facebook.

La députée fédérale de Moncton-Riverview-Dieppe et ministre des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor, a également fait paraître une déclaration publique dans laquelle elle écrit que « plusieurs générations d’Acadiens ont été transformées à jamais ».

« Près de trois siècles plus tard et contre vents et marées, le peuple acadien résiste toujours et continue de lutter pour assurer la survie de notre langue et de notre peuple », a fait savoir la ministre.

Représentant de l’Acadie au Centre de la Francophonies des Amériques, Luc J. Doucet, de Dieppe, a déposé une gerbe de lys cueillis dans son propre jardin, en mémoire de ses ancêtres. Pour lui, la cérémonie a gardé toute sa pertinence, en particulier en des temps troublés où des crispations se cristallisent de plus en plus au sein même de la société civile.

« Nous avons toutes et tous un devoir de mémoire pour que cela ne se reproduise pas. Malheureusement, depuis 1755, il y a eu de multiples génocides. Il faut s’en rappeler et transmettre cette information aux plus jeunes. La montée des mouvements extrémistes est inquiétante pour nos enfants et petits-enfants », estime Luc Doucet.

Le prochain rassemblement aura lieu à Grand-Pré (Nouvelle-Écosse), le 5 septembre. L’acte de déportation transmis par John Winslow y sera lu. Cette année marque le centenaire de l’église-souvenir. Celle-ci est largement inspirée par l’église Sainte-Marguerite-de-Blairfindie, à Saint-Jean-sur-Richelieu (Québec), qui fut construite par d’anciens habitants de Grand-Pré d’après les souvenirs qu’ils avaient conservés de l’architecture de leur paroisse.

 

 

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Photos

 

Titre : Croix

Légende : Le monument de l’Odyssée acadienne a retrouvé sa croix.

Crédit : Damien Dauphin – Le Moniteur Acadien

 

Titre : Commémoration

Légende : Le ciel s’est progressivement obscurci à mesure que l’on s’approchait de 17h55.

Crédit : Damien Dauphin – Le Moniteur Acadien

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  • Date de création 3 août, 2022
  • Dernière mise à jour 3 août, 2022
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